e spectre des essais nucléaires français en Algérie et en Polynésie continue de hanter les mémoires et de susciter des débats, plusieurs décennies après les faits. Alors que la France a reconnu officiellement les conséquences dévastatrices de ces essais sur la santé des populations locales, les questions d’indemnisation et de réhabilitation des sites contaminés demeurent en suspens.
Un Douloureux Héritage Atomique
L’histoire des essais nucléaires français est marquée par la douleur et le silence. Pendant des années, la France a mené des essais nucléaires en Algérie et en Polynésie, exposant des populations locales à des radiations dangereuses et laissant derrière elle un héritage de souffrance et de destruction. Si la France a officiellement reconnu sa responsabilité dans ces méfaits, la question cruciale de l’indemnisation des victimes et de la décontamination des sites contaminés demeure un sujet brûlant.
Le Rejet Initial : Délai de Prescription
Le 10 novembre 2023, le tribunal de Strasbourg a rendu une décision qui a laissé un goût amer aux victimes et à leurs familles. Le tribunal a rejeté les demandes d’indemnisation de proches de victimes des essais nucléaires français, au motif que le délai de prescription était dépassé. Cette décision a été un coup dur pour trois veuves et leurs enfants qui cherchaient à obtenir la reconnaissance de leurs préjudices après le décès de conjoints atteints de cancer suite à l’exposition aux rayonnements ionisants résultant des essais nucléaires français.
La bataille pour la justice semblait compromise, mais l’histoire n’est pas encore terminée.
Deux Nouvelles Voix S’Élèvent
Malgré le rejet initial, deux veuves ont décidé de poursuivre leur quête de justice en portant plainte contre l’armée française. Leur histoire est celle de la persévérance face à l’injustice. Ces deux veuves, touchées de manière indirecte par les essais nucléaires français en Algérie et en Polynésie, veulent faire reconnaître leur préjudice.
Le dépôt de plainte a eu lieu le mardi 5 décembre, devant le tribunal administratif de Dijon. Cette action en justice marque la troisième affaire de ce genre portée devant les tribunaux. « On ne prend pas en compte nos vies complètement chamboulées », déclare Michèle Larmier, 80 ans, l’une des veuves, qui dénonce « une injustice ». Elle rappelle que son mari, le capitaine de frégate Claude Larmier, est décédé en 1995 d’un cancer du côlon après avoir assisté à cinq essais nucléaires en 1968 depuis le porte-avions Clémenceau mouillé à Tahiti. Son témoignage est poignant : « Quand Claude (son mari) est mort, sa retraite de 15.000 francs, qu’on touchait, est tombée à 3.500 francs », soit l’équivalent de 794 euros.
L’autre veuve engagée dans cette action en justice est Monique Goret, veuve de Gérard, décédé en 1999 d’un lymphome. Gérard était chef de chantier à In Ekker, dans le Sahara algérien, lors du grave accident du 1er mai 1962 où l’essai nucléaire Béryl a explosé la montagne où il était censé être confiné, contaminant des centaines de personnes. Monique, en raison de sa santé fragile, ne pouvait pas être présente au tribunal, mais son témoignage résonne avec une puissante vérité.
Un Dossier en Suspens
Ce dossier des essais nucléaires français en Algérie et en Polynésie est loin d’être clos. Les victimes et leurs familles attendent toujours des indemnisations pour les préjudices subis. De plus, les sites contaminés par les essais nucléaires attendent depuis longtemps une réhabilitation par le biais de la décontamination, une étape qui tarde à se concrétiser malgré les déclarations rassurantes des responsables français.
La question des essais nucléaires français en Algérie et en Polynésie reste donc une épine dans le pied des autorités françaises et un rappel permanent de l’impact dévastateur de ces événements sur la vie des victimes et de leurs familles. Alors que les veuves se battent pour faire entendre leur voix devant la justice, elles incarnent la résilience et la détermination dans leur quête de justice pour ceux qui ont souffert en silence pendant trop longtemps. Ce dossier, loin d’être résolu, continue de susciter des interrogations et d’appeler à une réparation pour les erreurs du passé.