Génocide colonial: L’indélébile blessure

« Je crois que le droit de la guerre nous autorise à ravager le pays et que nous devons le faire soit en détruisant les moissons à l’époque de la récolte, soit dans tous les temps en faisant de ces incursions rapides qu’on nomme razzias et qui ont pour objet de s’emparer des hommes ou […] The post Génocide colonial: L’indélébile blessure appeared first on Le Jeune Indépendant.

Oct 31, 2024 - 20:42
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Génocide colonial:  L’indélébile blessure

« Je crois que le droit de la guerre nous autorise à ravager le pays et que nous devons le faire soit en détruisant les moissons à l’époque de la récolte, soit dans tous les temps en faisant de ces incursions rapides qu’on nomme razzias et qui ont pour objet de s’emparer des hommes ou des troupeaux ». Cette citation d’Alexis de Tocqueville, le penseur libéral, chantre de la démocratie en Amérique résume à elle seule, la pensée coloniale qui perdure jusqu’à aujourd’hui dans une certaine France nostalgique d’une grandeur criminelle passée.

Commettre des crimes au nom d’un supposé droit de la guerre, outil exclusif légitimant au nom d’une supériorité civilisationnelle, l’entreprise coloniale française en Algérie et européenne en Afrique et dans le reste des pays du Sud, demeure jusqu’à présent le soubassement idéologique qui explique pourquoi la France coloniale s’est ingénié de tuer, piller, torturer, brûler, mutiler tout Algérien, confinant à l’ethnocide.

La liste des généraux génocidaires français en Algérie est interminable : depuis De Bourmont à De Gaulle, en passant par les sinistres Rovigo, Cavaignac, Bugeaud, Lamoricière,  Saint Arnaud, Salan, Massu, Aussaress et autres criminels de guerre ont été coupables de crime de guerre, de crime contre l’humanité, de génocide, d’ethnocide.
Le nombre des victimes dépassent de très loin le million et demi de martyrs de la glorieuse révolution du 1er novembre 1954, le chiffre s’élèverait au minimum à quelque 8 millions de martyrs algériens entre 1830 et 1962.

Passons les décapitations des résistants des Zibans (Zaatcha) en 1848, dont les restes mortuaires ont été longtemps exposés au Musée de l’Homme de Paris avant qu’ils ne soient rapatriés en juillet 2020, l’utilisation des gaz chimique pour la première fois de l’histoire contre les habitants de la ville de Laghouat en 1852 pour arriver aux massacres du 08 mai 1945 à Sétif, Guelma et Kherrata et aux essais nucléaires de Reggane et d’In Ekker en 1960.

Le palmarès criminel de la France dépasse tout entendement et n’a d’égal que les rapports systématiques et quotidiens des forfaits. Tout a été consigné par les auteurs même de ces crimes, un témoignage pour la postérité mais surtout pour un travail de mémoire nécessaire afin de débusquer les exécutants de la mécanique coloniale.

Les déclarations de ces sinistres personnages suffisent pour prendre toute l’ampleur des crimes qu’ils ont commis et dont ils s’enorgueillissent. Pélissier, le bourreau du Dahra, dont les enfumades de Aïn Merane, en août 1845 restent dans toutes les mémoires, écrit en mai 1841 : « Nous resterons jusqu’à la fin juin nous battre dans la province d’Oran, et à y ruiner toutes les villes, toutes les possessions de l’émir. Partout il trouvera l’armée française, la flamme à la main ».

Macron et le discours contradictoire

 Son collègue dans le crime, Bugeaud, apôtre de la politique de la terre brûlée, va dans le même sens. « Plus d’indulgence, plus de crédulité dans les promesses. Dévastations, poursuite acharnée jusqu’à ce qu’on me livre les arsenaux, les chevaux et même quelques otages de marque… Les otages sont un moyen de plus, nous emploierons, mais je compte avant tout sur la guerre active et la destruction des récoltes et des vergers », écrit-il à Lamoricière en 1843.

Jules Ferry, pour ne citer que le père de l’école française, grand chantre du colonialisme, n’a pas mis de gants pour justifier l’entreprise coloniale. « Messieurs, il faut parler plus haut et plus vrai ! Il faut dire ouvertement qu’en effet les races supérieures ont un droit vis-à-vis des races inférieures […]. Elles ont le devoir de civiliser les races inférieures », s’est-il écrié. Ainsi, la France, phare de la civilisation a un droit naturel, en tant que « race » supérieure, et un devoir, celui de civiliser les « races » inférieures. Le national-socialisme allemand n’aura pas fait mieux, et cet extrait de Ferry ressemble à s’y méprendre à un texte d’Adolf Hitler.

Et c’est au nom de cette prétendue supériorité civilisationnelle que la France a procédé au déracinement du peuple algérien, au séquestre de ses biens, à son acculturation, à son confinement dans des zones inhabitables et reculées. Les gouvernements français successifs n’ont jamais admis les crimes commis au nom de la France et de sa « grandeur » coloniale.

Des pas timides ont été faits : trois présidents se distinguent pour avoir « oser » à demi-mots parler de guerre d’Algérie au lieu des événements d’Afrique du Nord (Jacques Chirac en 2002), des « souffrances que la colonisation a infligées au peuple algérien » (François Hollande en 2012), et de « la colonisation, crime contre l’humanité » (Emmanuel Macron, candidat à la présidentielle en 2017).

Élu président, Macron aura un autre discours. En 2023, le président français déclarait « qu’il n’avait pas à demander pardon pour la colonisation ». Ce que le chef de l’Etat français a oublié ou n’a pas compris, ou ne compte pas comprendre, c’est que les Algériens ne cherchent pas un pardon français.

Les crimes étant imprescriptibles, les Algériens demandent aux Français de reconnaître leurs forfaits, de reconnaître qu’ils ont commis l’irréparable à l’encontre de tout un peuple martyrisé 132 années durant. Aucune réparation aussi importante soit-elle ne pourra compenser les ravages d’une guerre coloniale, aliénante, annihilatrice et déshumanisante. Comme aucune excuse ou pardon ne sauraient panser les plaies béantes qui marquent encore l’imaginaire du peuple algérien.

Ce que les Algériens réclament, c’est la restitution de tout ce que les Français ont volé en envahissant le pays. Du Canon Baba Marzouk, au sabre de l’Emir Abdelkader en passant par les archives de l’époque ottomane, de la colonisation et surtout de la période de la révolution.

Le séquestre de l’histoire de l’Algérie par la France néocoloniale et foncièrement revancharde est en soi un crime qui contribue à la perpétuation d’un complexe outre Méditerranée, celui du colonisateur qui refuse de voir la vérité en face, celle de la victoire d’un peuple qui a décidé de prendre son destin entre ses mains et lancer une révolution libératrice de la terre et de l’homme en Algérie et dans le monde, le 1er novembre 1954.

 

 

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