La France propose déjà son leadership à l’Europe

  Emmanuel Macron a, dans une adresse aux Français marquée au sceau de la solennité, désigné la Russie comme une menace pour l’Europe, à laquelle il fallait dès à présent commencer à faire face. La Russie ne s’arrêterait pas à l’Ukraine, a-t-il expliqué, laissant entendre par là même que le sort de cette dernière est […]

Mars 8, 2025 - 18:29
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La France propose déjà son leadership à l’Europe

 

Emmanuel Macron a, dans une adresse aux Français marquée au sceau de la solennité, désigné la Russie comme une menace pour l’Europe, à laquelle il fallait dès à présent commencer à faire face. La Russie ne s’arrêterait pas à l’Ukraine, a-t-il expliqué, laissant entendre par là même que le sort de cette dernière est d’ores et déjà scellé, ce qui jusque-là ne semblait une évidence pour personne. Le président français en tout cas en a parlé comme si elle était en entier occupée par une Russie, qui en plus n’aurait pas l’intention de s’en contenter, mais voudrait étendre plus loin, toujours plus loin ses conquêtes, si bien que si on la laissait faire, ses armées finiraient par envahir toute l’Europe occidentale. Une seule voie de salut : réarmer l’Europe pour qu’elle puisse le moment venu assurer sa propre défense, les Etats-Unis ayant cessé d’être le protecteur à l’ombre duquel l’Europe pouvait jouir des «dividendes de la paix», prospérer tout en cultivant sa différence. Le président français, comme beaucoup de ses compatriotes, n’aurait probablement pas parlé d’une nouvelle ère qui commence si la nouvelle administration américaine avait suivi la même politique que l’administration Biden, pour ce qui est de la guerre en Ukraine. L’altercation de la Maison-Blanche entre Trump, son vice-président et Zelensky, a mis fin à tout espoir de cet ordre.
Les autres Européens sont nettement plus prudents dans leurs réactions, à cette scène comme en général à tout ce que vient de Trump, que les Français qui eux n’y vont pas de mainmorte, ce qui n’est pas sans risque pour eux. La France en est déjà à proposer son parapluie nucléaire à l’Europe, incitée à cela, il est vrai, par quelqu’un qui somme toute n’est pas encore le nouveau chancelier allemand, et qui une fois qu’il l’est devenu, pourrait très bien tenir un autre langage. On voit mal la Pologne, les pays baltes, et d’autres encore, se placer sous l’aile protectrice de la France du seul fait que les Etats-Unis se montrent pressés de mettre la fin à un conflit ayant tout pour se développer en troisième guerre mondiale. Ils attendraient pour cela que l’Otan, dont ils sont membres, ait cessé d’exister. En soi, le réarmement de l’Europe, prôné au dernier Conseil européen, mais dont la mise en œuvre n’est pas dans l’immédiat, est si peu annonciateur de rupture avec les Etats-Unis qu’il répond au contraire à une demande réitérée, pressante même, de leurs parts. Armez-vous pour que nous autres Américains puissions nous concentrer sur d’autres périls dans le monde. C’est d’ailleurs ainsi que l’entendent en général les Européens. Ni les Italiens, ni les Anglais, ni les Polonais, pour ne citer que ces trois-là, ne voudraient paraître disposés dès aujourd’hui à se projeter dans un avenir où le leadership en Occident ne reviendrait plus aux Etats-Unis. L’Italie n’enverrait pas de troupes en Ukraine pour y maintenir la paix, si jamais cette dernière était rétablie. L’Allemagne n’y était pas favorable. Le sera-t-elle demain, une fois le nouveau gouvernement installé? On ne peut rien en dire, ni dans un sens ni dans un autre. On ne connaît même pas la position de l’Espagne, ainsi que de beaucoup d’autres, à cet égard. On sait en revanche que la Grande-Bretagne y est favorable, tout à l’opposé des Etats-Unis, mais comme pour se trouver là où ceux-ci ont décidé d’être absents, non dans l’intention de se substituer à eux.