Les Etats arabes passent sous silence la responsabilité morale d’Israël dans la reconstruction de Gaza
Une contribution de Mourad Benachenhou – «Michael Barnett, professeur en relations internationales et en sciences politiques à l’Université George Washington,... L’article Les Etats arabes passent sous silence la responsabilité morale d’Israël dans la reconstruction de Gaza est apparu en premier sur Algérie Patriotique.

Une contribution de Mourad Benachenhou – «Michael Barnett, professeur en relations internationales et en sciences politiques à l’Université George Washington, a observé que les Nations unies énumèrent une série de facteurs de risque de génocide et de formes moindres de violence organisée dans un pays donné. Parmi ces facteurs de risque figurent de graves violations des droits humains, une discrimination systématique à l’encontre d’un groupe vulnérable, des attaques généralisées contre des civils, ainsi que le motif et la capacité de commettre des atrocités plus larges. Israël coche toutes les cases, a-t-il observé.»(Peter Beinart, Could Isrel Carry Out Another Nakba ?)
La Cour pénale internationale (CPI) n’a pas attendu le tout récent rapport d’Amnesty International, paru en décembre 2024, frappé d’embargo total et aussi étanche qu’une montre de grande plongée, et mis «sous le coude» par les «médias libres des démocraties avancées». Le rapport (Amnesty concludes Israel is committing genocide in Gaza) accuse formellement l’entité sioniste de génocide contre le peuple palestinien, pour lancer ses propres enquêtes et aboutir à la conclusion que les dirigeants sionistes qui commandent ce nettoyage ethnique doivent subir les foudres de la loi internationale réprimant les crimes contre l’humanité, dont fait partie le génocide.
Cependant, au lieu d’être félicitée pour faire son travail destiné à assurer que les traités internationaux «humanitaires», dont font partie la quatrième Convention de Genève et le traité interdisant le génocide, voici que l’exécution de ses mandats d’arrêt est mise en cause par plusieurs puissances mondiales. Plus grave encore, ses propres magistrats sont frappés de sanctions par les autorités des mêmes pays qui appellent au respect de l’ordre international fondé sur la loi, représentée par les traités gouvernant les relations entre les différents pays du monde.
Nul Etat n’est au-dessus des lois internationales
Même un quotidien allemand, le Frankfurter Algemeine Zeitung, qui, pourtant, au vu du propre passé nazi de son pays, fait preuve d’une grande prudence lorsqu’il s’agit de l’entité sioniste, n’a pas hésité à publier une contribution particulièrement audacieuse, condamnant cette tentative officielle de décrédibiliser la Cour pénale internationale et d’appeler à la boycotter et à ne pas appliquer ses mandats d’arrêt visant les dirigeants sionistes.
Voici un extrait de l’article publié par ce quotidien allemand et rédigé par Reinhard Muller, éditorialiste politique, sous le titre «Commentaire sur les Etats-Unis et la Cour pénale internationale : Trump n’est pas non plus Immunisé». «Plus jamais – c’est aussi un message de la Cour pénale internationale. Le génocide et les crimes contre l’humanité ne doivent plus jamais rester impunis, même s’ils ont été ordonnés par les chefs d’Etat et de gouvernement. Le test le plus difficile pour le tribunal de La Haye, auquel tous les pays de l’UE et la majorité de tous les pays du monde se sont soumis, est le mandat d’arrêt contre le Premier ministre israélien. C’est aussi une raison importante pour les sanctions que le président américain Trump a (à nouveau) annoncées.»
«Ce qui est vrai, c’est que ni les Etats-Unis ni Israël ne sont parties contractantes au tribunal – mais celui qui l’attaque attaque fondamentalement tous les Etats qui soutiennent La Haye. C’est pourquoi tout le monde doit faire comprendre qu’il ne tolère pas les sanctions contre un tribunal international.»
«Aucun Etat n’est juridiquement supérieur à l’autre.»
«Comment peut-on défendre de manière crédible la poursuite très nécessaire des crimes russes contre l’humanité lorsque l’on ne balaye pas devant sa propre porte ? Il ne s’agit pas de l’institution de La Haye, mais de prévenir la Commission de crimes qui concernent toute l’humanité.» (1)
«Le choix laissé à la communauté internationale : la force de la légalité internationale ou la force comme droit.» Cette citation se passe de commentaires et elle est livrée telle quelle à la lectrice et au lecteur. Est clair, le choix qu’ont les dirigeants des grandes puissances, qui soufflent le chaud et le froid et prétendent vouloir un monde sans oppression et sans guerre, fondé sur la légalité internationale, acceptée de toutes les entités politiques mondiales, des Etats aux institutions internationales et intergouvernementales. Soit accepter les propres règles de jeu qu’ils énoncent dans leurs déclarations publiques, soit ne reconnaître que les rapports de force excluant tout appel à ces règles morales, ou à ces principes et les traités internationaux s’y référant directement, fondés sur des valeurs universellement reconnues, dont la plus importante est la valeur de la vie humaine.
Pourquoi pas Auschwitz Night Club pour enfants des nantis ?
L’attaque contre La Cour pénale internationale a coïncidé avec le projet annoncé de vider Gaza de sa population palestinienne et d’ouvrir, à leur place, la porte à une population en provenance d’autres parties du monde, dans le cadre d’une projet de création d’une sorte de Riviera, de grand parc d’attraction destiné aux plus fortunés des habitants de la planète, un mélange de «Tanger d’entant», de «Disney World» et de station balnéaire à la mode caribéenne.
Ce projet de «reconstruction» ne représente rien d’autre que la phase finale du génocide ; après l’extermination physique et la destruction du cadre de vie du peuple palestinien, par des opérations militaires n’épargnant rien ni personne, il s’agit maintenant d’en finir avec les survivants et de débarrasser le territoire de leur présence.
L’objectif visé n’est évidemment pas de mieux valoriser ce territoire , ce qui peut être fait sans avoir à expulser sa population actuelle, mais en mettant en place un plan financé par les «casseurs occupants» que sont les sionistes, et c’est ce que prévoit la quatrième Convention de Genève, de reconstruction et de redéveloppement de ce territoire, prenant en compte le bien-être de cette population actuelle.
Il s’agit tout simplement d’achever le génocide du peuple palestinien, noyau central du projet sioniste, et rien d’autre.
«Il n’y a pas d’Auschwitz à Gaza, mais c’est toujours un génocide»
L’accusation «d’antisémitisme» fuse quasi instinctivement dans certains milieux «bien-pensants», défenseurs en état de mobilisation permanente dans la «défense de la démocratie et des droits de l’Homme», à travers l’univers entier. Mais, dès lors que la violation des plus élémentaires des droits humains commis sur le territoire de la Palestine historique par «l’Etat juif d’Israël», ils sortent immédiatement le carton rouge du «rappel de l’holocauste et de l’antisémitisme». Comment vont-ils réagir à une contribution écrite par des professeurs juifs accusant l’entité sioniste de crime délibéré de génocide à Gaza, contribution publiée non sur une «feuille de chou antisémite», mais sur un quotidien israélien ?
A titre de complément à l’analyse présenté dans la contribution actuel, on donne, pour que chaque lectrice et lecteur puisse en juger par eux-mêmes et sur la base de l’écrit originel, sans tentative de diluer son contenu dans un commentaire d’appropriation par le rédacteur du présent texte.
Les professeurs Daniel Blatman et Amos Goldberg sont des historiens de l’holocauste à l’Université hébraïque de Jérusalem, les auteurs de ce texte ont décidé d’évoquer Auschwitz dans le titre qu’ils ont donné et de faire référence au sort des Rohingyas.
Voici la traduction de ce document qui est paru dans Haaretz, le 20 janvier 2025.
«Les déclarations des responsables du Myanmar sur l’intention du Myanmar d’exterminer les Rohingyas sont faibles et accessoires par rapport au flot de déclarations génocidaires entendues dans tous les couloirs de la politique, de la société, des médias et de l’armée en Israël, exprimant une déshumanisation extrême des Palestiniens et un désir de leur extermination généralisée. Le génocide est toute action qui conduit à la destruction de la capacité d’existence d’un collectif, pas nécessairement à son anéantissement total. On estime que près de 47 000 personnes ont été tuées à Gaza et plus de 110 000 blessées. Le nombre de ceux enterrés sous les décombres ne sera peut-être jamais connu. La grande majorité des victimes sont des non-combattants. Selon les Nations unies, 90% de la population de Gaza a été déplacée de chez elle à plusieurs reprises et vit dans des conditions inhumaines qui ne font qu’augmenter les niveaux de mortalité. Le meurtre d’enfants, la famine, la destruction des infrastructures, y compris celle du système de soins de santé, la destruction de la plupart des maisons, y compris l’effacement de quartiers et de villes entiers, tels que Jabalya et Rafah, le nettoyage ethnique dans la bande nord, la destruction de toutes les universités de Gaza et de la plupart des institutions culturelles et mosquées, la destruction des infrastructures gouvernementales et organisationnelles, les fosses communes, la destruction des infrastructures pour la production alimentaire locale et la distribution de l’eau – tout cela brosse un tableau clair du génocide. Gaza, en tant qu’entité humaine et collective nationale, n’existe plus. C’est exactement ce à quoi ressemble le génocide.»
En conclusion
Quelle que soit la rhétorique employée pour justifier et humaniser cette opération de nettoyage ethnique, il n’en reste pas moins qu’elle confirme le projet génocidaire sioniste, qu’elle justifie le mandat d’arrêt international contre les dirigeants sionistes et qu’elle constitue une rupture avec l’ordre mondial fondé sur le respect de la dignité humaine, basé sur la multitude de «lois humanitaires» adoptées à la suite de la tragédie de la Seconde Guerre mondiale, et qu’elle ouvre la voie à un ordre mondial brutal où les rapports de force sont la seule loi acceptée.
Le projet de vider Gaza de sa population palestinienne, sous occupation armée cruelle et inhumaine depuis 1967, et d’y construire un centre de loisirs pour riches est aussi horrible que de transformer les camps de la mort nazis, y compris le plus infâme d’entre eux, en dancings pour jeunes de la nomenklatura occidentale !
Finalement, et comme l’a affirmé un rapport rédigé par un groupe de juristes internationaux et financé respectivement par les ministères des Affaires étrangères des Pays-Bas et de la Norvège, Israël, en tant que puissante occupante, de l’avis même de sa Cour suprême, comme du département d’Etat américain, porte la responsabilité totale de la reconstruction de Gaza et de l’indemnisation des particuliers qui ont subi des dommages, sous quelque forme que ce soit de la part de ses «forces de défense».
Voici ce que dit, entre autres, ce rapport intitulé «Le statut légal de Gaza» et visant directement Israël : «Les obligations internationales comprennent à la fois des obligations conventionnelles et non conventionnelles. Une violation d’une obligation internationale a souvent été assimilée à une conduite contraire aux droits d’autrui. Lorsqu’un Etat a commis un fait internationalement illicite, il est tenu de réparer intégralement le préjudice. Un Etat est responsable de tous les actes commis par ses forces armées, ainsi que de tous les actes commis dans les territoires placés sous son contrôle effectif. Dans la mesure où une puissance occupante ne remplit pas ses obligations en vertu du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’Homme, elle devrait être tenue responsable de réparer la violation de ses obligations envers la population occupée. Le bénéficiaire de la réparation peut être non seulement l’Etat occupé, mais aussi des personnes privées ; dans ce cas, les personnes protégées envers lesquelles des obligations étaient dues. Cela est particulièrement vrai lorsque ces personnes ne sont pas représentées par un Etat qui a qualité pour agir et peut faire valoir leurs droits dans les instances internationales.»
Il est hautement regrettable que les Etats arabes aient décidé de passer sous silence la responsabilité morale, mais plus spécifiquement matérielle et financière d’Israël dans la reconstruction de Gaza, alors que la loi internationale établit très clairement qu’en tant que puissante occupante et agresseur, c’est cette entité qui doit payer tout ce qu’elle a cassé sur le territoire martyr de Gaza, et indemniser chacun des habitants de ce territoire ayant subi des préjudices du fait de cette campagne génocidaire.
M. B.
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