Kharkiv en ligne de mire
Depuis Harbin en Chine, où il se trouve en visite d’Etat, Vladimir Poutine a déclaré, lors d’une conférence de presse, que l’avancée vers Kharkov – ou Kharkiv comme l’appellent les Ukrainiens – de l’armée russe n’était pas destinée à s’en emparer, du moins tel n’était pas le but du moment. On relevait l’autre jour le […]
Depuis Harbin en Chine, où il se trouve en visite d’Etat, Vladimir Poutine a déclaré, lors d’une conférence de presse, que l’avancée vers Kharkov – ou Kharkiv comme l’appellent les Ukrainiens – de l’armée russe n’était pas destinée à s’en emparer, du moins tel n’était pas le but du moment. On relevait l’autre jour le silence qu’observaient les Russes sur leurs véritables intentions par rapport à leur offensive actuelle au nord-est, non loin de la frontière avec l’Ukraine. Visaient-ils à prendre Kharkiv, sachant que c’est dans sa direction qu’ils progressent désormais chaque jour, et à un rythme qui même s’il reste modéré dans l’absolu n’est tout de même pas celui auquel cette guerre a été conduite jusqu’à présent, ou à seulement s’en approcher, leur objectif étant la mise en place d’une zone tampon à des fins purement défensives ? Nous voilà fixés sur ce point, mais pour l’heure seulement. On peut dire que le président russe a laissé en cette matière les Ukrainiens maîtres de la décision. S’ils veulent que ses forces ne prennent pas Kharkiv, qu’ils arrêtent d’attaquer Belgorod, sur quoi ils envoient périodiquement des nuées tantôt de bombes tantôt de drones. On le voit, c’est une sorte de marché que Moscou propose à Kiev, à charge pour ce dernier de l’accepter tel quel, ou alors d’assumer les conséquences d’un refus, c’est-à-dire la perte de Kharkiv, la deuxième grande ville d’Ukraine, que les Russes avaient prise au début de la guerre.
Les termes en sont inacceptables pour Kiev dans un cas comme dans l’autre. En effet, cela revient à ne lui laisser Kharkiv que contre une portion de territoire qui elle en revanche ne devra pas échapper au contrôle russe, étant destinée à garantir Belgorod des attaques, et autres incursions, fomentées par Kiev. De sorte que l’on peut dire que Poutine n’est disposé à stopper l’offensive sur Kharkiv qu’en vue d’elle et qu’au prix d’une compensation substantielle. On ne risque pas de se tromper en affirmant que ce n’est pas ce qui va se passer. Un Etat dont une partie du territoire est occupée par son voisin a pour devoir de tout faire pour la libérer. C’est ce que tentera l’Ukraine, mais qu’elle ne pourra pas réussir, car pour elle la guerre est déjà perdue. Celle-ci peut ne pas l’être encore si les alliés occidentaux sont décidés à intervenir directement dans le conflit. Or personne en Occident n’est dans cette disposition. Pas même la France, dont pourtant le président a fait savoir qu’il envisagerait l’envoi de troupes si les lignes de défenses ukrainiennes étaient percées et que Kiev lui en fasse la demande. Quand on s’exprime d’une façon aussi entortillée, c’est qu’on n’a pas envie d’être pris au mot. Emmanuel Macron en effet n’a pas dit qu’il enverrait des soldats dès lors que les lignes de défenses ukrainiennes sont enfoncées, ce qui déjà est quasiment le cas notons-le, et que Kiev appelle à l’aide, mais qu’une fois ces deux conditions remplies, il se mettrait à réfléchir sur ce qu’il lui faudrait faire. Quelqu’un qui dès le départ se réserve le droit de dire non y compris quand il devrait dire oui n’est pas à prendre au sérieux. D’ailleurs personne ne l’a pris au sérieux, ni les Russes, ni les Ukrainiens, ni les Européens, et encore moins les Américains, pour qui ce genre de questions relèvent d’eux exclusivement.
Quelle est votre réaction ?