Un ex partisan de l’OAS présidera ce jeudi l’ouverture de la 17e législature en France
Voulue par Emmanuel Macron comme un ‘’temps de clarification indispensable’’ du jeu politique, la dissolution de l’Assemblée nationale au soir du cuisant échec de la majorité présidentielle aux élections européennes a installé la France, un mois durant, dans la peur d’un gouvernement dirigé par le Rassemblement national. Remake presque à l’identique de la présidentielle de […] The post Un ex partisan de l’OAS présidera ce jeudi l’ouverture de la 17e législature en France appeared first on Le Jeune Indépendant.
Voulue par Emmanuel Macron comme un ‘’temps de clarification indispensable’’ du jeu politique, la dissolution de l’Assemblée nationale au soir du cuisant échec de la majorité présidentielle aux élections européennes a installé la France, un mois durant, dans la peur d’un gouvernement dirigé par le Rassemblement national. Remake presque à l’identique de la présidentielle de 2002, l’extrême droite a été empêchée d’accéder aux leviers du pouvoir grâce à une mobilisation d’un front républicain et grâce au report des voix.
Si Jordan Bardella a vu, la mort dans l’âme, son rêve pour Matignon s’envoler le 7 juillet à 20h et si son parti a été relégué à la troisième place en nombre de sièges, la mouvance des Le Pen n’a pas pour autant perdu une prérogative. Temporaire celle-là, elle est dénuée de pouvoir et d’effet sur le travail du législateur. Mais d’un point de vue symbolique et médiatique, elle n’en constitue pas moins une vitrine.
Il s’agit, ‘’honneur’’ somme toute protocolaire’’, de la présidence de la séance solennelle d’ouverture de la 17e législature de la Ve République. En vertu d’une disposition du règlement du Palais-Bourbon, c’est le ‘’doyen d’âge’’ de l’Assemblée qui ouvrira la législature et prononcera le discours d’ouverture. Et c’est lui qui, en compagnie du benjamin, officiera la première séance dédiée à l’élection du président ou de la présidente de l’Assemblée nationale.
Caprices des suffrages et de l’âge, le doyen des députés élus répond au nom de José Gonzalez, 81 ans, alors que le benjamin, Flavien Termet, 22 ans, est majeur depuis quatre ans. L’un et l’autre sont encartés RN. A l’ouverture de la session à 15h, le réalisateur de La Chaîne Parlementaire – pourvoyeuse des TV de France et du monde en images – n’aura d’yeux que pour le premier.
Au moyen de ‘’gros plans’’ répétés, le réalisateur donnera à voir et à revoir un doyen qui, aux yeux du grand public, n’est qu’un député mais qui, au miroir de l’histoire, est un ‘’ex’’ au passé ‘’nostAlgérique’’. Un homme qui, depuis 1962, n’en finit pas de faire rejouer les prolongations mémorielles au plus sanglant des conflits de décolonisation et de souffler sur les ‘’feux mal éteints de la guerre d’Algérie’’, pour reprendre une formule du journaliste et écrivain Philippe Labro.
Député sortant, José Gonzalez a été réélu dans la 10ᵉ circonscription des Bouches-du-Rhône (14 kms de Marseille). Il a glané au deuxième tour 55,66% des voix face à une candidate de l’ex-majorité présidentielle. Encarté depuis 46 ans, il a commencé à militer dans les rangs de cette mouvance au temps du Front national et de son fondateur Jean-Marie Le Pen.
Né le 28 avril 1943 à Oran, José Gonzalez est arrivé à Marseille en 1962. A l’instar d’une majorité de pieds noirs et de rapatriés, il s’est longtemps cherché sur le terrain professionnel. En 1962, il a commencé par travailler au port de Marseille à la bourse des primeurs avant de diriger une auto-école et finir par rejoindre la Chambre de commerce de Marseille-Provence jusqu’à sa retraite. En 1978, il a adhéré au Front national, poussé en cela par les idées qui n’en finissaient pas de le travailler depuis sa jeunesse ‘’algérienne’’.
En franchissant la porte de la section phocéenne du parti de Le Pen, José Gonzalez se demandait ‘’si, en France, nous n’allions pas subir la même chose qu’en Algérie avec des populations qui nous poussent dehors’’. Ce bref verbatim figure dans « Le Pen et la torture. Algérie 1957, l’histoire contre l’oubli », un livre publié fin 2023 par l’historien Fabrice Riceputi (voir Le Jeune Indépendant du 04 avril 2024). Avant de quitter l’Algérie sur fond de ‘’politique de la terre brûlée’’ pratiquée par l’OAS, José Gonzalez, rappelle l’historien, a ‘’milité notamment en compagnie de Jean-Jacques Susini’’, ex-numéro deux de l’organisation terroriste, condamné à mort par contumace par la Cour de sureté de l’Etat pour appartenance à l’organisation et comme inspirateur de l’attentat manqué contre le général de Gaulle en août 1962 au Petit-Clamart (banlieue de Paris). Jean-Jacques Suséni a été amnistié par la suite.
En enquêtant tous azimuts, en rassemblant des documents et en glanant des témoignages pour les besoins de son livre, Fabrice Riceputi a rencontré un compte-rendu de presse très circonstancié et signé Le Monde. Daté du 29 juin 2022, l’article rappelle une scène qui, tel un remake, va se rejouer cet après-midi de jeudi 18 juillet dans l’Hémicycle.
Au lendemain des législatives de 2022, organisée dans le sillage de la réélection de Macron, José Gonzalez n’avait que 78 ans et il était déjà le doyen de l’Assemblée. Qualité de senior oblige, il a présidé la séance inaugurale de la 16e législature et prononce un discours.
Contre toute attente, il a convoqué l’épisode de la fin de la guerre d’Algérie et émaillé son speech de mots et de formules très ‘’nostAlgériques’’. A un certain moment, tel un orateur des planches, il a feint l’émotion. « Excusez-moi, je pense à mes amis laissés là-bas… ». Et le doyen d’enchaîner, cité par l’envoyée spéciale du Monde au Palais-Bourbon : « J’ai laissé là-bas une partie de ma France. Je suis un homme qui a vu son âme à jamais meurtrie par le sentiment d’abandon ». Gonzalez qui, dans l’histoire parlementaire de France, restera comme l’homme par qui la 16e législature a commencé s’est présenté comme un quelqu’un « arraché à sa terre natale par le vent de l’histoire ».
Depuis le perchoir du Palais-Bourbon et devant une Assemblée réunie ‘’au grand complet’’, rappelle Fabrice Ricéputi dans son livre, Gonzalez prononce ‘’un discours larmoyant de nostalgie de l’Algérie française perdue, c’est-à-dire à ses yeux « abandonnée».
Un ‘’beau coup, qui lui vaudra les félicitations de Jean-Marie Le Pen en personne’’. Cela s’est passé précisément à une semaine du soixantième anniversaire de l’indépendance de l’Algérie ‘’qui mortifia l’extrême droite française’’. Scène qui n’a pas échappé à la journaliste du Monde et, dans son sillage, à la curiosité de l’historien, le doyen des députés a été ‘’applaudi à tout rompre, bien au-delà des bancs de l’extrême droite’’.
Selon la journaliste du Monde accréditée auprès de l’Assemblée, Marine Le Pen, présidente du groupe RN lors de la 16e législature (89 députés), a relu en amont le discours de José Gonzalez et validé sa teneur.
Au sortir de la séance inaugurale et l’élection de la présidente de l’Assemblée, José Gonzalez s’est retrouvé, scène inespérée pour lui, face à une foule de journalistes, de cameramen et de photographes. Lesquels sont venus à la rencontre non pas du doyen qui a donné le coup de starter à la 16e législature, mais au député qui, profitant du perchoir, a rejoué la guerre d’Algérie et s’est ému pour la ‘’terre perdue’’.
Entre autres questions posées, une concernant la politique de l’OAS et ses crimes, particulièrement dans sa ville natale Oran. Réponse instantanée citée dans Le Monde et reprise dans le livre de Fabrice Réciputi : « (…) peut-être que maintenant il faudra revoir l’histoire, mais je ne pense pas. Franchement, je ne suis pas là pour juger si l’OAS a commis des crimes. Je ne sais même pas ce qu’était l’OAS, ou presque pas », dit-il en usant d’un négationnisme qui est la marque de fabrique de l’extrême droite du FN au RN. « Venez avec moi en Algérie, je vais vous trouver beaucoup d’Algériens qui vont vous dire : “quand est-ce que vous revenez, les Français ?” »
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