Victor Orban en éclaireur à Moscou : Changement de paradigme et pressions sur l’Ukraine
Celui qui préside pour les prochains six mois l’Union européenne a brisé un tabou. Avec sa visite en Russie, Victor Orban se pose en leader réaliste qui ne veut pas rester prisonnier du carcan idéologico-stratégique de l’Occident intégral. Ce dernier qui a, bien avant le début de l’opération spéciale russe en Ukraine, le 24 février […] The post Victor Orban en éclaireur à Moscou : Changement de paradigme et pressions sur l’Ukraine appeared first on Le Jeune Indépendant.
Celui qui préside pour les prochains six mois l’Union européenne a brisé un tabou. Avec sa visite en Russie, Victor Orban se pose en leader réaliste qui ne veut pas rester prisonnier du carcan idéologico-stratégique de l’Occident intégral.
Ce dernier qui a, bien avant le début de l’opération spéciale russe en Ukraine, le 24 février 2022, construit son argumentaire sur l’exacerbation de la russophobie, tente depuis, en vain, de couper tout lien entre l’Europe et la Russie, et pire, isoler celle-ci sur la scène internationale. Le déplacement moscovite d’Orban bouscule ce postulat et conforte la position centrale de Moscou dans toute issue de la crise ukrainienne.
En effet, Budapest qui depuis le début de cette crise a pris ses distances avec les décisions euro-atlantistes concernant la Russie, confirme, cette fois-ci, sa volonté d’être un liant, une tête de pont entre Bruxelles et Moscou. Quatre jours seulement après le début de sa présidence de l’UE, le Premier ministre hongrois s’est déplacé, le 05 juillet, à Moscou. Cependant, Victor Orban se veut pragmatique. « Les positions sont très éloignées », a-t-il affirmé aux journalistes, soulignant néanmoins qu’un « pas important » avait été franchi et qu’il poursuivrait ses efforts dans sa tentative de médiation dans la crise ukrainienne. « Nous avons eu une conversation franche et utile », a déclaré de son côté, Vladimir Poutine, le président russe.
Ainsi, Vladimir Poutine confirme que lui-même et son invité hongrois ont échangé en toute franchise autour de la question ukrainienne. Il faut dire que les deux hommes se connaissent bien. Victor Orban est qualifié de très proche du chef du Kremlin puisqu’il s’agit de son cinquième séjour à Moscou depuis le début de la guerre en février 2022. Mieux, la Hongrie est le seul pays de l’UE à commercer avec la Russie en monnaie nationale, soit l’euro et le rouble, résistant ainsi à toutes les pressions de Bruxelles et de Washington visant à déconnecter la Hongrie de la Russie.
La condamnation de cette visite à Moscou n’a pas tardé, côté européen. Sur le réseau social X, les chefs de gouvernement ont dénoncé un geste « irresponsable et déloyal », comme l’a écrit le premier ministre suédois, Ulf Kristersson. Son homologue estonienne, Kaja Kallas, a jugé que Victor Orban « exploite la position de la présidence de l’UE pour semer la confusion. L’UE est unie, clairement derrière l’Ukraine et contre l’agression russe ». « Le Conseil européen est représenté en politique étrangère par [le président du Conseil européen] Charles Michel, a pour sa part souligné le chancelier allemand, Olaf Scholz. La position de l’UE est très claire : nous condamnons la guerre d’agression russe. L’Ukraine peut compter sur notre soutien ». Seul Jens Stoltenberg, le secrétaire général de l’OTAN, a confirmé avoir été tenu au courant.
Une question de fond : Orban agit-il en roue libre ou sert-il de courroie de transmission entre l’UE et l’Otan d’un côté et la Russie de l’autre ? Déjà, la Slovaquie soutient la démarche de son voisin hongrois. « Je tiens à exprimer mon admiration pour le Premier ministre hongrois, qui n’a pas hésité et s’est rendu à Kiev et à Moscou. Je serais heureux de le rejoindre si j’étais en bonne santé. Il n’y aura jamais trop de négociations de paix », a déclaré Robert Fico lors de sa première apparition en public après avoir échappé de justesse d’une tentative d’assassinat, il y a quelques semaines.
Nous remarquons une fissure dans le bloc européen concernant la Russie : celui des irréductibles anti-russes composés des pays baltes, des pays scandinaves, de l’Allemagne et de la Pologne. Celui des pays ouverts aux négociations avec la Russie, notamment la Hongrie, la Slovaquie auxquels se joint la Serbie, pays hors UE, et enfin le reste des pays de l’UE qui peuvent balancer vers le deuxième camp au gré de leurs intérêts. L’idée donc que Victor Orban ai agi en éclaireur n’est pas tout à fait à exclure.
Reste les Etats-Unis. La Maison Blanche s’est dite « préoccupée par le choix du premier ministre Orban de faire ce voyage à Moscou », selon sa porte-parole, Karine Jean-Pierre. Ce déplacement « ne fera pas avancer la cause de la paix et il est contre-productif pour le soutien à la souveraineté, à l’intégrité territoriale et à l’indépendance de l’Ukraine », a-t-elle ajouté.
Mais l’analyse des positions sur le terrain infirme les déclarations américaines. La débâcle ukrainienne est on ne peut plus visible. Lundi dernier, l’armée russe a frappé des installations militaro-industrielles et des bases aériennes ukrainiennes en réponse aux tentatives visant à endommager les installations énergétiques et économiques russes, indique la Défense russe.
« Les frappes russes sont réalisées sur des infrastructures critiques, sur des cibles militaires », a insisté mardi dernier le porte-parole du Kremlin, interrogé au sujet d’une frappe ayant touché la veille l’hôpital pour enfants à Kiev. Dmitri Peskov a également appelé à se référer uniquement aux informations communiquées par le ministère russe de la Défense. Ce dernier exclut en effet que quelque frappe que ce soit ait touché un site civil, dans ce qui s’apparente à une fake news produite par le régime de Zelensky.
Et comble de l’ironie, avant même que la tempête soulevée par l’Occident intégral à propos de la visite d’Orban à Moscou ne se calme, voilà que c’est au tour du Premier ministre indien de faire le même déplacement. Récemment réélu à la tête de son pays, Narandra Modi a déclaré devant son hôte russe « qu’aucune solution au conflit ne peut être trouvée sur le champ de bataille ». Le communiqué commun sanctionnant sa visite est clair : « La Russie et l’Inde insistent sur la nécessité de parvenir à un règlement pacifique du conflit en Ukraine via le dialogue et la diplomatie ».
Ce sont les vertus du dialogue et de la diplomatie justement que la Russie n’a cessez de mettre en avant depuis 2014. L’Occident intégral n’a pas daigné écouter les appels de Moscou. Aujourd’hui, ce même Occident se retrouve obliger de revenir à la table des négociations, tant la capacité de ses armes à changer la donne stratégique en Ukraine est quasiment nulle, mais aussi, parce que les lignes tectoniques ont bougé à la défaveur du bloc euro-atlantiste.
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