Comme en avril, mais pas à la veille de la même attaque

S’il est vrai que le Moyen-Orient est aujourd’hui comme il était en avril dernier, dans l’attente d’une attaque iranienne, on ne peut dire qu’il y règne exactement la même atmosphère. Celle d’aujourd’hui est bien plus chargée de poudre ; dès à présent elle est difficilement respirable. En avril, les Iraniens semblaient n’avoir en vue qu’une […]

Aou 6, 2024 - 21:20
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Comme  en avril, mais pas à la veille de la même attaque

S’il est vrai que le Moyen-Orient est aujourd’hui comme il était en avril dernier, dans l’attente d’une attaque iranienne, on ne peut dire qu’il y règne exactement la même atmosphère. Celle d’aujourd’hui est bien plus chargée de poudre ; dès à présent elle est difficilement respirable. En avril, les Iraniens semblaient n’avoir en vue qu’une attaque limitée, autant dire une attaque pour la forme, pour qu’il ne soit pas dit plus tard qu’il n’avait pas réagi à une agression israélienne différente des précédentes, qu’il avait laissées elles sans réponses, et qui d’ailleurs sont relativement nombreuses. Ce n’est pas ainsi que s’annonce celle contre laquelle se mobilisent en premier lieu les Américains, qui pour la contrer ont renforcé leur présence dans les eaux du Golfe et en mer Rouge, pour qui toutefois elle ne pourrait différer de celle d’avril qu’en degré seulement. Si en avril les Iraniens et leurs alliés ont lancé quelque 300 projectiles et drones sur Israël, ce nombre serait vraisemblablement plus grand, voilà toute la différence ont-ils l’air de penser. Et surtout, l’attaque serait un acte unique.

En avril dernier, en effet, les missiles n’étaient pas encore tombés sur Israël que les Iraniens faisaient savoir que leur riposte avait été faite, qu’il n’y en aurait pas une autre si l’ennemi ne contre-attaquait pas. Alors Américains et Iraniens se parlaient encore par intermédiaires interposés, la Jordanie au premier chef. Certes, cette fois aussi, le président américain et le roi Abdallah se sont parlé ; et auparavant, le ministre jordanien des Affaires étrangères se trouvait à Téhéran. Comme en avril, les Américains tentent de désamorcer la crise, à la fois par des appels au calme et par une démonstration de force dans la région destinée à dissuader les Iraniens. Aujourd’hui, rien ne dit que l’attaque sera unique. Elle le serait peut-être si elle faisait suffisamment mal à Israël pour que l’Iran estime avoir vengé Ismaël Haniyeh, avoir donné à l’agresseur une leçon qu’il ne serait pas près d’oublier. Et encore, il faudrait aussi qu’Israël ne réponde pas, ou le fasse comme avril, c’est-à-dire en s’arrangeant pour tirer à côté. A l’évidence, l’Iran ne veut pas d’une attaque pour la forme, mais pour punir réellement Israël, l’instrument des Etats-Unis. Et puis, quelque chose s’est produit en ce mois d’août qu’on n’aurait pas cru possible en avril : la présence d’une personnalité russe, Sergueï Choïgou, le secrétaire du Conseil de sécurité de la Fédération de Russie, à Téhéran, à ce qu’il semble sur invitation de ses hôtes iraniens. Si Choïgou s’est inscrit dans le décor, c’est pour laisser entendre que la Russie se tiendrait aux côtés de l’Iran si celui-ci était attaqué à une grande échelle. Voilà déjà suffisamment d’indices montrant que si le Moyen-Orient est bien pour l’heure comme à la veille de l’attaque iranienne en avril, le fait est qu’il n’est pas à la veille de la même attaque. Cette dernière selon toute apparence ne serait pas unique, ce qui déjà change la perspective. On se doutait un peu que la guerre commencée le 7 octobre de l’année dernière ne resterait pas indéfiniment confinée dans Ghaza et au sud Liban, mais qu’elle s’étendrait plus loin et qu’elle attirerait dans son cercle de feu d’autres protagonistes, serait-ce par le jeu traditionnel des alliances. Israël aurait pu l’arrêter s’il avait écouté les conseils de ses alliés américains, mais son gouvernement d’extrémistes ne voulait en faire qu’à sa tête. Mais il ne les a pas écoutés, et maintenant c’est une autre guerre qui se prépare contre lui.

 

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