La France menacée d’une crise politique
Apeine évoquée, l’hypothèse d’un gouvernement technique en France en lieu et place d’un gouvernement démissionnaire qui depuis bientôt deux mois expédie les affaires courantes, une exception dans ce pays, est écartée sans appel par l’opposition au macronisme, c’est-à-dire tant par le front de gauche que par l’extrême droite, il est vrai de façon bien plus […]
Apeine évoquée, l’hypothèse d’un gouvernement technique en France en lieu et place d’un gouvernement démissionnaire qui depuis bientôt deux mois expédie les affaires courantes, une exception dans ce pays, est écartée sans appel par l’opposition au macronisme, c’est-à-dire tant par le front de gauche que par l’extrême droite, il est vrai de façon bien plus univoque par le premier que par le second. Il faut dire que sur cette question, c’est l’union de la gauche qui mène les débats, légitimement d’ailleurs puisqu’elle est le camp ayant remporté le plus grand nombre de sièges aux législatives anticipées. Cela dit, il serait suicidaire pour le Rassemblement national de ne pas censurer le moment venu un gouvernement technique, quelle que soit la personnalité choisie par Emmanuel Macron pour le conduire, alors que la gauche l’aura fait elle, et sans hésitation. L’échec de Macron et du macronisme à ces législatives en fait un bord infréquentable aux yeux des forces encore confiantes en leur avenir.
Un gouvernement technique étant bien évidemment un gouvernement de cohabitation de Macron avec lui-même, on voit mal qui en dehors de ce qu’on appelle le bloc central, ainsi désigné surtout pour le distinguer des forces se situant à sa droite et à sa gauche, c’est-à-dire une reconduction des perdants, serait assez fou pour lui apporter son soutien, sans du même coup se condamner aux yeux des électeurs dans la perspective des élections à venir. Le RN s’est engagé à censurer un gouvernement conduit par Lucie Castets, la candidate du Nouveau front populaire au poste de Premier ministre, dans la minute d’après. Il sera obligé de montrer la même disposition face à un gouvernement technique, quand bien même il existerait en son sein des tendances pour qui l’ennemi principal n’est pas le président Macron mais le NFP. Ainsi donc, un gouvernement du centre n’est pas possible, on peut en dire autant pour celui de gauche, et encore la même chose pour un gouvernement qui ne serait ni de droite ni de gauche, pour la bonne raison que ce « ni-ni » est en fait un oui implicite au camp toujours au pouvoir bien qu’il ait perdu les élections, et dont, entre autres caractéristiques, le chef est fermement décidé à ne pas s’en aller. Si aucun gouvernement n’est possible, peut-on du moins garder celui qui est démissionnaire ? Et dans ce cas pour une année, l’intervalle de temps au cours duquel le président ne peut pas dissoudre ? Techniquement la chose est concevable, politiquement non, car ce gouvernement n’en reste pas moins censurable, renversable, pour démissionnaire qu’il soit. Il le sera d’autant plus sûrement que l’Assemblée dans cette hypothèse n’a pas à craindre une dissolution. En France, l’impasse institutionnelle est totale. Nulle issue ne se présente qui ne soit aussitôt exclue. Néanmoins cette impasse ne s’est pas encore transformée en crise politique. Ce sera le cas quand la rue s’en sera mêlée. La règle c’est que la crise politique éclate au sommet de l’Etat, avant de s’emparer de la société dans un deuxième temps. Quelles formes précises prendra-t-elle en l’espèce ? Difficile à dire par avance. Mais c’est désormais au jour le jour qu’il faudra suivre ses développements en France. Car tous ses ingrédients sont là qui attendent seulement d’être mis en mouvement. M. H.
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