Neutralité

Que ce soit lors des élections présidentielles de 2016 ou de 2020, une accablante majorité de la presse américaine avait ouvertement soutenu les candidats démocrates, mettant en avant la «dangerosité» du candidat républicain. Une partialité qui loin de l’affaiblir, n’a fait que convaincre et renforcer sa base de partisans. Toutefois, à la surprise générale, le […]

Oct 26, 2024 - 21:04
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Neutralité

Que ce soit lors des élections présidentielles de 2016 ou de 2020, une accablante majorité de la presse américaine avait ouvertement soutenu les candidats démocrates, mettant en avant la «dangerosité» du candidat républicain. Une partialité qui loin de l’affaiblir, n’a fait que convaincre et renforcer sa base de partisans. Toutefois, à la surprise générale, le prestigieux Washington Post a annoncé par la voix de son directeur général cette semaine qu’il ne soutiendra aucun candidat à l’élection du 5 novembre prochain, une première depuis 1960 et le duel Kennedy et Nixon. William Lewis, le DG, a fait savoir que le célèbre journal, connu pour avoir révélé le Watergate, s’abstiendrait aussi d’appeler à voter pour un ou une candidate lors des scrutins futurs, dans un billet en ligne qui suscitait de nombreuses réactions, pour la plupart indignées, de lecteurs. «Nous sommes conscients que cette décision donnera lieu à de nombreuses interprétations, qu’elle sera vue comme un soutien implicite à l’un des candidats, ou au rejet d’un autre, ou comme une fuite devant nos responsabilités», écrit le directeur général, alors que les sondages ne parviennent pas jusqu’ici à départager la vice-présidente démocrate Kamala Harris et l’ancien président républicain Donald Trump. Le syndicat des journalistes du Washington Post s’est dit «très préoccupé» par cette décision, «à 11 jours à peine d’une élection aux enjeux immenses», et s’inquiète d’une «ingérence» dans les décisions du comité éditorial. «Selon nos journalistes et membres, un soutien à Harris avait déjà été rédigé, et le propriétaire du Post, Jeff Bezos, a pris la décision de ne pas le publier», poursuit l’organisation dans un communiqué publié sur X. Le grand quotidien américain, propriété du fondateur d’Amazon depuis 2013, avait apporté son soutien aux candidats démocrates à la présidentielle en 2008, 2012, 2016 et 2020. Jeff Bezos a signé ces dernières années de gros contrats avec le gouvernement américain, et notamment avec le Pentagone, dans le domaine du stockage de données («cloud»). Le directeur général William Lewis a décrit la décision de vendredi comme un «retour aux sources», en faisant valoir que le Washington Post s’était par exemple abstenu d’appeler à voter pour l’un ou l’autre candidat en 1960, avant l’élection remportée par John F. Kennedy. «Notre travail, en tant que quotidien de la capitale du plus important pays du monde, est d’être indépendant. C’est ce que nous sommes et que nous serons toujours», conclut-il. Son billet a suscité une avalanche de commentaires furieux d’internautes, dont la plupart promettaient de résilier leurs abonnements. Cette décision du Washington Post vient après que le propriétaire d’un autre grand quotidien américain, le Los Angeles Times, a bloqué la décision du comité éditorial du journal, qui voulait apporter son soutien à Kamala Harris. Ces annonces successives interviennent dans une campagne qui a vu les grands noms de la presse américaine perdre de leur influence, auprès des électeurs comme des candidats eux-mêmes, dont l’attention se porte de plus en plus sur d’autres supports tels que les podcasts ou TikTok. La décision du Washington Post pourrait cependant ouvrir une nouvelle ère aux États-Unis et inspirer d’autres plus petites publications à ne pas céder aux sirènes du politiquement correct pour garder, autant que faire se peut, une ligne neutre et indépendante. F. M.

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