Brutalité de la colonisation française en Algérie : l’historien Alain Ruscio dévoile les horreurs oubliées
Dans une intervention poignante sur l’émission « À l’air libre » du quotidien français en ligne « Médiapart », l’historien Alain Ruscio dresse un tableau sans fard de la brutalité de la colonisation française en Algérie. De la spoliation des terres aux massacres systématiques, il rappelle que derrière la propagande d’un Eldorado fantasmé se cache […]

Dans une intervention poignante sur l’émission « À l’air libre » du quotidien français en ligne « Médiapart », l’historien Alain Ruscio dresse un tableau sans fard de la brutalité de la colonisation française en Algérie. De la spoliation des terres aux massacres systématiques, il rappelle que derrière la propagande d’un Eldorado fantasmé se cache une histoire de souffrance et de déshumanisation, tant pour les Algériens que pour certains colons, eux-mêmes pris dans un système d’exploitation dévastateur. À travers des vérités choquantes, Ruscio dénonce une guerre qui a défiguré un peuple et laissé des cicatrices profondes, trop souvent minimisées ou occultées dans la mémoire collective. En évoquant la période historique de la colonisation française, Ruscio a remis en lumière des faits souvent minimisés, voire oubliés, concernant les massacres, les spoliations de terres et les souffrances humaines qui ont marqué cette époque. Ruscio a d’abord abordé la façon dont la colonisation a été propagée en France. Selon lui, de nombreux colons ont été attirés par une propagande excessive qui leur promettait des terres fertiles et une vie meilleure en Algérie, une terre supposée offrir un Eldorado. Ce discours a conduit des milliers de Français à débarquer sur des terres qu’ils croyaient vierges, sans se rendre compte qu’elles étaient déjà habitées et cultivées par des paysans algériens. « Ces terres avaient été spoliées par l’État français », a expliqué l’historien. « Les paysans algériens, qui n’avaient pas de titre de propriété en raison de la culture locale, ont vu leurs terres leur être arrachées. » Ces derniers ont été expulsés de leurs foyers et ont souvent trouvé la mort en fuyant ou en travaillant dans des conditions de misère en tant qu’ouvriers agricoles.
Un massacre systématique des Algériens
Dans une analyse sans concession, Alain Ruscio a rappelé que la conquête de l’Algérie ne fut pas qu’une simple guerre, mais un massacre de grande envergure. Il a estimé à environ un demi-million le nombre d’Algériens tués pendant cette période, soit 10% de la population. Un chiffre qui, selon lui, reste souvent minimisé par les autorités françaises. Ces morts, expliquait-il, ne sont pas seulement dues aux combats, mais également aux fièvres, aux maladies comme le choléra, et surtout à la famine. Le colonel de Montagnac, un militaire français de l’époque, illustre bien l’ampleur de la violence systématique : « Tuer tous les hommes jusqu’à l’âge de 15 ans, prendre toutes les femmes et les enfants, en un mot, anéantir tout ce qui ne rempera pas à nos pieds comme des chiens », écrivait-il dans ses lettres, justifiant la décapitation comme un moyen de semer la terreur. Alain Ruscio a également évoqué les méthodes de guerre déployées par les troupes françaises, qui ne se limitaient pas aux affrontements militaires mais s’étendaient à des exactions quotidiennes. Il a cité des documents historiques dans lesquels des officiers français justifiaient le recours à la torture et à l’exécution de prisonniers de guerre. Ce climat de terreur, selon Ruscio, n’a jamais été véritablement remis en question par les autorités françaises pendant des décennies.
Le négationnisme et la régression historique
L’historien n’a pas manqué de souligner la régression historique qui s’est opérée en France depuis plusieurs années. Il a évoqué le phénomène du négationnisme, qui tend à minimiser ou à nier les crimes commis pendant la guerre d’Algérie. « Jean-Michel Apathie a dit les choses de manière abrupte, mais il a raison : aucun historien n’est venu contester le fond de son propos », a déclaré Ruscio, en référence à la déclaration polémique de l’éditorialiste qui a fait un parallèle entre la guerre d’Algérie et les crimes commis par les nazis. Cette comparaison, bien que choquante pour certains, trouve son écho dans les propos d’historiens qui, depuis des décennies, dénoncent la violence systématique de la colonisation. Ruscio rappelle que ce discours n’est pas nouveau, citant Hubert Beuve-Méry, le fondateur du « Monde », qui en 1957 écrivait que « les Français doivent savoir qu’ils n’ont plus le droit de condamner dans les mêmes termes qu’il y a 10 ans les destructeurs d’Oradour et les tortionnaires de la Gestapo », suggérant que l’histoire de la guerre d’Algérie devrait être perçue sous un autre jour.
Un appel à la reconnaissance et à la vérité historique
Au-delà de l’aspect scientifique de son analyse, Alain Ruscio appelle à une reconnaissance plus juste et plus complète des souffrances infligées aux Algériens durant la colonisation. Il insiste sur l’importance de comprendre l’histoire dans toute sa complexité, sans chercher à l’embellir ou à la minimiser, afin de réparer les injustices historiques et d’offrir une véritable réconciliation. Selon lui, l’histoire de l’Algérie coloniale ne doit pas être réduite à des « récits d’honneur » pour les colons, mais doit plutôt être comprise à travers le prisme des victimes, dont les souffrances sont encore trop souvent passées sous silence. L’intervention d’Alain Ruscio dans « À l’air libre » met en lumière la brutalité inouïe de la colonisation française en Algérie, un événement historique trop souvent minimisé ou falsifié. À travers son travail, l’historien invite la société française à une prise de conscience collective et à une réévaluation des faits, afin de ne pas oublier les millions de victimes oubliées d’une histoire coloniale qui a marqué à jamais le peuple algérien.
Meriem B.