Réconciliation
Recep Tayyip Erdogan, le président turc, issu de la droite nationaliste et islamiste dont il est toujours le plus grand porte-drapeau, avait sans surprise soutenu vigoureusement le premier président égyptien élu un an après la chute du président Moubarak en 2011. Mohamed Morsi, candidat issu des Frère Musulmans, n’avait toutefois pas réussi, malgré le soutien […]
Recep Tayyip Erdogan, le président turc, issu de la droite nationaliste et islamiste dont il est toujours le plus grand porte-drapeau, avait sans surprise soutenu vigoureusement le premier président égyptien élu un an après la chute du président Moubarak en 2011. Mohamed Morsi, candidat issu des Frère Musulmans, n’avait toutefois pas réussi, malgré le soutien d’Ankara, à garder sa place et avait rapidement, au bout d’une année à la tête du pays, été destitué par le général d’armée au grade de maréchal de l’armée égyptienne, Abdel Fattah al-Sissi. Un coup d’État suivi par des élections en mai 2014, il remporte
l’élection présidentielle avec 96 % des suffrages. Une situation contre laquelle Erdogan a été très vocal, dénonçant publiquement la prise de pouvoir de Sissi. Mais le président turc a finalement, comme cela lui arrive souvent, changé d’avis et fini par visiter en début d’année son homologue égyptien, mettant fin à la décennie de tensions entre les deux pays. Mi-février au Caire, Sissi et Erdogan avaient en effet acté l’ouverture d’une «nouvelle page» dans les relations entre leurs pays, brutalement rompues après l’arrivée au pouvoir du premier en 2013. Le président turc a accueilli à son tour, le 4 septembre à Ankara, son homologue égyptien Abdel Fattah al-Sissi, une visite inédite visant à oublier plus d’une décennie de querelles entre les deux nations méditerranéennes. Les deux hommes devraient signer cette semaine une série d’accords, a indiqué la présidence turque. L’arrivée en force au pouvoir de Sissi qui avait écarté et même emprisonné Mohamed Morsi, issu des Frères musulmans et grand allié de la Turquie, faisait alors jurer au président Erdogan qu’il ne parlerait «jamais» à quelqu’un comme «l’actuel président égyptien». Le président turc avait par la suite qualifié son homologue d’«assassin» et de «tueur de la démocratie». Mais les relations entre les deux hommes, qui soutiennent deux gouvernements rivaux en Libye, se sont réchauffées ces dernières années. Leurs intérêts convergent désormais sur plusieurs dossiers régionaux, dont celui de la guerre à Ghaza, qui avait été au cœur de leurs discussions au Caire. Sissi et Erdogan, dont les pays sont d’importants partenaires commerciaux, ont affirmé en février vouloir porter leurs échanges «à 15 milliards de dollars par an sous quelques années», et également vouloir intensifier leur coopération diplomatique au Moyen-Orient et en Afrique. Erdogan, qui a ces dernières années réussi méthodiquement à se mettre à dos de nombreux chefs d’État et de gouvernement, se retrouve obligé de tendre la main à ses «ennemis» pour ne pas finir totalement isolé. Reste à voir si cette nouvelle relation perdurera dans le temps, ou si le tempérament du président turc finira une fois encore par lui jouer des tours et à saboter cette tentative de réconciliation qui a mis plus de dix ans à se mettre en place.
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