19 Mars 1962 – 19 Mars 2025 : La diplomatie au service de la Révolution

Saad Dahleb, Mohamed Seddik Benyahia, Reda Malek, Belkacem Krim, Seghir Mostefai, Ahmed Boumendjel, Tayeb Boulahrouf, Lakdhar Bentobbal, M’hamed Yazid, Benmostefa Benaouda… Quelques noms parmi d’illustres personnalités, devenus par la force des choses et du destin national des diplomates aguerris, patriotes convaincus d’un idéal inébranlable, celle de la libération d’un peuple et d’un territoire de l’oppression […] The post 19 Mars 1962 – 19 Mars 2025 : La diplomatie au service de la Révolution appeared first on Le Jeune Indépendant.

Mars 19, 2025 - 03:12
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19 Mars 1962 – 19 Mars 2025 : La diplomatie au service de la Révolution

Saad Dahleb, Mohamed Seddik Benyahia, Reda Malek, Belkacem Krim, Seghir Mostefai, Ahmed Boumendjel, Tayeb Boulahrouf, Lakdhar Bentobbal, M’hamed Yazid, Benmostefa Benaouda… Quelques noms parmi d’illustres personnalités, devenus par la force des choses et du destin national des diplomates aguerris, patriotes convaincus d’un idéal inébranlable, celle de la libération d’un peuple et d’un territoire de l’oppression coloniale. Des noms qui ont été gravés dans l’histoire de la révolution algérienne.

Ce sont ces nationalistes, responsables et dirigeants d’une autorité naissante, qui vont marquer le feuilleton de ces âpres négociations vers les accords de cessez-le-feu en mars 1962. Ce sont eux qui ont mis la diplomatie au service de la résistance et de la guerre de libération.

Ces illustres personnalités, qui n’ont jamais fait l’école de la diplomatie, ont été forgées par les qualités de la guerre et ses tragédies, par l’ignoble colonisation et surtout par une intelligence politique hors pair face à une puissance militaire et diplomatique de la France.

Ce sont encore eux qui vont créer et bâtir les fondements de la doctrine diplomatique algérienne post-indépendance, dont l’esprit et l’âme sont encore maintenus et vivaces jusqu’à nos jours.

La France coloniale est venue de découvrir, dès le début des pourparlers, à Melun en juin 1960, l’intelligence et la pugnacité de ces résistants en matière de diplomatie. Au départ, le commandement de la Révolution algérienne savait que la France ne s’amenait pas facilement à des négociations sérieuses. Qu’elle cherchait beaucoup à gagner du temps et qu’elle voulait juste tester le gouvernement provisoire algérien pour en connaître ses intentions ou ses points faibles. Pour les dirigeants du FLN, un simulacre de pourparlers stériles était attendu.

Les premiers négociateurs du GPRA sont Mohamed Seddik Benyahia et Ahmed Boumendjel, qui se sont déplacés en France pour un premier contact. En quatre jours, les deux envoyés ont été fermes et ont prouvé que la France n’a pas bonne foi avec ses conditions rédhibitoires. Ils ont même laissé une puissante impression, qui va faire réfléchir Paris. A l’époque, les Algériens ont organisé de gigantesques manifestations pour déjouer le plan « Challe », lancé par le général De Gaulle, dans lequel il voulait diviser le GPRA et affaiblir son aura. Paris cherchait à associer dans les négociations d’autres partis qui n’ont aucune attachée à la résistance ou à l’armée avec le peuple.

—– Une forte pression sur la scène internationale

Peine perdue pour les Français. Il aura fallu encore quelques mois avant que la France n’accepte enfin de négocier sérieusement, en raison d’une forte pression internationale imposée par les diplomates du FLN à travers le monde. Des Nations Unies où ils ont ouvert un bureau jusqu’aux premières reconnaissances en Afrique, en Asie, en Europe et dans le monde arabo-musulman. Les succès diplomatiques s’enchaînent rapidement.

Cette fois ci, la France retourne aux négociations avec une médiation suisse. Ça sera à Lucerne le 2 février 1961. Aux premières négociations d’Evian,  c’est Krim Belkacem qui va conduire la délégation algérienne face à Louis Joxe du côté français.

Après plusieurs séances tenues entre les 20 mai et 13 juin de la même année, les questions cruciales sont conservées lettre morte, en raison de l’entêtement de la partie française qui voulait débattre du dossier du cessez-le-feu déterminant du reste des dossiers, en attentant à l’intégrité territoriale de l’Algérie par la proposition de séparation du Sahara.

Mais, Krim Belkacem et la partie algérienne ont refusé de marchander les principes fondamentaux contenus dans la Proclamation du 1er novembre 1954. Défendre une question de principe est une déjà une leçon politique face aux tergiversations iniques de la France et à ses atermoiements.

C’est durant les pourparlers de Lugrin (prés de la frontière suisse) que les Français comprennent que les négociateurs algériens sont des vrais diplomates, forgés et formés par la résistance et les reconnus de la révolution, qu’ils ne marchandent pas la cause nationale et qu’ils sont fermes jusqu’au bout.

L’une des leçons de ces négociations exploratoires, c’est quand le gouvernement français s’entêté à ne pas reconnaître la souveraineté de l’Algérie sur son Sahara. Le GPRA suspend les négociations et n’a repris ses contacts qu’après avoir arraché une reconnaissance formelle de De Gaule dans son discours du 5 septembre 1961, où il a souligné la reconnaissance par la France de la souveraineté de l’Algérie sur l’ensemble de son territoire y comprenant le Sahara.

Depuis, les derniers rounds des négociations ont été menés par Krim Belkacem et Saad Dahleb jusqu’à la signature des accords et l’annonce du cessez le feu, la mise en place d’une période de transition (gouvernement de Rocher noir) et l’organisation du référendum d’autodétermination.

——–Une détermination et une foi inébranlable

La guerre était finie et le peuple algérien sous la direction du FLN a obtenu son indépendance après une lutte héroïque et un lourd tribut : Un million et demi de martyrs, des centaines de milliers de veuves et d’orphelins, des milliers de disparus, des milliers de détenus et de prisonniers, destruction des centaines de villages et de douars, une population appauvrie et analphabète dans sa grande majorité.

Selon les témoignages des acteurs des deux côtés de cette longue série de négociations, les membres de la délégation algérienne ayant participé aux Accords d’Evian ont fait montre d’une détermination à toute épreuve. Cela découle de leur foi inébranlable en la légitimité de la cause algérienne et du droit du peuple à l’indépendance et à une vie décente.

Pour le moudjahid et ancien diplomate Noureddine Djoudi, les dirigeants de la Révolution de libération nationale se sont fixé un objectif éminent lorsqu’ils ont décidé de mener des négociations avec la France, celui d’amener cette dernière à accepter l’idée d’une indépendance totale en dépit des multiples manœuvres auxquelles s’est livré le négociateur français.

Mais grâce à la détermination sans pareille des négociateurs algériens, à leur sens aigu de la diplomatie et à leur habileté dans la négociation et le dialogue, la partie française a dû s’asseoir à la table des négociations avec ceux qu’elle qualifiait de terroristes et de fellagas.

Lors de ces négociations, imbu de mépris et de ruse, le colonisateur français ne s’attendait pas à avoir face à lui des hommes de cette trempe, à leur tête Krim Belkacem et Saad Dahleb. Des hommes perspicaces doués d’un sens aigu de la diplomatie et rompus à la négociation de questions sensibles. 

L’ancien diplomate Djoudi, a cité les propos de Saad Dahleb au négociateur français qui l’informait de la décision de De Gaulle de séparer le Sahara de l’Algérie: « Je suis Algérien et vous devez accepter l’indépendance totale de l’Algérie, faute de quoi nous poursuivrons la lutte. Rapportez ce que j’ai dit à votre président».

Il faut souligner que parmi les facteurs de succès de ces diplomates de la résistance, c’est la grande connaissance que le négociateur algérien avait de la situation interne de la France, notamment ses problèmes économiques, ainsi que la capacité de la diplomatie algérienne à isoler la France sur le plan international, forçant De Gaulle à acquiescer aux exigences des Algériens et à leur détermination à arracher l’indépendance.

Pour des politologues et les historiens, c’est grâce à cette diplomatie naissante que la guerre de libération a retrouvé une partie de sa force et consolidé son image à l’étranger et ses capacités militaires et politiques à l’intérieur.

La France coloniale était face à des hommes qui voulaient à tout prix l’indépendance de leur pays et de tout son territoire, ce qui signifie « une connaissance de la psychologie du négociateur français et une bonne lecture des données du contexte international, de la situation interne française et des équilibres de guerre ».

Pour les témoins de l’époque, c’est là des compétences dont a fait preuve le négociateur algérien et qui ont conduit au succès des négociations et au recouvrement de l’indépendance de l’Algérie.

Les diplomates de la révolution ont fait montre d’intelligence, de fermeté, d’esprit chevronné et de dynamisme. Des atouts précieux qui ont fini par isoler la puissance coloniale sur le plan international et à la contraindre à négocier, à utiliser à la solution politique et à reconnaître la souveraineté de l’Algérie, indépendante et libre.

 

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