Au lendemain de la réélection du président Nicolas Maduro, l’opposition conteste les résultats et revendique la victoire. Une victoire mise en doute par la communauté internationale. Ce 29 juillet, la Colombie demande un décompte total des voix et un «audit indépendant».
Par Rosa C.
Selon des résultats officiels proclamés dans la soirée du 28 juillet par le Conseil National Electoral (CNE) après le dépouillement de 80 % des bulletins et une participation de
59 %, Nicolas Maduro, héritier de l’ancien président Hugo Chavez (1999-2013), a été réélu pour un troisième mandat consécutif de six ans avec 5,15 millions de voix (51,2 %). Le candidat de l’opposition, Edmundo Gonzalez Urrutia, 74 ans, obtient un peu moins de 4,5 millions (44,2 %).
Le résultat est «irréversible», a assuré le président du CNE, Elvis Amoroso, homme de confiance du pouvoir qui fait partie des personnes sanctionnées par Washington pour leur rôle dans la crise vénézuélienne.
Le ministre colombien des Affaires étrangères, Luis Gilberto Murillo, appelle ce 29 juillet à un décompte total des votes et à un «audit indépendant». «Nous demandons, dès que possible, un décompte total des voix, sa vérification et un audit indépendant», a écrit Murillo sur X, ajoutant qu’il était «important de dissiper les doutes sur les résultats».
L’opposition, qui était confiante de mettre fin à 25 années de pouvoir chaviste, a aussitôt rejeté ce résultat. «Nous avons gagné avec 70% des voix, « le Venezuela a un nouveau président élu et c’est Edmundo Gonzalez Urrutia», a déclaré la charismatique cheffe de l’opposition Maria Corina Machado. Déclarée inéligible par le pouvoir, elle avait fait campagne pour ce diplomate discret qui l’avait remplacée au pied levé. «Il ne s’agit pas d’une fraude de plus mais d’une méconnaissance et de la violation grossière de la volonté populaire», a-t-elle ajouté. «Nous savons tous ce qui s’est passé aujourd’hui».
«Notre combat continue, nous ne nous reposerons pas tant que la volonté du peuple vénézuélien ne sera pas reflétée», a déclaré Edmundo Gonzalez Urrutia, ajoutant qu’il n’y avait pas d’appel à manifester. Maduro a reçu le soutien de la Chine et de ses alliés habituels – Cuba, Nicaragua, Honduras et Bolivie. Mais les États-Unis, l’Union européenne, l’Espagne, le Chili, le Pérou, le Costa Rica, le Guatemala, la Colombie, l’Uruguay et l’Argentine ont exprimé des doutes sur le résultat officiel. Le chef de la diplomatie de l’UE, Josep Borrell, a réclamé sur X une «transparence totale (…) y compris le décompte détaillé des voix et l’accès aux procès-verbaux des bureaux de vote». Nicolas Maduro est sorti sur une scène près du palais présidentiel de Caracas, vêtu d’un survêtement aux couleurs du Venezuela et salué par un petit feu d’artifice et des drones, pour fêter sa victoire avec ses partisans chantant «Vamos Nico !» (allons-y, Nico). «Il y aura la paix, la stabilité et la justice. La paix et le respect de la loi. Je suis un homme de paix et de dialogue», a-t-il dit, alors que la campagne et le scrutin se sont déroulés dans une ambiance tendue, l’opposition dénonçant de nombreuses intimidations et arrestations. Caracas avait limité l’observation du scrutin. Malgré des sondages donnant l’opposition largement en avance et une crise économique sans précédent, Nicolas Maduro, qui s’appuie sur l’appareil militaire, s’est toujours montré sûr de sa victoire. Il avait même évoqué un «bain de sang» en cas de succès de l’opposition.
Le pays pétrolier, longtemps un des plus riches d’Amérique latine, est exsangue : effondrement de la production pétrolière, PIB réduit de 80 % en dix ans, pauvreté, systèmes de santé et éducatif totalement délabrés. Sept millions de Vénézuéliens ont fui le pays. Le pouvoir accuse le «blocus criminel» d’être à l’origine de tous les maux. Les États-Unis avaient durci leurs sanctions pour tenter d’évincer Nicolas Maduro après sa réélection contestée de 2018, lors d’un scrutin entaché de fraudes selon l’opposition, qui avait débouché sur des manifestations sévèrement réprimées.
R. C.