Witkoff pour la paix en Ukraine mais pour la guerre à Ghaza

  Les négociations entre, d’une part Américains et Ukrainiens, et de l’autre Américains et Russes, ont repris en Arabie saoudite, dans un huis clos rigoureux qui au terme de chaque round ne donne lieu à aucune déclaration par aucune des délégations. On voit celles-ci arriver, rentrer dans la salle de négociations, en ressortir, puis repartir […]

Mars 25, 2025 - 18:53
 0
Witkoff pour la paix en Ukraine mais pour la guerre à Ghaza

 

Les négociations entre, d’une part Américains et Ukrainiens, et de l’autre Américains et Russes, ont repris en Arabie saoudite, dans un huis clos rigoureux qui au terme de chaque round ne donne lieu à aucune déclaration par aucune des délégations. On voit celles-ci arriver, rentrer dans la salle de négociations, en ressortir, puis repartir sans prononcer jamais un mot à l’adresse des journalistes. Cela est-il dû au fait qu’elles se déroulent en Arabie saoudite, où la discrétion est toujours de rigueur, ou à un choix délibéré des parties prenantes elles-mêmes de ne rien dire aussi longtemps qu’elles ne seront pas parvenues entre elles à un résultat tangible ? Il est probable que le choix même de l’Arabie saoudite pour la tenue des négociations n’ait pas été fait indépendamment de son aversion pour l’affichage sempiternel. Hier, néanmoins, le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, était censé rompre publiquement le silence sur le tour pris par ces négociations, mais il n’était pas dit qu’il le fasse à Riyad même. Les Américains eux non plus n’en révèlent rien, cependant ils n’ont cessé d’exprimer leur satisfaction quant à la tournure prise par ces conclaves.

Leur optimisme est d’autant plus remarquable que sur le front les hostilités se poursuivent comme si de rien n’était, sans qu’il soit possible en tout cas de relever une quelconque baisse d’intensité, toutefois en respect de l’engagement pris par les belligérants de ne pas s’attaquer aux infrastructures énergétiques. Steve Witkoff, dans son entretien avec Tucker Carlson, a fait allusion aux territoires ukrainiens annexés par la Russie en des termes laissant penser que pour lui ils étaient russes auparavant, leurs habitants parlant russe, de sorte qu’il ne serait pas particulièrement injuste qu’ils le restent ad vitam aeternam. Le problème avec Witkoff, c’est qu’il n’est pas un officiel, tout en étant quelqu’un qu’il faut écouter, et d’abord en raison de sa forte proximité avec Donald Trump. Il n’est pas tant un diplomate en exercice qu’un porte-parole de Donald Trump. Or ce que veut Trump par-dessus tout, c’est la fin de la guerre le plus rapidement possible, et que la paix une fois revenue soit portée à son crédit. L’intégrité territoriale de l’Ukraine est à ses yeux peu de chose par rapport à cet objectif digne du Prix Nobel. Notons qu’il aborde autrement la paix au Moyen-Orient, dont il ne fait pas sa priorité, bien qu’il se soit engagé à la rétablir elle aussi. Le titre officiel de Witkoff est celui d’émissaire pour le Moyen-Orient, mais on ne peut pas dire qu’il ait fait beaucoup pour le mériter. Les Etats-Unis étaient déjà un soutien indéfectible d’Israël dans sa guerre contre Ghaza du temps de l’administration Biden, mais avec l’administration actuelle ils travaillent aux côtés d’Israël pour la solution finale de la question palestinienne, c’est-à-dire pour la déportation des Palestiniens, du moins pour ceux qui auront échappé au génocide en cours, non pas d’hier mais depuis des décennies. Ne manquent que les pays où cette dernière puisse se faire. En Ukraine, la seule paix possible pour les Russes, c’est celle qui leur garantit la possession de ce qu’ils ont déjà annexé, mais dont les Ukrainiens ne voudront jamais, quand bien même l’aide américaine viendrait à leur manquer totalement. Si bien qu’on se demande d’où vient l’optimisme des Américains. Si par hasard il ne serait pas dû à la bonne entente des deux présidents russe et américain, et rien qu’à cela. On a appris de Witkoff que Poutine avait fait faire le portrait de Trump, qu’il le lui avait offert, et que Trump avait aimé le cadeau.

 

Par Mohamed Habili