Recensement économique national : L’informel, cet angle mort qui fausse les données

Où en est-on de l’opération de recensement économique, cette initiative lancée par le Président Tebboune visant à obtenir les chiffres, les vrais, qui soient le miroir de l’économie, loin des statistiques fantaisistes produites par l’administration ? Concerné en première ligne par cette opération, le ministre du Commerce intérieur et de la Régulation du marché national, Tayeb Zitouni, a présidé, avant-hier lundi, une réunion en présence de ses cadres et de représentants de la Chambre Algérienne de Commerce et d’Industrie (CACI).Au menu de cette réunion : le passage en revue, et surtout l’analyse, de la méthodologie d’exploitation des données de base collectées à l’issue du recensement économique, dans le but d’identifier au plus près « les indicateurs stratégiques relatifs au fonctionnement du marché national », indique le communiqué du ministère. Pour Zitouni, il va de soi que ces données sont extrêmement importantes « pour ajuster avec précision et souplesse la politique commerciale nationale et s’y appuyer afin de prendre des décisions efficaces ».Il s’agit également pour le membre du Gouvernement d’aller vite dans l’analyse de ces données, afin d’asseoir une stratégie efficace et réaliste dans la gouvernance du marché intérieur, fondée sur l’anticipation « afin de garantir un approvisionnement stable et durable du marché national. »Il est sans doute à rappeler, et surtout le porter au crédit de Zitouni, que le marché, durant le mois de Ramadhan, a échappé aux turbulences habituelles.S’il faut bien mettre en avant cette opération de recensement économique au crédit du chef de l’État, et admettre son utilité, il n’en demeure pas moins qu’elle soulève certaines interrogations.Notamment en ce qui concerne le marché informel, qui, mine de rien, représente aujourd’hui quelque chose comme 30 % du produit national brut, hors hydrocarbures.Soit des centaines de milliers de milliards de dinars qui sont brassés quotidiennement, mais qui n’apparaissent nulle part dans les chiffres officiels, constituant du coup un angle mort qui va à l’encontre de la volonté des autorités d’avoir une photographie précise du marché national. Selon des experts, une masse d’activités (commerce non enregistré, services à domicile, sous-traitance artisanale, agriculture de subsistance) génératrice de revenus, échappe au fisc et à la Sécurité sociale, alors qu’elle constitue un instrument de mesure essentiel de l’économie nationale. La collecte des données économiques, quels que soient les objectifs qui lui sont assignés et les résultats qu’elle a générés, restera partielle et parcellaire, dès lors que l’informel, avec ses chiffres occultes, n’y est pas intégré. D’où la nécessité pour les pouvoirs publics, même au plus haut niveau de l’État, d’avoir une démarche pédagogique envers les porteurs de fonds informels, pour les convaincre – en leur apportant des assurances – de recycler leurs bas de laine dans les circuits bancaires, et de faire profiter la collectivité nationale de cette masse financière dormante.

H. Khellifi

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