Après «Les citronniers» et «La fiancée syrienne»: Eran Riklis revient avec «Lire Lolita à Téhéran»
Adapté du roman autobiographique d’Azar Nafisi, le film «Lire Lolita à Téhéran» d’Eran Riklis retrace le combat de cette ancienne professeure de littérature face à l’oppression du régime islamique en Iran. En salles depuis 26 mars, «Lire Lolita à Téhéran» est en réalité la représentation d’une problématique mondiale et actuelle : la censure littéraire, comme […]

Adapté du roman autobiographique d’Azar Nafisi, le film «Lire Lolita à Téhéran» d’Eran Riklis retrace le combat de cette ancienne professeure de littérature face à l’oppression du régime islamique en Iran. En salles depuis 26 mars, «Lire Lolita à Téhéran» est en réalité la représentation d’une problématique mondiale et actuelle : la censure littéraire, comme l’a expliqué l’autrice au HuffPost.
L’histoire remonte à 1979, lorsque Azar Nafisi (Golshifteh Farahani) revient à Téhéran. Elle devient professeure de littérature au département anglais de l’université, après avoir étudié aux États-Unis. Mais petit à petit, le régime supprime de nombreux livres étudiés en classe.
Azar Nafisi décide de résister en rassemblant en secret sept de ses étudiantes pour parler de la littérature occidentale chez elle. Les filles évoquent leurs espoirs face à la révolution qui touche leur pays, en comparant leur destin aux personnages des romans qu’elles étudient. Azar Nafisi a expliqué au HuffPost en quoi l’expérience vécue par ces jeunes femmes n’était pas isolée, et tendait à se répandre.
À propos de sa participation à la réécriture de son histoire pour le cinéma, Azar Nafisi a déclaré que «c’est un sentiment tellement étrange. D’un côté, je ne suis pas Golshifteh. Je ne suis pas cette femme qui joue et utilise mon nom. Mais je me sens très proche d’elle parce que le film s’est concentré sur les sentiments et les émotions intérieures de ce personnage. J’ai ressenti l’atmosphère de l’Iran en regardant le film. Il a su capter cette atmosphère d’anxiété, de peur et d’angoisse». L’autrice a ajouté que «lorsque je vivais en Iran, je vivais dans une société totalitaire. Lorsque je suis arrivée aux États-Unis, je vivais dans une démocratie. Et aujourd’hui, cette démocratie est remise en question. J’ai donc eu l’impression que les deux endroits que j’appelais mon pays, l’Iran et les États-Unis, subissaient tous deux une tendance totalitaire».
Concernant le danger de la censure sur la littérature, Azar Nafisi a déclaré que «l’un des ennemis du totalitarisme est l’imagination et les idées. Partout où une tendance totalitaire se développe, la première chose qu’ils font est d’interdire les livres. C’est ce qui s’est passé en Iran, où non seulement ils ont interdit et censuré, mais ils ont aussi emprisonné, torturé et tué des poètes, des écrivains et des artistes. La littérature est l’âme de l’humanité, elle est porteuse de vérité. Lorsque vous écrivez, vous essayez de révéler la vérité et la vérité est dangereuse pour les mentalités totalitaires. Ils en ont peur, que ce soit aux États-Unis, en France ou en Iran».
Malgré tous les dangers, «j’ai de l’espoir mais je ne suis pas optimiste. Je pense que la meilleure façon de gagner est de s’en tenir à ses valeurs et à ses principes. Car l’une des premières choses que ces régimes essaient de faire, c’est de vous priver de votre identité, de votre identité historique, sociale et culturelle. Et dans le cas de la République islamique, votre identité personnelle», précise Azar Nafisi.
Il est à noter que la résistance des femmes iraniennes et l’importance de la littérature dans la société sont les principaux messages de ce livre. «Leurs premières cibles sont les femmes et la culture, ce qui inclut les livres et les minorités. C’est ce qu’ils craignent. Un grand roman est la forme d’expression la plus démocratique qui soit. Elle donne à l’auteur la possibilité de s’exprimer, de se glisser dans la peau de tous les personnages et de donner une voix à chacun, même au méchant. De par sa structure, la fiction est dangereuse pour les régimes totalitaires. Ils veulent la détruire et détruire ceux qui la produisent. J’ai survécu grâce à la littérature parce que j’ai trouvé un espace où je pouvais être libre. Et personne ne peut m’enlever cet espace», explique Azar Nafisi.
Mayo D.