Bachar el Assad sort de son silence
L’ex-président syrien Bachar el Assad s’est exprimé ce lundi pour la première fois depuis son renversement, survenu le 8 décembre dernier, et cela par l’entremise d’un message électronique émis non pas sur un compte personnel mais celui de la présidence syrienne. Il aurait voulu, a-t-il fait savoir de prime abord, que ce soit à travers un […]
L’ex-président syrien Bachar el Assad s’est exprimé ce lundi pour la première fois depuis son renversement, survenu le 8 décembre dernier, et cela par l’entremise d’un message électronique émis non pas sur un compte personnel mais celui de la présidence syrienne. Il aurait voulu, a-t-il fait savoir de prime abord, que ce soit à travers un média arabe classique, ou à la rigueur un média international de grande audience, mais aucun de ceux auxquels il s’était adressé n’ayant voulu relayer ce qu’il avait à dire, il avait dû se rabattre sur ce moyen de fortune : un message électronique. Sûrement il n’y avait pas grand monde pour attendre de lui qu’il donne sa version des faits, qu’il refasse même parler de lui, à moins de deux semaines de son renversement. De sorte qu’on peut déjà affirmer qu’il a créé la surprise en décidant de briser son silence sans plus attendre. Mais ceux qui malgré tout, où qu’ils se trouvent du reste, en Syrie ou ailleurs, attendaient qu’il se manifeste, ont dû être, en prenant connaissance de ce qui se présente comme une lettre au peuple syrien, ou surpris, ou déçus, à moins que ce ne soit les deux à la fois.
Si le président renversé en même temps que son régime avait annoncé son intention de reconquérir le pouvoir, et qu’à cet effet une organisation de résistance était née, qui ferait bientôt parler d’elle, dont lui-même forcément serait le chef, il aurait répondu à l’attente de ses partisans fidèles, pour autant bien sûr qu’il lui en reste. Mais Bachar el Assad, lors de cette intervention, s’est attaché à une seule chose : nier qu’il se soit enfui pour sauver sa peau, arguant du fait qu’il n’avait quitté Damas qu’à la dernière minute, c’est-à-dire au moment où la Syrie indéniablement tombait entre les mains des «terroristes». Il avait quitté certes la capitale, explique-t-il, mais pas la Syrie, puisqu’à ce moment il s’était déplacé dans une base russe, où il avait continué à suivre le cours des opérations. Ce n’est que dans la soirée de cette journée du 8 décembre que ses amis russes, révèle-t-il, avaient décidé de l’évacuer vers Moscou. Pour son propos, qui était de montrer qu’il
n’avait pas songé en tout premier lieu à sa survie personnelle, le moment où il avait quitté le pays importait en effet beaucoup. Il n’avait pas fui, il n’avait pas abandonné à leur sort la Syrie et son peuple, il s’était seulement convaincu qu’il n’y avait plus rien à faire alors, et que dans ces conditions il valait mieux que le fauteuil présidentiel restât vide. Evidemment, mais cela il s’est gardé de le dire, la vérité, la stricte vérité, aurait voulu qu’il dise que le plus important à ce moment était que le président en fonction, c’est-à-dire lui-même, restât vivant. Mais si quelqu’un estime que dans l’intérêt général, il lui faut rester en vie, c’est bien que son objectif n’est pas d’assurer son salut personnel, mais celui de son pays et de son peuple. Il est impossible de comprendre autrement ce premier message de Bachar el Assad. Il faut prendre en compte qu’il s’exprime depuis Moscou, dont les dirigeants sont pour l’heure occupés à garder leurs deux bases en Syrie, à Hmeimim et à Tartous sur la côte, dont les Occidentaux voudraient bien les priver. Or tant que cette question n’est pas réglée, d’une manière ou d’une autre, la parole du président renversé restera contrainte et allusive.
M. H.
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