Accords d’Evian: Le jour où l’Algérie a repris son destin

Le cessez-le-feu, le 19 mars 1962, marque une date charnière dans l’histoire de l’Algérie et de la colonisation française. Après plusieurs mois d’âpres négociations entre délégations algérienne conduite par Krim Belkacem, vice-président et ministre des Affaires étrangères du GPRA (Gouvernement provisoire de la République algérienne) et, française dirigée par Louis Joxe, ministre des Affaires étrangères […] The post Accords d’Evian: Le jour où l’Algérie a repris son destin appeared first on Le Jeune Indépendant.

Mars 18, 2025 - 23:49
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Accords d’Evian: Le jour où l’Algérie a repris son destin

Le cessez-le-feu, le 19 mars 1962, marque une date charnière dans l’histoire de l’Algérie et de la colonisation française. Après plusieurs mois d’âpres négociations entre délégations algérienne conduite par Krim Belkacem, vice-président et ministre des Affaires étrangères du GPRA (Gouvernement provisoire de la République algérienne) et, française dirigée par Louis Joxe, ministre des Affaires étrangères au sein de l’exécutif colonial, les Accords d’Évian sont enfin signés, le 18 mars, mettant officiellement fin à une colonisation féroce de 132 ans et à une guerre de libération longue et sanglante.

Cette date qui signe la victoire du nationalisme algérien sur un colonialisme impitoyable a plongé la totalité des composantes du système colonial aussi bien en Algérie qu’en France dans une sorte d’affolement, où la violence aveugle des partisans de l’Algérie française, dont une bonne partie rassemblée au sein de la sanguinaire OAS (Organisation de l’Armée secrète) a versé dans une brutalité absolue faisant des centaines de morts parmi les Algériens et les Français. Des violences qui finirent par transcender le terrain algérien et gagner la métropole et sa capitale.

Face à l’inquiétude des colons qui allaient du jour au lendemain abandonner des biens mal acquis, confisqués avec usage des pires atrocités par leur aïeux lors de la conquête qui sera suivi par une vaste compagne de colonisation, le pouvoir usera d’une stratégie postcoloniale à même de maintenir sous son joug certains privilèges. A l’image de structures stratégiques comme la base militaire et maritime de Marsa El Kébir à l’Ouest ou les champs pétrolifères du Sud.

La partition de l’Algérie a même été (re)proposée dans des plans de partage du pays en plusieurs territoires. Faites à partir de 1957 par la classe politique française, ces propositions avaient pour but de mettre fin à la guerre en préservant la souveraineté française sur la partie Ouest et son prolongement vers le Sahara et une bonne partie de la capitale. Les Algériens, selon le plan, seront ramener à former un Etat indépendant à l’Est.

Ainsi, le cessez-le-feu qui entre en vigueur le 19 mars est perçu comme une victoire politique majeure pour le FLN (Front de libération nationale), son bras armé l’ALN et le GPRA. Il vient consacrer des années de lutte acharnée contre plusieurs composantes du système colonialiste, politique et militaire érigé par la France dès sa prise d’Alger, en 1830. Cette victoire n’est pas seulement la fin des hostilités, mais surtout la reconnaissance implicite de la souveraineté du peuple sur sa terre dans sa globalité, un pas décisif vers la libération totale. Cette victoire sera suivie par le référendum d’autodétermination avant que ne soit actée, le 5 juillet 1962, l’indépendance.

 

L’ombre de l’OAS, et défis du GPRA

 

Du côté français, cet accord constitue un aveu d’échec, malgré les tentatives du général De Gaulle de préserver une certaine influence sur l’Algérie post-indépendance, ce dont il li sera accordé momentanément avant que le pouvoir alors dirigé par Feu Boumediène ne récupère la totalité des biens algériens au début des années 1970. Mais pour les militants algériens et la population, cette date marque la concrétisation d’un rêve arraché au prix du sang et du sacrifice.

Si sur le papier, le cessez-le-feu devait signifier la fin des affrontements, la réalité fut tout autre. L’OAS, organisation clandestine française qui a marqué son intransigeance et s’est opposée à l’indépendance, se lance alors dans une campagne de terreur. Refusant d’accepter la fin de l’Algérie française, ses membres multiplient les attentats, assassinats et sabotages dans les grandes villes algériennes, notamment à Alger et Oran.

Des violences qui mettent dans une posture délicate militants et moudjahidine qui pourtant ont de leur part officiellement respecté le cessez-le-feu. Ainsi, ils se doivent à la fois gérer une transition politique et protéger la population des exactions de la folie meurtrière des jusqu’auboutistes de l’OAS. Cette période voit également le GPRA devoir contenir les divisions internes, entre ceux qui prônent une ligne plus modérée et d’autres, comme certains chefs de wilayas, qui veulent continuer la lutte par les armes jusqu’au départ définitif des forces françaises.

Dans cette atmosphère de tension extrême, la population civile devient la première victime. Les colons pro-OAS pratiquent la politique de la terre brûlée, s’en prenant aux infrastructures et à la population algérienne, mais aussi aux Européens favorables à l’indépendance, dont beaucup payeront de leurs vies pour s’être alliés à la vision du FLN.

 

La question algérienne à l’ONU 

 

De l’extérieur, la communauté internationale suit avec attention les événements. L’ONU, qui avait déjà soutenu la cause algérienne, presse la France d’assurer une transition pacifique. Les pays africains indépendants, notamment ceux qui ont eux-mêmes connu la colonisation, apportent un soutien diplomatique et moral au FLN.

Les principaux pays réunis au sein de l’organisation des non-Alignés, à leur tête la Yougoslavie, dirigé alors par Tito, appui constant à la lutte armée, apportent leurs soutiens sans ambiguïté aux nationalistes algériens et se prononcent dans leur majorité en faveur de l’autodétermination du peuple algérien. Idem pour l’Inde, Cuba et l’Egypte alors bastion du panarabisme, l’Italie et enfin les Etats Unis et son rival durant la guerre froide l’ex-URSS, qui s’avéra par la suite un véritable allié de l’Algérie naissante, appuyèrent dans leur majorité et sans ambiguïté l’indépendance.

Mais sur le terrain, la violence atteint un niveau inquiétant. L’OAS multiplie les opérations de sabotage et les massacres. Parmi les épisodes les plus marquants, le massacre du 26 mars 1962 à Alger, où des manifestants pacifiques pro-Algérie française sont mitraillés par l’armée française après une provocation de l’OAS, un évènement qui brouillera toutes les cartes de la puissance coloniale, à la limite d’une guerre civile.

Face à cette escalade, De Gaulle prend des mesures radicales. Il intensifie la répression contre l’OAS et ses membres sont arrêtés ou contraints à la clandestinité. Mais cette répression ne suffit pas à calmer les tensions. La peur et l’incertitude règnent dans les deux camps, alors que l’Algérie se dirige inexorablement vers son indépendance.

 

La transition jusqu’au 5 juillet 1962 et exode des Pieds noirs

 

Après le cessez-le-feu, l’Algérie entre dans une période de transition sous la supervision d’un Haut-Commissaire français. Mais cette phase est marquée par un chaos généralisé, notamment dû aux actions désespérées de l’OAS.

Entre mars et juillet 1962, l’organisation terroriste française redouble de violence. À Oran et Alger, elle perpètre des massacres de masse, pose des bombes dans les quartiers ou vivent les communautés algériennes et assassine des figures pro-indépendance. Un de leurs objectifs est de pousser les militants algériens à riposter afin de justifier une intervention militaire française, mais cette stratégie échoue.

Dans ce climat de terreur, un exode massif des Pieds noirs commence, fuyant d’abord la terreur des extrémistes de l’OAS et dont beaucoup ne se voyant plus d’avenir dans une Algérie indépendante, des centaines de milliers d’Européens et de harkis quittent précipitamment le pays. En seulement quelques mois, l’Algérie se vide de près d’un million de ses habitants européens, marquant la fin d’un chapitre colonial de plus d’un siècle.

Le 1er juillet 1962, le référendum d’autodétermination est organisé. Le « oui » à l’indépendance l’emporte avec 99,72 % des voix. Quelques jours plus tard, le 5 juillet 1962, L’indépendance est officiellement proclamée, scellant définitivement la fin de 132 ans de colonisation française.

 

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