Contestation

Recep Tayyip Erdogan réussira-t-il, cette fois-ci encore, à briser l’élan des manifestants qui défilent depuis plus d’une semaine à travers le pays pour protester contre l’arrestation du maire d’Istanbul, comme il a réussi à le faire ces dernières années à chaque protestation populaire, ou son coup de force contre Ekrem Imamoglu aura-t-il été la provocation […]

Mars 29, 2025 - 19:13
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Contestation

Recep Tayyip Erdogan réussira-t-il, cette fois-ci encore, à briser l’élan des manifestants qui défilent depuis plus d’une semaine à travers le pays pour protester contre l’arrestation du maire d’Istanbul, comme il a réussi à le faire ces dernières années à chaque protestation populaire, ou son coup de force contre Ekrem Imamoglu aura-t-il été la provocation de trop pour le peuple turc ? Parmi les opposants, l’on appelle à des rassemblements «tous les samedis dans une ville de Turquie» et les mercredis soir à Istanbul. C’est le cri de mobilisation lancé par Özgür Özel, chef du Parti républicain du peuple (CHP), devenu porte-voix de l’opposition dans le journal Le Monde. La foule doit se retrouver à 12 h 00 (9 h 00 GMT) sur la rive asiatique de la métropole stambouliote «pour poursuivre la marche vers le pouvoir». Dès le début de la matinée, des ferries affrétés sur le Bosphore par le parti ont commencé à conduire les participants munis du drapeau turc et de portraits de Mustafa Kemal Atatürk, le père de la nation, jusqu’au lieu du rassemblement. L’arrestation d’Ekrem Imamoglu le 19 mars a déclenché une vague de protestations inédite en plus d’une décennie à travers la Turquie, mobilisant des dizaines de milliers de manifestants chaque soir dans les rues. Depuis le 24 mars, le parti a cessé de convoquer la foule devant la municipalité, les rassemblements ont été interdits par les autorités. «Nous pensons que les arrestations vont diminuer à partir de maintenant», assure Özgür Özel. Le chef du parti kémaliste se dit néanmoins prêt à «prendre le risque de passer huit, dix ans en prison s’il le faut. Parce que si nous ne repoussons pas cette tentative de coup d’État il en sera fini des urnes». Le CHP, première force d’opposition, s’apprêtait à investir Ekrem Imamoglu comme son candidat pour la prochaine élection présidentielle prévue en 2028 quand il a été arrêté le 19 mars et envoyé en prison cinq jours plus tard. Les jeunes et les étudiants surtout ont tenté de poursuivre la mobilisation, mais la répression qui continue avec des arrestations, chez eux à l’aube, de manifestants, journalistes, avocats, semble rebuter les plus déterminés. Rien qu’à Istanbul, 511 étudiants avaient déjà été interpellés vendredi, dont 275 incarcérés, selon l’avocat Ferhat Güzel. «Mais ce nombre est probablement beaucoup plus élevé», a-t-il affirmé à l’AFP. Selon les dernières données officielles publiées jeudi, plus de 2 000 personnes ont été arrêtées, dont 260 avaient été incarcérées. L’avocat du maire d’Istanbul, Mehmet Pehlivan, a été «arrêté pour des motifs inventés de toutes pièces», selon Ekrem Imamoglu, puis remis en liberté dans la soirée. Selon le CHP, quinze millions de personnes, bien au-delà du parti, ont participé à la primaire symbolique maintenue le jour même pour le soutenir. «La candidature d’Ekrem Imamoglu c’est le début d’un voyage qui garantira la justice et la souveraineté de la nation», a lancé Özgür Özel sur X pour motiver les troupes. Toutefois, si la contestation se poursuit, Erdogan pourrait recourir à des moyens bien plus violents et radicaux pour maintenir son pouvoir et s’assurer que la population reste, comme elle l’est depuis plus de vingt ans maintenant, bien docile. Reste à voir si les Turc accepteront cet état de fait sans broncher, ou s’ils décideront finalement de braver le régime autoritaire qui dirige leur pays pour rétablir une véritable démocratie en Turquie.