Le progrès de la condition féminine ne se mesure pas à l’aune de l’exhibition de l’épiderme

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Déc 12, 2024 - 10:04
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Le progrès de la condition féminine ne se mesure pas à l’aune de l’exhibition de l’épiderme

Une contribution de Khider Mesloub – Si le degré de progrès d’une société se mesurait à l’aune de l’absence de contrainte vestimentaire, les sociétés tribales nudistes seraient assurément considérées comme étant les plus libres et évoluées du monde et de l’histoire. Devant la nudité de la belle sauvage, la femme occidentale «civilisée», avec sa mini-jupe et son chemisier échancré, ferait, en matière d’émancipation, figure de rétrograde. Elle passerait pour une intégriste adepte du voilement intégral.

A examiner la question vestimentaire sous toutes les coutures et dans toutes coutumes, la mini-jupe occidentale ne revêt pas un symbole d’émancipation féminine. De même, le voile islamique n’incarne pas, dans tous les pays, un emblème d’asservissement.

La preuve. La femme occidentale, prétendument libre, est contrainte, comme toutes les femmes du monde capitaliste, d’aliéner son corps ou son intelligence pour vivre. De vendre sa force de travail à un patron pour s’offrir une mini-jupe, un chemisier échancré ou un jean moulant. La femme des sociétés primitives, elle, exhibe en toute liberté sa nudité sans être contrainte d’aliéner son corps à une corporation patronale, ni subir quelque caporalisation de son esprit par le conditionnement scolaire et médiatique opéré par la classe dominante bourgeoise.

Certes, la femme occidentale s’habille comme elle l’entend. Mais à quel prix ? En étant contrainte de se dévêtir de sa dignité humaine par la vente de sa force de travail. De se couvrir d’avilissement salarié. De s’enrober de la tunique d’aliénation dans un système d’esclavage salarié mondialisé. Il n’y a pas pire aliénée que la femme occidentale qui se croit libre parce qu’elle s’affuble d’une mini-jupe ou d’un jean moulant pour se rendre à son lieu d’exploitation, l’entreprise.

Au sein du système capitaliste, en Occident, toute invention scientifique et, à plus forte raison, toute innovation sociétale profite exclusivement à la classe dominante. Il en est ainsi de l’IVG (interruption volontaire de grossesse), ce pouvoir de régulation des naissances octroyé aux femmes, ce droit de mort (permis de tuer) accordé à toute femme désireuse de se désencombrer mortellement de son enfant à naître, au prétexte de lui permettre de s’adonner en toute liberté à une sexualité débridée sans encourir le risque de subir les supposés inconvénients de la maternité.

En Occident, si des bourgeois cupides, des capitalistes voraces, des gouvernants inhumains et génocidaires, par nature tous insensibles à la souffrance et à la détresse d’autrui, de surcroît misogynes et phallocrates notoires, se sont résolus à promouvoir la libération de la sexualité des femmes sans risque de grossesse grâce aux moyens contraceptifs et abortifs mis gracieusement à leur disposition (ils sont à 100% pris en charge par la sécurité sociale), ce n’est certainement pas pour assurer leur épanouissement personnel, mais pour pouvoir continuer à les surexploiter au travail – au bureau – à l’usine – au magasin, sans subir quelque interruption intempestive provoquée par des grossesses répétées. La grossesse ne doit pas  perturber la fécondation des profits, dégonfler le processus de valorisation du capital.

«Faites frénétiquement l’amour, jusqu’à vous épuiser, pour ne plus avoir la force ni le désir de faire la guerre au capital. Et pour les risques de grossesse, on vous garantit le recours gracieux à l’avortement !» Tel est le credo des capitalistes à destination de la contemporaine gent féminine occidentale, exploitée et aliénée. Une gent féminine dressée par l’école capitaliste pour féconder exclusivement les bourses des capitalistes.

L’habit ne fait pas le monde ! On n’évalue pas une société sur sa vêture, son accoutrement. Au reste, ce critère vestimentaire, censément symbole de liberté ou d’avilissement d’une femme, n’a cours qu’en France. Qui plus est, il ne s’applique qu’à la femme musulmane.

Pour la société française animée d’une islamophobie congénitale, le voilement d’une femme est synonyme d’asservissement. En revanche, une femme qui se couvre, tous les jours, entièrement la tête d’un chapeau, casquette ou une capuche intégrée à son manteau, n’est jamais considérée être une personne asservie. Ses couvre-chefs ne sont jamais réputés être des symboles de l’oppression féminine. Seul le voile porté par une musulmane incarne, selon la doxa gauloise islamophobe, la soumission. Est-ce parce qu’il n’a pas été inventé par un grand couturier français faiseur de mode ? Ou du fait de son origine musulmane supposée ? Evidemment pour la seconde raison. Au vrai, le rejet du voile «islamique» par les Français dévoile leur répulsion de l’islam, leur haine des musulmans.

Le voile symbolise-t-il l’asservissement de la femme musulmane ? Est-il synonyme d’arriération culturelle, d’idiotie intellectuelle, comme le soutient nombre de Français ? Assurément non. La preuve par l’Algérie où le voilement de la femme est très répandu. Or, en dépit de la généralisation du voile, les femmes algériennes, en moins de cinquante ans, ont intégré massivement les universités, investi le monde du travail. Quoique voilées, ces braves femmes algériennes ont dévoilé au monde entier leur prodigieuse intelligence par leur intégration massive dans l’enseignement supérieur, leurs impressionnantes compétences professionnelles par leur prépondérante insertion dans les entreprises et administrations.

Pour preuve. Sur le plan scolaire, pour l’année universitaire en cours, 2024-2025, le nombre global d’étudiants algériens s’élève à 1 812 656. Or, la majorité d’entre eux sont des femmes. Ces deux dernières décennies, le nombre d’étudiants, en majorité des femmes, a été multiplié par plus de 4, passant de 425 000 en 1999 à plus de 1,8 million aujourd’hui. Depuis le début du siècle, on assiste à la féminisation de l’Université. En effet, la part des jeunes femmes a atteint aujourd’hui les deux tiers des effectifs étudiants, soit 1,2 million d’étudiantes.

Ainsi, malgré la généralisation du port du voile, porté par effet de mode ou pression culturelle (peu importe : en tout cas comme toute mode ou pression sociale, l’une comme l’autre finissent par s’atténuer puis disparaître), pour un pays tout jeune, l’Algérie compte actuellement 1,2 million d’étudiantes dans l’enseignement supérieur. Ce droit à l’instruction, pilier de la liberté et vecteur de l’émancipation, n’a pas été accordé aux femmes algériennes par la France laïque et républicaine du temps de la colonisation, mais par l’Algérie indépendante, en voie de développement économique, de transformation sociale et de modernisation urbaine accélérée.

Et le succès de ces brillantes étudiantes algériennes, en majorité voilées, aux examens ne se dément pas, puisque leur taux de diplomation est exceptionnellement prodigieux. En tout cas, cette population estudiantine porte en elle des transformations sociales profondes que seule une Algérie indépendante et libre a su concrétiser en moins de cinquante ans d’indépendance.

Dans cette nation algérienne jeune au double sens du terme, une part importante de la jeunesse féminine est inscrite dans l’enseignement supérieur. Aujourd’hui, plus de 1,2 million d’étudiantes poursuivent des études supérieures. Pour accueillir ces futures diplômées, l’Algérie aligne 54 universités, 40 écoles supérieures, 13 Ecoles normales supérieures des enseignants (ENS) et 13 centres universitaires, outre l’Université de la formation continue (UFC).

De surcroît, en Algérie, l’Université est libre et gratuite, subventionnée et décentralisée pour permettre à chaque bachelière de poursuivre le cursus universitaire de son choix.

Sur le plan professionnel, en Algérie la population active occupée est estimée à plus de 11 millions de salariés. Depuis l’indépendance de l’Algérie, le taux d’activité a connu une croissance importante. Ce taux a été multiplié par deux, passant de 21% en 1966 à 43% aujourd’hui. Quasiment 2 millions de salariés au sein de la population active sont des femmes. Elles sont en majorité dans le secteur public (60%). La relative faiblesse des femmes dans le monde du travail s’explique par l’extrême jeunesse de la population algérienne : plus de 60% des habitants sont âgés de moins de 30 ans. Ne pas perdre de vue qu’1,2 million d’Algériennes sont étudiantes. Dans une décennie, les femmes représenteront plus de la moitié des salariés.

Ainsi, l’Algérie s’est propulsée en une nation moderne en moins de 50 ans. Elle aura permis à des millions de femmes algériennes d’investir massivement les universités, décrochant à l’issue de leurs longues études des diplômes et des qualifications exceptionnelles, ces sésames qui leur ouvrent, chaque année, des perspectives professionnelles, gages de leur insertion sociale, émancipation personnelle, liberté individuelle. De nos jours, par leur instruction scolaire et insertion professionnelle, les femmes algériennes, quoique voilées en majorité, sont ainsi devenues des femmes libres et indépendantes, n’en déplaise aux contempteurs français qui stigmatisent les femmes voilées des deux côtés de la Méditerranée.

Aujourd’hui, en Algérie, dans les campus des universités, plus de la moitié des étudiants sont des femmes. Dans les hôpitaux, le nombre de médecins femmes est considérable. Dans les tribunaux, le nombre des femmes juges ou avocates est également élevé. Dans les services publics, la proportion des employées femmes est remarquable. Dans l’aviation civile et militaire, l’effectif des femmes algériennes pilotes est notable.

Pour conclure. Dans certains pays, notamment en Algérie, le voile n’est synonyme ni d’avilissement, ni d’abêtissement. Tout comme la mini-jupe ne symbolise pas la liberté et l’émancipation de la femme. En réalité, sous le capitalisme, la femme musulmane voilée comme la femme occidentale «légèrement vêtue» sont toutes les deux exploitées, opprimées et aliénées. Néanmoins, la femme occidentale est persuadée d’être plus libre et émancipée que la femme musulmane. Probablement parce qu’elle exhibe publiquement ses jambes ? Ou parce qu’elle dévore passionnément le jambon ?

K. M.

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