Trafic de produits « laitiers sidérurgiques » : L’ex-PDG de Sider El-Hadjar (Annaba) sous mandat de dépôt

Le pôle pénal spécialisé dans la lutte contre les crimes financiers et économiques près le tribunal de Sidi M’hamed à Alger a ordonné, dans l’après-midi d’avant-hier, jeudi 7 août, le placement en détention provisoire de l’ex-P.-D.G. de Sider El-Hadjar – aujourd’hui rebaptisé Al-Solb El-Hadjar – Lotfi-Kamel Mana. Un responsable du service commercial ainsi qu’un chef […] The post Trafic de produits « laitiers sidérurgiques » : L’ex-PDG de Sider El-Hadjar (Annaba) sous mandat de dépôt first appeared on L'Est Républicain.

Août 9, 2025 - 05:13
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Trafic de produits « laitiers sidérurgiques » : L’ex-PDG de Sider El-Hadjar (Annaba) sous mandat de dépôt

Le pôle pénal spécialisé dans la lutte contre les crimes financiers et économiques près le tribunal de Sidi M’hamed à Alger a ordonné, dans l’après-midi d’avant-hier, jeudi 7 août, le placement en détention provisoire de l’ex-P.-D.G. de Sider El-Hadjar – aujourd’hui rebaptisé Al-Solb El-Hadjar – Lotfi-Kamel Mana. Un responsable du service commercial ainsi qu’un chef d’entreprise privée ont également été écroués. Les trois mis en cause sont accusés d’avoir conclu un contrat suspect de fourniture de produits dits « laitiers sidérurgiques » – matières minérales artificielles issues de la fonte (laitiers de haut-fourneau) ou de l’acier (laitiers d’aciérie), obtenues à près de 1.500 °C – au profit d’une société privée, pour exportation vers la France. Ils sont poursuivis, entre autres, pour octroi de privilèges injustifiés et participation au détournement de deniers publics. Ce nouveau scandale survient au moment où l’usine Al-Solb El-Hadjar, qualifiée « d’abri social », traverse une crise profonde : arrêt total de la production et colère sociale. En effet, depuis plus d’un mois, la zone chaude du complexe sidérurgique d’El-Hadjar est totalement à l’arrêt. En cause : l’absence de coke, matière première indispensable, et une trésorerie au bord du gouffre. Face à l’impasse, la direction s’oriente vers des solutions d’urgence, au prix de lourdes conséquences financières. Pendant ce temps, les 5.900 travailleurs sombrent dans l’incertitude, sans information ni soutien. Le complexe sidérurgique Al-Solb, autrefois fleuron de l’industrie lourde algérienne sous le nom de Sider El-Hadjar, traverse, selon les cadres de l’usine, l’une des périodes les plus sombres de son histoire. Depuis plus d’un mois, l’ensemble de la zone chaude : haut fourneau, PMA (Préparation des Matières et Agglomérés), ACO1 (Aciérie à Oxygène1), ACO2 (Aciérie à Oxygène2) et ACE (Aciérie Electrique) est à l’arrêt total. En cause, selon la même source, « la non-disponibilité du coke, une matière essentielle au fonctionnement du haut fourneau ». « Cet arrêt brutal révèle surtout une situation financière extrêmement critique. Pour la première fois depuis sa création, le complexe ne dispose plus des moyens nécessaires pour importer le coke en quantité suffisante », indique-t-on.

Mécontentement croissant des travailleurs

Pour éviter la paralysie totale de l’activité, la direction générale a fait appel aux sidérurgistes Tosyali et AQS (Algerian Qatari Steel) afin de se procurer des semi-produits (brames et billettes) destinés à alimenter les laminoirs. Une manœuvre qui permet certes de relancer partiellement la production, mais dont la viabilité économique est vivement critiquée. D’après plusieurs cadres du complexe, ainsi que d’anciens responsables aujourd’hui à la retraite, cette solution risque de creuser davantage le déficit. Les semi-produits sont achetés à des prix élevés et non concurrentiels, et l’opération est financée par un crédit bancaire assorti d’intérêts. À terme, elle pourrait ne pas générer de bénéfices et alourdir la dette cumulée. Sur le plan social, le climat est tout aussi préoccupant. Les quelque 5.900 travailleurs du site expriment de plus en plus leur mécontentement, dénonçant un manque total de communication et de perspectives. Les ouvriers de la zone chaude, en particulier, redoutent une réaffectation vers les laminoirs, avec une surcharge de travail pour une durée indéterminée, sans explication ni garantie. Le syndicat, dont le mandat touche à sa fin, est vivement critiqué pour son absence et son silence, alors que les inquiétudes grandissent. Quant à la direction générale, elle reste mutique, incapable de rassurer ou de proposer un plan de sortie de crise.

Une industrie à la dérive ?

Ce nouvel épisode illustre la crise profonde que traverse un complexe sidérurgique autrefois stratégique pour l’économie nationale. Entre dettes, dépendance aux importations, absence de vision et malaise social, l’usine Al-Solb semble prise dans une spirale inquiétante. Pour les observateurs du secteur, seule une refonte structurelle, accompagnée d’une stratégie industrielle claire, pourrait permettre de redonner un avenir à ce pilier historique de l’industrie algérienne. Faut-il rappeler que pas plus tard qu’en novembre 2024, plus de 444 tonnes de déchets de sulfate de fer classés dangereux avaient été vendues sans l’approbation du ministère de l’Environnement. Une affaire qui avait éclaté, rappelle-t-on, moins d’un mois après que l’ex-P.-D.G. de Sider El-Hadjar, en l’occurrence Karim Boulaioune, a été interpellé et incarcéré pour avoir conclu des contrats illégaux avec un homme influent, connu sous le pseudonyme de « Nounou Manita ». Plusieurs autres hauts cadres de l’ex-Sider El-Hadjar étaient impliqués dans cette affaire, dont les faits remontent à l’année 2022. Il s’agit de la vente de déchets de sulfate de fer, classés « dangereux » et placés sous le symbole « 6.1.11 », autrement dit, selon le code maritime international des marchandises, des « substances toxiques et infectieuses ». Selon les éléments de l’enquête menée par la brigade financière du groupement de la gendarmerie d’Annaba, cinq hauts cadres sont mis en cause dans cette affaire, à savoir l’ancien P.-D.G., M. L.-K., le chef du département de l’environnement de l’usine L. H., l’ancien directeur des ventes R. W., le chef de service des prestations B. F. et enfin D. S., l’actuel chef du service des ventes. Ils sont poursuivis pour la commercialisation, sans approbation ministérielle, de plus de 444 tonnes de déchets de sulfate de fer dangereux.

Par B. Salah-Eddine

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