Cimes des babors dans la wilaya de Béjaïa: Randonnée sur les hauteurs de Tizi N’Berber
Les randonneurs «Les Cimes des Babors» continuent à nous faire découvrir les différentes contrées de notre pays. Vendredi dernier, le tour était venu pour les hauteurs de la commune de Tizi N’Berber. Par Hafit Zaouche Le rendez-vous était donné à 7h au niveau de l’ancienne poste d’Aokas. Le but des randonneurs était d’atteindre le sommet […]
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Les randonneurs «Les Cimes des Babors» continuent à nous faire découvrir les différentes contrées de notre pays. Vendredi dernier, le tour était venu pour les hauteurs de la commune de Tizi N’Berber.
Par Hafit Zaouche
Le rendez-vous était donné à 7h au niveau de l’ancienne poste d’Aokas. Le but des randonneurs était d’atteindre le sommet «Issek» qui culmine à
1 742 mètres. Issek est le troisième plus haut sommet de la wilaya de Béjaia, après celui de Takoucht et de Takintoucht
Nous avons pris un fourgon qui nous a menés vers le village Agni Messaoud, en passant par plusieurs autres dont Amerzag, Medkour, chef-lieu de la commune de Tizi N’Berber, Tazrourt, Bouamara et enfin Agni Messaoud, notre destination pour commencer l’aventure. Nous avons pris les chemins qui montent, sentant que nous prenions de l’altitude… Nous nous arrêtons parfois pour apprécier le paysage idyllique qui était au-dessous de nous. Nous avons une vue imprenable sur les villes de Béjaia, Tichy et Aokas.
Akhroub, le Colorado de la chaîne des Babors
Notre guide du jour a choisi le parcours qui passe par le Akhroub. L’émerveillement était grand dès que nous avons aperçu une carte postale qui nous a fait voyager dans les majestueuses montagnes du Colorado… Non ! Non ! Vous n’êtes pas au Colorado mais en Kabylie et ces imposantes montagnes qui ont de l’âme… des montagnes qui nous ont protégés contre tous les envahisseurs… les montagnes kabyles qui nous parlent… Qu’attend Nicolas Hulot pour visiter et faire connaître cette partie de la planète aux terriens ? Un débat a eu lieu entre les randonneurs, et tout le monde s’est accordé à dire que ce coin paradisiaque de la planète mérite d’être connu mondialement. On s’est demandé pourquoi les amis de la nature comme Nicolas Hulot ne réalisent pas de reportages sur Akhroub, Issek pour les faire découvrir au reste des habitants de la terre.
Tizi N’Berber et l’histoire
Durant notre parcours, nous avons découvert plusieurs grottes utilisées durant notre glorieuse guerre de Libération par nos valeureux maquisards. Notre guide a insisté pour que nous les visitions. La première action contre le colonialisme français au niveau de la région d’Aokas a eu lieu à Tiboualamine. Issek est sacré et chacune de ses pierres à une histoire avec nos maquisards et sa terre est arrosée par leur sang. Issek est magique et plein d’histoire !
Tizi N’Berber ou la zone interdite, le nom donné par le colonialisme à cette région qui s’est opposée farouchement à l’idée d’une Algérie française. La population de cette région s’est mobilisée avec peu de moyens mais avec un grand nationalisme. Les Français ont eu recours à des méthodes de plus en plus coercitives. L’armée française brûlait les villages et déclarait les autres zones interdites. La torture est largement utilisée, des arrestations… toutes ces pratiques ont motivé davantage la population de cette glorieuse région de rejoindre le maquis et de livrer des batailles contre l’ennemi. Plusieurs embuscades et attentats contre le colon sont perpétrés, non seulement à travers le territoire communal mais tout le pays. Cette commune a donné naissance à plusieurs personnalités historiques. Des villages de la commune ont été détruits et les vestiges sont toujours là pour témoigner de la grande histoire de la commune de Tizi N ‘Berber.
Le village traditionnel
«Un peuple sans histoire est comme un arbre sans racines». Les nombreux châteaux que comptent la France et la Grande- Bretagne sont là pour témoigner que ces deux pays ont eu leur propre architecture et leur propre culture. Ils sont là aussi pour témoigner du génie des peuples anglais et français. Les pyramides témoigneront à jamais de la grandeur des pharaons. Qui sont les témoins de notre grandeur ? Qu’a-t-on a donné à l’humanité ? À Aokas, on évoque souvent avec fierté «le cCâteau de la comtesse» et «Tourneau», alors qu’ils sont tous les deux les œuvres des Français ! Ils sont là pour nous dire que la France est passée par là. Comme c’est le cas pour les nombreuses ruines romaines que comptent l’Algérie. Timgad (Batna), Madaures (Souk Ahras), Djemila(Sétif), ces ruines sont une preuve tangible du génie des Romains et démontrent aussi l’étendue de leur empire. Il y a un problème de taille en nous, celui de très mal estimers nos œuvres et nos réalisations. Nous aimons ce qui vient d’ailleurs plus que ce qu’on produit chez nous. A quoi est dû cela ? Peut- être au manque de confiance en soi ! Qui n’a pas vécu ou, au moins, a des parents qui ont vécu dans une maison traditionnelle kabyle ? Un village traditionnel kabyle est un ensemble de maisons construites avec des pierres et de la boue. Avec ces matériaux qui ont l’air dérisoires et primitifs, elles ont résisté au temps et sont toujours là pour nous rappeler le génie de nos ancêtres. Le village traditionnel kabyle démontre aussi le sentiment de méfiance chez le Kabyle, qui a été toujours colonisé et maltraité. Cet ensemble de maisons qui ont des murs et des portes en commun démontre combien les Kabyles sont profondément socialistes. Malheureusement, l’architecture européenne a pris la place de l’architecture kabyle. Les villages traditionnels ont presque disparu, un nombre très réduit existe encore dans les différentes contrées de la kabylie. À Aokas, il y a le village «Ighil Wireme» qui est resté intact pour nous dire haut et
fort : «Aokas était et restera une terre des Berbères». Ighil wireme est un véritable patrimoine architectural à préserver. Avec l’aide des services concernés, il deviendra une véritable attraction touristique et une réelle source de revenus. Militer pour que Ighil Wireme devienne un patrimoine national, voire même international pour que l’Uneesco contribue à sa sauvegarde est un devoir de mémoire…
L’aventure pour atteindre le mont Issek continue…
La fatigue commence à s’installer sérieusement mais il est hors de question d’abdiquer ou faire marche arrière… Pour oublier les chemins difficiles que nous devions emprunter, on se consolait par le paysage champêtre autour de nous. On se permettait quelques ruses pour cacher notre fatigue en se cachant à chaque fois derrière la prise de photo et l’équipe était obligée de vous attendre (rires).
Nous avons beaucoup sué et pour oublier la fatigue on revenait aux différentes légendes racontées sur issek.
En cours de route, nous avons trouvé des morceaux de fer, montrant que cette montagne est riche en fer et autres minerais sûrement.
Nous avons appris aussi de la part des vieux de la région que la montagne Issek recèle de l’or, du diamant… Des recherches doivent être entamées dans ce sens..
Atteindre le sommet d’Issek, une fierté
Les derniers mètres avant d’atteindre le sommet d’Issek furent les plus pénibles. Nous avions épuisé presque toute notre énergie. 14 heures et nous n’avions pas encore atteint la gloire. Une randonnée qui a commencé à 8 heures du matin, ce qui fait 6 heures de route sur des chemins très accidentés. Pas facile à tenir, mais la volonté de dépasser ses limites était là. L’esprit de groupe était présent, on s’encourage mutuellement… Nous sommes au sommet ! Quel exploit ! Notre joie était indescriptible lorsqu’on a atteint le sommet d’Issek. Dece sommet vous avez une vue de 360 degrés, rien ne gênera votre horizon. Depuis Issek, tous les sommets de la chaîne des Babors sont visibles. Vous
allez avoir le vertige puisque vous ne saurez pas par quoi commencer ? Vous avez une vue imprenable sur les villes de Béjaia, Tichy, Aokas, Souk El Tenine, Melbou, Ait Smail, Bouandes, Taskriout…
Un téléphérique s’impose
Nous n’av ons pas le droit de priver des millions de personnes du panorama sublime qu’offre le sommet Issek. Les autorités du pays doivent se mettre sérieusement au travail afin de développer le tourisme. Les professionnels du tourisme doivent sortir de leurs bureaux et trouver des solutions concrètes afin de donner vie à ce secteur névralgique. Un téléphérique pour atteindre Issek est une urgence ! Un téléphérique qui développera le tourisme au niveau de cette majestueuse montagne.
Les parcours doivent être balisés…
Nous ne pourrons pas guider une équipe pour refaire le même parcours puisqu’il n’est pas balisé. Les services des forêts et du tourisme doivent travailler en étroite collaboration pour dégager des parcours sûrs et surtout les baliser, comme cela se fait ailleurs dans les pays qui respectent la forêt et la montagne. Ils doivent penser aussi à des issues de secours et l’implantation de cabanes pour permettre aux randonneurs de passer la nuit.
Notre ami randonneur Youcef a bien résumé cette randonnée vers Issek, écrivant : «Ce n’était pas une randonnée ordinaire, mais une épreuve de force.
Un véritable défi contre une nature des plus hostiles. Je m’en souviendrai toujours et y tirerai une fierté assez particulière.
Nous avons bravé les hauteurs et les distances avec un esprit de groupe et avec des décisions collégiales. C’est le secret de toutes les recettes réussies».
H. Z.