Quand la France fusillait ses Boualem Sansal pour «indignité nationale» (I)
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Une contribution d’Ali Farid Belkadi – «Je me suis mis à écrire comme on enfile une tenue de combat.» Ce sont-là les propos belliqueux de l’artisan écrivain Boualem Sansal qui vaque à ses pages blanches comme les stipendiés indigènes allaient à l’assaut de leurs compatriotes, au temps des pogroms de l’Algérie française.
Macron, pour le meilleur et pour Shakespeare
«L’Algérie entre dans une histoire qui la déshonore», a déclaré le président Emmanuel Macron, lors de la conférence des ambassadeurs, lundi 6 janvier, en évoquant avec une insolence calculée l’arrestation à Alger de l’auteur Boualem Sansal qui est algérien, comme l’affirme celui-ci durant son voyage ambigu à Jérusalem.
«L’Algérie que nous aimons tant et avec laquelle nous partageons tant d’enfants et tant d’histoires entre dans une histoire qui la déshonore, à empêcher un homme gravement malade de se soigner. Ce n’est pas à la hauteur de ce qu’elle est», avait-t-il dit devant les ambassadeurs réunis à l’Elysée, en ajoutant : «Je demande instamment à son gouvernement de libérer Boualem Sansal […]. Ce combattant de la liberté est détenu de manière totalement arbitraire par les responsables algériens», selon Emmanuel Macron.
Le 30 juillet 2024, Emmanuel Macron avait ouvert la boîte de Pandore en adressant au roi du Maroc une lettre officielle à l’occasion de la «fête du trône» qui marquait les 25 ans de l’accession au pouvoir de ce dernier. Dans cette lettre, le président français affirmait que le «plan marocain concernant le Sahara Occidental constitue désormais la seule base pour aboutir à une solution politique». En clair, cela signifiait que la France prenait ses distances vis-à-vis de l’Algérie. On est loin de la visite en 2022 d’Elisabeth Borne, alors Première ministre, accompagnée de seize membres de son gouvernement à Alger.
Ainsi, le président Macron, à la suite de sa reconnaissance problématique de la marocanité du Sahara Occidental, vient de commettre une ingérence inconvenante dans une affaire privée algérienne, après des effusions exubérantes maintes fois manifestées en public lors de ses précédents séjours à Alger, dont la France et l’Algérie se réjouissaient.
Pour vivre en sérénité avec tout le monde, il suffit de ne pas s’emmêler les pinceaux dans les affaires d’autrui.
De son côté, le ministre des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot avait jugé auparavant, le 27 novembre, «tout simplement inacceptable la détention d’un écrivain français».
Ecrivains français condamnés à mort et fusillés
Parmi les écrivains français qui ont été condamnés à l’oubli ou à la relégation, suite à leur condamnation honteuse pour collaboration avec l’Allemagne nazie, certains ont été condamnés à mort et fusillés. Parmi eux :
- Robert Brasillach, écrivain et journaliste. Il a été fusillé le 6 février 1945 au fort de Montrouge.
- Paul Chack, écrivain et officier de marine, qui présida jusqu’en 1944 un prix littéraire au titre révélateur : Prix de la France aryenne. Arrêté à la fin de la guerre et condamné à mort, il sera fusillé le 9 janvier 1945, pour avoir donné l’ordre à des Français de s’enrôler dans l’armée allemande.
- Lucien Rebatet, écrivain et nazi jusqu’au bout des ongles, il collabore au journal Je Suis Partout, où il excelle dans les formules du genre : «D’une façon ou d’une autre, la juiverie offre l’exemple unique, dans l’histoire de l’humanité, d’une race pour laquelle le châtiment collectif soit le seul juste». Condamné à mort par la résistance, il fuit à Sigmaringen où il retrouva Céline et d’autres collaborateurs de l’Allemagne nazie. Le 8 mai 1945, il est arrêté en Autriche. Condamné à mort en 1946, il est gracié en 1952 après 7 ans de prison.
- Henri Béraud, écrivain, est condamné à mort puis gracié, sa peine sera commuée à vingt ans de travaux forcés, puis à dix ans de réclusion. Malade, il sera libéré en 1950.
- Alphonse de Châteaubriant, écrivain, fasciné par le nazisme. Il fonde une revue littéraire et politique en juillet 1940, à laquelle collaboreront Jean Giono, Paul Morand, Jean Cocteau, Marcel Aymé, Sacha Guitry. A la fin de la guerre, il se réfugie en Allemagne puis en Autriche. Il est condamné à mort par contumace.
- Abel Hermant, écrivain, est condamné à perpétuité pour collaboration avec l’Allemagne en 1945, il sera exclu de l’Académie française puis gracié et libéré en 1948.
D’autres encore.
La poutre et la paille
«Pourquoi vois-tu la paille qui est dans l’œil de ton frère et n’aperçois-tu pas la poutre qui est dans ton œil ?» (Evangile de Luc, 6, 41).
Boualem Sansal, citoyen algérien lambda, a transgressé les lois en vigueur dans son pays, où il est poursuivi en vertu de l’article 87 bis du code pénal, qui sanctionne «comme acte terroriste ou subversif, tout acte visant la sûreté de l’Etat, l’intégrité du territoire, la stabilité et le fonctionnement normal des institutions».
A Jérusalem, en guise de laisser-passer pour visiter la mosquée Al-Aqsa interdite aux non-musulmans, Boualem Sansal a présenté avec orgueil son passeport vert. Il est donc algérien.
N’est-ce-pas lui, algérien depuis 75 ans et français de la dernière averse, qui écrivait dans son texte paru le 25 mai 2012, dans Identité juive, «je suis allé à Jérusalem et j’en suis revenu heureux et comblé» ? Il poursuit : «En tant que juifs ou chrétiens, mes compagnons, les autres écrivains du festival, ne pouvaient pas accéder à l’Esplanade des Mosquées, le troisième Lieu saint de l’islam où s’élèvent le Dôme du Rocher. Ils furent repoussés sans hésitation par l’agent du Waqf, gestionnaire des lieux, assisté de deux policiers israéliens chargés de garder l’entrée de l’Esplanade et la préserver de tout contact non halal. Moi, je suis passé grâce à mon passeport algérien qui, par déduction, dit que je suis musulman. Je n’ai pas démenti, au contraire, j’ai récité un verset coranique tiré de mes souvenirs d’enfance, ce qui a carrément stupéfié le gardien, c’était la première fois de sa vie qu’il voyait un Algérien […]. Mon petit passeport vert m’a ouvert la frontière des Lieux saints plus vite qu’il ne m’ouvre la frontière Schengen en Europe où la simple vue d’un passeport vert réveille aussitôt l’ulcère des douaniers.»
La France a la mémoire courte : Céline et l’indignité nationale
Le président français Macron, indifférent à l’indignité dont furent frappés l’écrivain Louis Ferdinand Céline et les écrivains cités plus haut durant la Seconde Guerre mondiale, n’est captivé que par l’affaire Sansal.
Proche des milieux de la collaboration et du service de sécurité nazi, Louis Ferdinand Céline, qui est connu notamment pour sa haine des juifs qu’il dénonçait sournoisement par lettres aux occupants allemands, fut déchu et condamné à la dégradation er à l’indignité nationale.
L’indignité nationale en France pour les nuls
«Le concept d’indignité nationale […] répond à l’idée suivante : tout Français qui, même sans enfreindre une règle pénale existante, s’est rendu coupable d’une activité antinationale caractérisée s’est déclassé ; il est un citoyen indigne dont les droits doivent être restreints dans la mesure où il a méconnu ses devoirs.»
A la fin de la guerre, Louis Ferdinand Céline sera frappé d’indignité nationale et déchu de ses droits civils : «La mort civile emporte la perte de tous les biens du condamné, lesquels sont acquis au souverain à titre de confiscation. La personne morte civilement ne peut recueillir et transmettre à titre de succession ; elle ne peut disposer de ses biens […]», etc. (Steinmetz, 1999 ; Carbasse, 2006, p. 306-307).
Céline, quelques fragments
«Pleurer, écrit-il, c’est le triomphe des juifs ! Réussit admirablement ! Le monde à nous par les larmes ! 20 millions de martyrs bien entraînés c’est une force ! Les persécutés surgissent, hâves, blêmis, de la nuit des temps, des siècles de torture.»
«C’est la présence des Allemands qu’est insupportable. Ils sont bien polis, bien convenables. Ils se tiennent comme des boys scouts. Pourtant, on ne peut pas les piffer. Pourquoi, je vous demande ? Ils ont humilié personne. Ils ont repoussé l’armée française qui ne demandait qu’à foutre le camp. Ah, si c’était une armée juive, alors comment on l’adulerait !»
«Lorsque Hitler a décidé de purifier Moabit à Berlin (leur quartier de la Villette), il fit surgir à l’improviste dans les réunions habituelles, dans les bistrots, des équipes de mitrailleuses et par salves, indistinctement, tuer tous les occupants ! […] Voilà la bonne méthode.»
Dans une lettre au docteur Walter Strauss, L.-F. Céline écrit : «Je viens de publier un livre abominablement antisémite, je vous l’envoie. Je suis l’ennemi numéro 1 des juifs.»
«Les juifs, racialement, sont des monstres, des hybrides, des loupés tiraillés qui doivent disparaître. […] Dans l’élevage humain, ce ne sont, tout bluff à part, que bâtards gangréneux, ravageurs, pourrisseurs. Le juif n’a jamais été persécuté par les Aryens. Il s’est persécuté lui-même. Il est le damné des tiraillements de sa viande d’hybride.»
Les Arabes et les Noirs dans le même panier
Ses dons exceptionnels de vociférateur ont été parfois adressés sans ménagement aux Arabes et aux Noirs. Il écrit en 1940 : «Zone sud, zone peuplée de bâtards méditerranéens dégénérés, de nervis, félibres gâteux, parasites arabiques que la France aurait eu tout intérêt à jeter par-dessus bord. Au-dessous de la Loire, rien que pourriture, fainéantise, infects métissages négrifiés.»
Alphonse de Châteaubriant, Jean Marquès-Rivière pareillement.
L’écrivain Alphonse de Châteaubriant, né à Rennes et mort en exil le 2 mai 1951 à Kitzbühel, en Autriche, fut de même un intellectuel actif de la collaboration durant l’occupation de la France par l’Allemagne nazie. Parmi les autres et innombrables collaborateurs de l’Allemagne nazie jugés indignes d’être français, on retrouve Jean-Marie Rivière, dit Jean Marquès-Rivière, orientaliste, essayiste, journaliste et scénariste français. Ce qui lui vaut d’être condamné à mort par contumace et çà la dégradation nationale en 1949.
100 000 collabos de la pire espèce en France en 39-45
La collaboration ne se limitait cependant pas aux sphères littéraires. En 1945, le service de contre-espionnage de l’armée française dressait une liste de 100 000 personnes ayant collaboré avec l’occupant nazi. L’historien Dominique Lormier, qui a pu accéder à ce fichier de la collaboration française avec l’Allemagne nazie, en a fait un livre au contenu explosif : Les vérités cachées de la Libération, paru aux éditions du Rocher.
Pour moi, Boualem Sansal, par son appréciation débridée de la réalité algérienne, est un maître-collaborateur assesseur des forces ténébreuses de l’expansionnisme colonial.
Liberté d’expression sélective
Il y a quelques années, au cours du mois de décembre 2017, l’éditeur Gallimard projeta de publier un volume regroupant les pamphlets antisémites de Céline, Bagatelles pour un massacre, L’école des cadavres et Les beaux draps, sous le titre Ecrits polémiques et accompagné d’un apparat critique établi par Régis Tettamanzi, professeur de littérature française du XXe siècle à l’université de Nantes. Une vive controverse s’ensuivit qui conduisit Gallimard à suspendre son projet, les juifs de France s’y opposant. On remet tout ça dans les tiroirs et on n’en parle plus.
Cet éditeur acharné enrôleur d’auteurs allogènes, en rupture de ban avec leurs origines, n’a aucunement soulevé le concept de «liberté d’expression», à ce moment-là. Le projet de Gallimard fut le plus simplement au monde annulé : «Au nom de ma liberté d’éditeur et de ma sensibilité à mon époque, je suspends ce projet, jugeant que les conditions méthodologiques et mémorielles ne sont pas réunies pour l’envisager sereinement», indiqua alors Antoine Gallimard dans un communiqué.
N’est pas Louis Ferdinand Céline qui veut
Du côté de la fachosphère au nom de la liberté d’expression sélective, on se réjouit de la publication des livres de Sansal qui flétrissent l’Algérie, l’islam et l’immigration, de préférence algérienne. Dès sa première publication chez Gallimard, Boualem Sansal reçut de cet éditeur une commande de quatre livres. Un record, suivi d’une rare performance de l’auteur, qui redoubla de férocité dans son entreprise de démolition plumitive avec un rare acharnement. Par contre, on interdit les livres de Louis Ferdinand Céline pour ne pas choquer une certaine frange susceptible de la société.
Manque de cohérence
Il faut être cohérent. Le pire aveugle est celui qui ne veut pas voir.
D’un côté, nous avons tous ces écrivains français, Robert Brasillach, etc., qui sont châtiés, emprisonnés, condamnés à mort et exécutés pour avoir porté atteinte à l’honneur et à l’intégrité de la France dans les années 1940 et, de l’autre côté, Boualem Sansal, ce vieil écrivain, fraîchement naturalisé français, retraité du ministère de l’industrie de l’Algérie où il est né, où il a toujours vécu jusqu’à l’âge de 75 ans, qui agit de la même façon que les collabos cités plus haut. Cela n’est-il pas incohérent ou contradictoire ?
Selon la Cour européenne des droits de l’Homme, à laquelle adhère la France d’Emmanuel Macron, la liberté d’expression peut être limitée pour des motifs d’intérêt général, comme la sécurité nationale, la sûreté publique ou encore l’intégrité du territoire. Tout en affirmant la liberté d’expression, l’article 11 de la DDHC en pose les limites : «Tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi.»
C’est ce qui est très exactement reproché à Boualem Sansal par les autorités algériennes.
Durant le règne du roi Louis IX, plus connu sous le nom de Saint-Louis (de 1226 à 1270), quiconque était surpris à tenir des propos insultants contre la religion, autrement dit à blasphémer contre Dieu, était fouetté et attaché au pilori, le cou entouré de boyaux et de fressure de porc. De nos jours, il n’est pas interdit de blasphémer en France, fille ainée de l’Eglise, il est même conseillé de le faire pour raffermir la liberté d’expression.
En Algérie, ces choses-là ne se font pas.
Par contre, le droit français qui ne connaît aucune répression du blasphème, considère la diffamation, l’injure, et les provocations à la discrimination, à la haine ou à la violence comme des infractions punissables par la loi.
Le soldat Boualem Sansal, qui s’est rendu coupable d’une activité antinationale caractérisée, doit assumer ses erreurs, ses errances et ses errements, formulés dans ses livres et braillés dans ses déclarations publiques.
Sansal rappelle le personnage Lucien Chardon
Boualem Sansal, cet auteur «affable et angélique», selon ses adorateurs et ses admiratrices, dont la plupart ignorent les titres et le contenu de ses livres, évoque à s’y méprendre le personnage de l’écrivain austro-hongrois de langue allemande Franz Kafka, qui est mis en prison sans trop savoir pourquoi, qui est passé devant le tribunal en ignorant toujours la raison de son procès, qui se heurte ingénument à l’incohérence d’une justice truquée.
Mais c’est plus particulièrement à Honoré de Balzac que va ma préférence. Il a consacré un livre entier au personnage complotant Lucien de Rubempré, alias Lucien Chardon, dans lequel celui-ci acquiert une certaine notoriété grâce à ses talents de barde. Il devient écrivain à gages, choisit l’éloge pour certains ou la satire pour d’autres, selon ce qu’on lui paie à la commande, pour des miettes de gloire. Finalement, il court à sa perte parce que personne n’a jamais mis le frein à ses égarements.
Certains ont assimilé à tort Sansal à Voltaire. Sauf que Voltaire comme on le sait, s’est repenti tardivement, vers la fin de sa vie, de ses méchants écrits contre l’islam et les musulmans. Sansal, lui, à 75 ans, atteint d’une maladie incurable, persiste et signe, avec une rare férocité.
Délivrer le soldat Sansal
Le pompon dans cette scabreuse affaire menée tambour battant contre l’Algérie par la droite et la fachosphère en France, va à un valétudinaire ex-ambassadeur de France en Algérie, qui dit être peiné jusqu’aux larmes et perclus d’insupportables douleurs suite à l’arrestation de son ami Sansal. Faisant référence au détournement de l’avion d’Air France en 1994, il préconise de négocier avant de donner l’assaut (à l’Algérie) en employant la force, pour libérer Boualem Sansal de sa prison. Une réédition de 1830. Le coup de l’éventail version 2025. Un autre Sidi Fredj. Avec cet ambassadeur xénophobe dans le rôle du maréchal de Bourmont ou du général Bugeaud. Zorro pour faire plus simple.
«Nous sommes la voix de la France en Algérie, ne nous abandonnez pas !»
Un autre volet de Boualem Sansal, décidément très discret sur ses sournoises fréquentations est rapporté à son propos par cet ancien ambassadeur de France en Algérie qui se dit peiné. «Je suis peiné pour Boualem Sansal et peiné par le fait que j’avais invité à déjeuner notamment Boualem Sansal avec le président Macron (en 2017) lorsqu’il était venu en visite officielle à Alger. Boualem Sansal comme Kamel Daoud avaient dit au président de la République : Monsieur le président, nous sommes la voix de la France en Algérie, ne nous abandonnez pas !»
J’ai dit à cet ex-diplomate ce que je pensai de lui dans un texte paru dans des journaux en 2017, dont Algeriepatriotique. Mon seul regret rétrospectivement est de l’avoir affublé du titre d’excellence, une obligeance qu’il ne méritait pas.
Urbi et orbi
Depuis Le serment des barbares, Sansal est partout, on se le dispute urbi et orbi dans la mouvance fasciste et plus largement d’extrême-droite. On boit ses mots haineux sur Internet comme on siroterait un exquis rafraichissement au mois d’août. «Vos pensées sont les nôtres !» lui susurre-t-on à l’oreille, «vous êtes des nôtres !», «quel courage, bravo !». Ce conteur de fadaises de niveau café maure et café du commerce répète à l’envi ses récits de la dévastation de l’islam et du pays qui l’a vu naître, où tout, selon lui, est sens dessus-dessous, tout y est laid, ignoble, corrompu, crapuleux, exceptés le soleil et le morceau de mer de Boumerdès.
Ses écrits nous ramènent régulièrement au choc de la majestueuse civilisation européenne, à laquelle il adhère totalement, opposée à l’irréconciliable barbarie de ses compatriotes algériens, intégristes, ignorants et grossiers. Tout le monde parle de Sansal, y compris ceux qui ne l’ont jamais lu.
Les barbelés de guerre de la maison de Sansal à Boumerdès
Dans Secrets d’écriture, au journaliste de l’équipe du magazine Le Point dépêchée à Boumerdès, qui s’étonne que sa maison soit entourée de fils barbelés, ce conteur de fadaises répond : «J’étais très menacé, j’avais peur et tout bêtement, j’ai pensé que des barbelés de guerre allaient me protéger.»
Tout le monde était menacé par les criminels de la subversion wahhabite durant les années 1990. Pour consolider l’accès à leur domicile, beaucoup d’Algériens avaient installé par mesure de sureté une lourde porte métallique munie de barreaux et de plusieurs serrures renforcées pour les appartements ou des barbelés «de guerre» pour les villas et les maisons individuelles.
L’islamisme : un mot devenu péjoratif
L’islamisme, ce mot épouvantail, employé péjorativement, à tort et à travers en Occident de nos jours, et repris inconsidérément par Boualem Sansal, désignait l’islam dans toute son acception chez les auteurs français du début du XXe siècle. Au temps du poète Alphonse de Lamartine, on employait plutôt le substantif «mahométisme».
Les trois termes – islamisme, islam et mahométisme – avaient la même explication : «se soumettre à Dieu», «manifester son humilité vis-à-vis de Dieu» ou encore «s’abandonner à Dieu», «se résigner à Sa volonté».
Octave Houdas dans son livre L’Islamisme, paru en 1904, écrivait : «La religion que Mahomet prêcha en Arabie, au début du VIIe siècle de notre ère, porte en arabe le nom d’Islam. On emploie volontiers ce vocable tel quel en français, cependant, on lui donne le plus souvent la forme francisée islamisme.»
De nos jours, ce terme islamisme fait partie de la longue liste de mots en «isme», dont les derniers en date sont le «wokisme» et «inclusivisme», contrairement au judaïsme, au christianisme ou encore au bouddhisme qui ont conservé leur signification première. L’islamisme revu et corrigé par des aigrefins judéo-européens est ainsi devenu un mot-valise dans lequel se sont glissés furtivement une idéologie religieuse à caractère politique, le terrorisme le plus abject, le désordre social, ainsi que le chaos, avec pour credo : diviser le monde arabo-musulman pour y régner selon le modèle européen. La démocratie mise perfidement en exergue, avec en arrière-plan les richesses de ces pays, leurs matières premières et leur pétrole qui sont convoités.
C’est ainsi que fut fabriqué l’islamisme dans des officines occultes où pullulaient les devins, les oracles et les pythonisses. Comme certains confondent toujours sionisme et judaïsme, le mot «islamisme» a été échafaudé pour brouiller les pistes.
Sa naturalisation française annoncée
Boualem Sansal fait allusion à sa naturalisation française, page 17 de son livre Le village de l’Allemand ou le journal des frères Schiller, roman paru chez Gallimard : «Bienvenue parmi nous, ton décret est signé. Il m’a expliqué que son patron nous avait pistonnés en haut lieu. Il m’a invité dans un grand restaurant à Paris, du côté de Nation. Ce n’était pas pour fêter mes papiers, c’était pour me lire les devoirs qui vont avec.»
Des scribes dociles et obéissants
En France, certains éditeurs sont infatigablement en quête d’auteurs exotiques en rupture de ban, de préférence issus des anciennes colonies, algériens de préférence, du genre mutin irréductible, avec l’arrière-pensée de constituer une cohorte de scribes dociles et obéissants. Des Voltaire, des Chateaubriand et des Balzac en herbe, qui font leurs mots crottés là où on leur dit de faire. Des romanciers comme Boualem Sansal et l’inintéressant Kamel Daoud, dont l’écrivaillerie ne se prive pas de mélanger les catégories, ni à brouiller les fonctions grammaticales courantes. Passant du genre littéraire narratif description-dialogue et re-ainsi de suite jusqu’au mot fin, au sous-genre injurieux, offensant, outrageant, pourvu qu’ils soient disposés à se laisser manier. L’islamisme est un placement qui rapporte, mieux que le CAC 40. Ceci en échange d’un contrat d’édition mirifique et quelques miettes de notoriété, l’objectif non avoué étant d’harasser leur pays d’origine et d’accabler leurs concitoyens musulmans, comme on faisait la chasse aux crouillats jadis, voire plus loin encore, aux Arabes musulmans, au temps des Croisades.
Deux stipendiés de la plume forgeurs de romans blancs-seings, approvisionnés en prix complaisants, qu’on leur apporte dans leur niche, qui leur ont été discrètement réservés avant de leur être discernés en grande pompe pour rétribuer leur obéissance.
Les personnages tarés de Jean-Paul Sartre et Gustave Le Clézio
Les éditeurs ont leurs auteurs souffreteux, comme Jean-Paul Sartre qui créa le personnage suranné Erostrate dans Le mur, Erostrate emprunté à Hérostrate qui incendia le temple d’Artémis à Ephèse ou encore Jean-Marie Gustave Le Clézio qui inventa Adam Polo pour les besoins de son livre Le procès-verbal. Les lecteurs en Occident raffolent de personnages psychopathes, déments, forcenés. Furibonds, déchainés, givrés. Ces tarés sont omniprésents dans les livres malsains de Boualem Sansal et Kamel Daoud, deux pourfendeurs de l’islam à la mode européenne.
Assia Djebbar, Mouloud Mammeri et Kateb Yacine, ce n’était pas cela. On y racontait les valeurs de nos chers bourgs et villages avant l’apparition du colon.
Il se dit «juif culturel»
Grandi dans une synagogue, Boualem Sansal veut que l’on ferme les mosquées. Après avoir affirmé que l’islam était le mal de notre temps. «Si je devais choisir un seul mot pour dire le mal de notre temps, je dirais islam. Aucun phénomène n’a autant transformé le monde, ne l’a autant bouleversé, défiguré, perverti, terrifié.»
A l’âge où l’on est encore bébé, le rabbin de Belcourt qui lui tape déjà sur l’épaule, ils sont devenus copains. Un miracle digne de Jérusalem, un vieux rabbin qui devient le copain d’un bébé, on n’a jamais vu ça ! Il lui apprend peu à peu la Bible, dit-il, au point où il devient un grand lecteur de la Bible, voire du Talmud de Jérusalem ou celui de Babylone. Il s’applique à jouer le personnage qui frappe l’imagination des foules. Il s’exerce à corriger sa prononciation d’Arabe de Boumerdès défectueuse. Il y introduit des «truc» et des «machin». Avec, comme toujours, le sourire narquois de commande.
Jamais aucun écrivain algérien n’a bénéficié d’autant de faveurs, de privilèges et de complaisances que l’auteur Boualem Sansal de la part des médias, tous supports confondus, journaux, plateaux de télévision, conférences, etc. Ceci bien avant son arrestation à l’aéroport d’Alger. Il est partout. Un véritable don d’ubiquité. Jamais aucun écrivain maghrébin n’a bénéficié d’autan de privilèges médiatiques mirobolants.
«Nous sommes les voix de la France en Algérie.»
Ce type est partout. Toutes les portes et les fenêtres des médias lui sont ouvertes depuis qu’il dit avoir grandi dans une synagogue de Belcourt et son voyage au Mur des lamentations. Il émarge à l’extrême-droite urbi et orbi. Il est sur YouTube, sur Dailymotion. Il se sent plus à l’aise avec les juifs qu’avec les autres, les Algériens, dit-il à ses amis du Crif. Il est partout, dans les moindres recoins du «www», une proie bien juteuse, qui cause sans contradicteurs, au nom de la liberté d’expression sélective qui consiste à démolir les immigrés en leur absence, l’islam et l’Algérie en fixant les musulmans algériens au fond des yeux, sans se troubler, avec son petit air de Molière en herbe qui persifle le Grand Turc.
Il ne parle nulle part de littérature dans ses propos désordonnés générateurs de mensonges et d’impostures. Nulle trace de la muse Clio. Elle ne l’intéresse pas. Ni les neuf muses pleines d’élégance et de finesse et de délicatesse, si chères à Mouloud Mammeri. Les envolées lyriques de Kateb Yacine sont absentes de son labeur. De même que la littérature savante, les beaux et bons mots des congrès, symposiums et colloques ne lui sont pas familiers.
Son objectif, abattre les mémoires collectives algériennes que ses lecteurs admiratifs s’empressent de ridiculiser aussitôt sur les forums du «www», ou ceux qui sont tombés de Charybde en Scylla font et refont leur petite et obsédante Algérie française.
L’affrontement avec son ADN de juif-arabe dément a fini par obscurcir complétement son esprit et son âme au point de ne plus savoir qui il est, ni d’où il vient, bulles d’épuisement, petites saillies et excroissances de néant, nœuds nécrosés et qui défont sa vie passée rue Darwin. Son compagnonnage chez l’Allemand.
La malchance a mis sur notre chemin un forcené qui se défoule sur l’Algérie comme un dément se raconte sur le canapé d’un psychanalyste. Freud n’a fait que transposer le Mur des lamentations sur un divan.
Parlons-en, de son écriture !
Le dément Boualem Sansal, enfant du néant et de la dissimulation, rédige ses livres avec le sentiment d’appartenir aux Lumières. Sur les plateaux de la télévision française, il est le héros positif opposé aux obscurantistes, aux sauvages et aux fanatiques musulmans.
Pour ceux qui l’ignorent, les «Lumières» désignent un mouvement culturel et philosophique né en Ecosse, qui finira par se répandre à l’Europe, avant de s’élargir à la France, au cours du XVIIIe siècle. Les membres de ce mouvement qui est censé avoir renouvelé le savoir en Occident, s’opposaient à l’église chrétienne, porteuse selon eux, d’obscurantisme et de superstition. La laïcité sournoisement opposée à l’islam, anciennement appelé mahométisme et islamisme, fera le reste.
Emmanuel Kant définit à sa façon ces fameuses lumières dont les autochtones algériens n’ont jamais vu les éclats ni les ombres sous le joug colonial : «Les Lumières, dit ce philosophe, c’est la sortie de l’homme hors de l’état de tutelle dont il est lui-même responsable. L’état de tutelle est l’incapacité de se servir de son entendement sans la conduite d’un autre. On est soi-même responsable de cet état de tutelle quand la cause tient non pas à une insuffisance de l’entendement, mais à une insuffisance de la résolution et du courage de s’en servir sans la conduite d’un autre.»
Le livre fabuleux de Sigrid Hunke, Le soleil d’Allah brille sur l’Occident nous invite à nous replonger dans cette civilisation arabo-musulmane qui a permis à l’Occident de faire un bond prodigieux de plusieurs siècles dans les domaines de l’architecture, de l’urbanisme, de la géographie, de l’astronomie, des mathématiques ou encore de la médecine.
On aura compris que la foi et la croyance n’ont pas droit de cité dans la doctrine de ces Lumières qui subjugue tant Boualem Sansal. Cela réaffirme rétrospectivement l’absence de toute perception du sentiment religieux en France, toujours affublée du titre surprenant de «Fille ainée de l’Eglise».
A.-F. B.
(Suivra)
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