Plus de 500 femmes victimes de violences par mois : Quand le silence devient complice  

En 2024, plus de 500 femmes par mois sont victimes de violences en Algérie, soit 16 femmes chaque jour, selon un rapport dressé par la DGSN. Malgré une prise de conscience croissante et des efforts pour sensibiliser, le silence reste une réalité troublante. Peur, honte et pression sociale maintiennent de nombreuses victimes dans l’ombre, rendant […] The post Plus de 500 femmes victimes de violences par mois : Quand le silence devient complice   appeared first on Le Jeune Indépendant.

Déc 18, 2024 - 00:54
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Plus de 500 femmes victimes de violences par mois : Quand le silence devient complice  

En 2024, plus de 500 femmes par mois sont victimes de violences en Algérie, soit 16 femmes chaque jour, selon un rapport dressé par la DGSN. Malgré une prise de conscience croissante et des efforts pour sensibiliser, le silence reste une réalité troublante. Peur, honte et pression sociale maintiennent de nombreuses victimes dans l’ombre, rendant la lutte contre ce fléau encore plus complexe.

L’entourage joue un rôle important dans la prise de parole des victimes. Trop souvent, les familles et les proches, par méconnaissance ou tradition, minimisent les souffrances. « Quand une femme parle, elle est parfois accusée de ternir l’image de la famille, cela l’empêche de dénoncer les abus », explique une militante d’une ONG locale. À l’inverse, un entourage bienveillant peut encourager les victimes à briser le silence.

La commissaire principale, Yasmine Khouas, cheffe du Bureau central de la protection des personnes vulnérables à la Direction générale de la Sûreté nationale (DGSN), a partagé, lors d’une journée d’information sur la question, un constat inquiétant concernant la violence faite aux femmes. En 2023, environ 446 femmes par mois étaient victimes de violences, soit environ 15 par jour. Parmi elles, deux à trois subissent de mauvais traitements, tandis que 11 autres sont victimes de coups et blessures (12 par jour). En 2024, une hausse de 12,39% a été observée, portant le nombre de cas mensuels à 501, soit 16 femmes par jour.

En 2023, les violences physiques étaient les plus fréquentes, avec 4 196 cas signalés, suivis de 25 homicides, 26 violences sexuelles, 42 cas de harcèlement sur la voie publique, 997 cas de mauvais traitements et 19 enlèvements. Les auteurs des violences sont souvent des membres proches de la famille : les époux étaient responsables de 1 892 cas, les frères de 154, les fils de 105, et d’autres membres de la famille de 647. Les étrangers étaient impliqués dans 2 519 cas, selon le même rapport.

Mme Khouas a souligné que les violences sexuelles et familiales sont également en hausse, les auteurs étant fréquemment des proches de la victime, tels que les pères, frères ou fils. « Paradoxalement, les époux semblent moins impliqués, mais les chiffres restent préoccupants », a-t-elle précisé. Et d’expliquer : « Nous devons d’abord éduquer la société, qui souvent néglige ce fléau. »

De son côté, la Gendarmerie nationale (GN) a établi un plan d’action pour la prévention et la lutte contre la violence faite aux femmes et se concentrer sur plusieurs axes-clés. Ce dernier exposé par le représentant de la GN, Mohammed Taha Meniai, lors de cette même journée, inclut la formation continue des agents pour les préparer à gérer efficacement les cas de violence et l’adaptation des structures et mécanismes face à toutes les formes de violence.

L’accent est mis sur le travail préventif et dissuasif, avec une coordination constante entre les différents acteurs. Pour faciliter les plaintes, des mécanismes de confidentialité sont en place, tels que le numéro vert 1055 et le site de signalement PPGN-MDN-DZ. M. Meniai a indiqué que la gendarmerie a reçu 76 000 appels via son numéro vert, entraînant la réalisation de 10 000 interventions.

 

Porter plainte pour se libérer

 

 Les espaces d’accueil sont aménagés pour garantir la confidentialité et offrir un environnement de soutien et de confiance. Des spécialistes en psychologie accompagnent les victimes, et elles sont orientées vers des services de santé et de soutien psychologique spécialisés. En cas d’agression grave, des soins d’urgence sont fournis, avec un transport immédiat vers les établissements de santé.

Les barrières de la dénonciation sont multiples : peur des représailles, dépendance économique, pression familiale, ou encore méfiance envers les institutions. Pourtant, porter plainte est une étape importante pour protéger les victimes et punir les auteurs. Le cadre législatif prévoit des dispositifs de protection et des sanctions strictes contre les agresseurs, mais leur efficacité repose sur une meilleure sensibilisation et une application rigoureuse.

Les associations, ONG et autorités intensifient leurs efforts pour accompagner les victimes. Des dispositifs d’accueil, d’accompagnement psychologique et juridique existent, mais restent sous-utilisés faute d’information. L’État, conscient de l’urgence, soutient ces initiatives pour créer un environnement plus sûr pour toutes.

Mais dans certaines familles, les violences sont perçues comme une norme à tolérer. La résignation prend le pas sur la révolte, alimentée par la peur du jugement ou la pression sociale. Hakima, 35 ans, s’est confiée au Jeune Indépendant sur ce sujet. « Un an après mon mariage, tout s’est dégradé. J’ai soufflé mot après mot à mes parents, mais ils me reprochaient d’être ingrate. Mon mari cachait bien sa colère en public, mais il se défoulait à la maison. Un jour, pendant que j’allaitais notre deuxième fille, il m’a arraché la peau du genou avec une pince coupe-ongles ». Cette maman en détresse a gardé le silence pendant cinq ans, persuadée qu’il valait mieux patienter pour « sauver les apparences ».

De son côté, Lynda, 30 ans, partage un parcours similaire. « J’ai longtemps cru que c’était normal que mon mari me frappe et abuse de moi, mais ma mère et mes amies me conseillaient de faire preuve de patience, car la vie de couple est ainsi faite. C’est grâce aux réseaux sociaux et à une campagne de sensibilisation que j’ai réalisé que je vivais une injustice. J’ai enfin compris que, même en étant mariée, un époux n’a pas le droit de forcer sa femme dans les rapports conjugaux. Le viol existe aussi dans les couples mariés », a-t-elle déclaré. Et d’ajouter : « Aujourd’hui, j’ai réussi à sortir de son emprise et me reconstruire. J’invite toutes les femmes, qui subissent des maltraitances, quelles qu’elles soient, à briser le silence, car c’est la seule échappatoire ».

Chaque année, les forces de sécurité et les institutions concernées se mobilisent pour éradiquer ce fléau, notamment à travers des campagnes de sensibilisation. Les victimes sont appelées à dénoncer leurs agresseurs, car le signalement est essentiel, tout comme le dépôt de plainte qui peut révéler des actes d’une cruauté inimaginable. Cette violence constitue une atteinte grave aux droits humains fondamentaux, et son impact sur l’intégrité physique et mentale des victimes est incommensurable, pouvant aller jusqu’à la mort.

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