Comment la capitulation devant Israël redessine les contours du pouvoir au Maroc

Par Mohamed El-Maadi – Depuis 2020, une reconfiguration silencieuse mais méthodique du pouvoir marocain s’est enclenchée. Elle a pour origine un... L’article Comment la capitulation devant Israël redessine les contours du pouvoir au Maroc est apparu en premier sur Algérie Patriotique.

Juin 11, 2025 - 08:00
 0
Comment la capitulation devant Israël redessine les contours du pouvoir au Maroc

Par Mohamed El-Maadi – Depuis 2020, une reconfiguration silencieuse mais méthodique du pouvoir marocain s’est enclenchée. Elle a pour origine un basculement stratégique : l’acceptation de la normalisation avec Israël. Ce choix ne procède pas simplement d’une lubie diplomatique ou d’un alignement régional, mais d’un calcul froid et vital : garantir la survie de la monarchie alaouite dans un monde post-occidental où les anciens équilibres vacillent. L’Algérie, en réaffirmant sa souveraineté énergétique, sa verticalité étatique, sa cohésion populaire et sa politique étrangère désoccidentalisée, a créé une pression géopolitique intenable pour Rabat.

Le Maroc, démuni sur le plan énergétique, marginalisé dans les organisations panafricaines, lesté d’une élite féodale et d’un système inégalitaire structurel, ne pouvait rivaliser. Il lui fallait une carte. Il a joué la seule : le sionisme. L’offre était claire : un appui global du réseau israélien et diasporique en échange d’un transfert progressif de souveraineté symbolique, diplomatique, sécuritaire, religieuse. L’échange est cruel : le maintien du trône contre la dilution du sacré. Le pouvoir monarchique préservé, mais scellé sous le sceau de l’Etoile de David.

Déconstruire l’islam pour reconstruire l’image

Car l’objectif est double : maintenir le pouvoir et redessiner l’image. Il ne s’agit pas seulement de signer un traité, mais d’entamer une mutation structurelle du royaume. Celle-ci passe d’abord par une neutralisation progressive de l’islam en tant que référentiel politique et social. Le sionisme mondial, pragmatique et méfiant, n’investit pas sans garanties.

Ainsi, depuis la normalisation, la fête de l’Aïd a été annulée dans certaines régions, la prière de l’Aïd fut volontairement faite avec un jour de décalage, l’appel à la prière par haut-parleur est restreint ou interdit, les versets du Coran ont été progressivement exclus des manuels scolaires et les sermons sont étroitement encadrés, surveillés, dépolitisés.

Dans le même temps, un folklore culturel s’installe : fête de la bière à Agadir, programmes en faveur de la communauté LGBTQ, célébration du métissage comme norme morale et accusations de racisme systémique visant les réticences populaires.

C’est un travail de fond. Il ne s’agit pas de supprimer brutalement l’islam, mais de le folkloriser, de l’aseptiser, de le neutraliser pour faire du Maroc une «exception arabe» vendable. L’idée n’est pas simplement de séduire l’Occident, mais de neutraliser l’effet miroir algérien. Rabat redoute qu’Alger ne devienne un modèle régional fondé sur l’islam républicain, l’autonomie stratégique et la justice sociale. Pour s’y opposer, il fallait faire du Maroc un produit différencié, au sens marketing du terme.

Une «Terre promise» bis ?

Mais l’entreprise de normalisation ne s’arrête pas là. Elle a une troisième dimension, plus souterraine, plus eschatologique : transformer le Maroc en refuge géopolitique pour l’avenir juif post-israélien. Car depuis le 7 octobre 2023, et le séisme géopolitique que fut l’opération palestinienne contre Israël, un fait s’impose : le projet sioniste sur le sol de Palestine est historiquement compromis. Trop de résistance, trop d’images, trop d’illégitimité accumulée.

Alors, un autre projet surgit : celui d’un Maroc judaïsé de l’intérieur, d’un royaume «reconfiguré» pour devenir la plaque tournante de l’influence juive post-Palestine. Le chantier a commencé : accaparement de milliers d’hectares de terres dans le Sud, projet de villes nouvelles pouvant accueillir des populations exogènes, intensification des liaisons économiques, militaires et culturelles avec Israël, lobbies israéliens présents au cœur de la stratégie numérique, agricole, sécuritaire marocaine.

Le Maroc devient un laboratoire, test d’un Etat hybride, musulman de façade, sioniste de structure. Une sorte de royaume de Judas, au croisement des fidélités inversées. Et les élites marocaines, complexées par l’Algérie, se prêtent au jeu. Leur objectif : empêcher Alger de prendre le leadership spirituel et politique du Maghreb.

Mais ce plan repose sur un pari dangereux : la passivité du peuple marocain. Or, lorsqu’on touche à la foi, à l’âme, à l’identité, l’histoire s’accélère. Le Maroc croit domestiquer l’étoile. Il ne sait pas encore qu’on ne pactise pas impunément avec les puissances du faux sacré.

M. E.-M.

L’article Comment la capitulation devant Israël redessine les contours du pouvoir au Maroc est apparu en premier sur Algérie Patriotique.