Indignation sélective
Par A. Boumezrag – La France a toujours eu un talent particulier pour l’indignation sélective. Aujourd'hui, son obsession diplomatique porte un nom : l’Algérie. Mais l'Algérie continue son chemin, indifférente. L’article Indignation sélective est apparu en premier sur Algérie Patriotique.
Par A. Boumezrag – La France a toujours eu un talent particulier pour l’indignation sélective. Aujourd’hui, son obsession diplomatique porte un nom : l’Algérie. Depuis que les autorités algériennes ont osé refuser de recevoir un ressortissant expulsé accusé de trouble à l’ordre public et que l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal a été placé en détention, les éditorialistes parisiens sont en ébullition.
On crie au scandale, on fustige «la dérive autoritaire du pouvoir algérien», on exhume les grands discours sur la liberté d’expression et l’Etat de droit. A entendre les déclarations des ministres et les titres outrés des journaux, on croirait que Paris vient de découvrir la notion de répression politique. Curieusement, cette soudaine ferveur démocratique n’avait pas été aussi virulente quand la France déportait manu militari des militants algériens durant la guerre de Libération nationale où quand elle restait muette face à la détention d’un Julian Assange. Mais, visiblement, la liberté d’expression ne vaut défense que lorsqu’elle sert les intérêts français.
L’histoire se répète et le scénario est bien rodé. A chaque tension entre Alger et Paris, une campagne de dénigrement massive se met en place. La mécanique est simple : un fait divers est monté en puissance, amplifié par les médias français, qui se posent soudainement en défenseurs acharnés des libertés en Algérie. Pendant ce temps, on oublie commodément que la France elle-même n’est pas exemplaire.
Dans cette affaire, deux poids et deux mesures règnent en maîtres. L’Algérie est sommée de libérer Boualem Sansal au nom des principes universels, tandis que la France expulse et dénaturalise à tour de bras au nom de la «sécurité nationale». Les intellectuels français s’offusquent d’un refus d’accueil d’un expulsé par l’Algérie, mais étaient beaucoup plus silencieux lorsque la France multipliait les refus de visas pour les étudiants algériens ou quand elle expédiait des réfugiés vers des destinations bien moins respectueuses des droits de l’Homme.
Dans ce grand numéro de morale diplomatique, l’hypocrisie n’est pas un détail, elle est le cœur du spectacle. Car, au fond, il ne s’agit ni de liberté ni de justice, mais de politique pure. L’Algérie refuse d’être traitée en vassale et ça ne passe pas. L’ex-colonisateur supporte mal que son ancienne colonie prenne des décisions souveraines qui ne s’alignent pas sur ses intérêts.
A ceux qui continuent à se répandre en leçons de démocratie, un petit rappel historique : la France a mis plus de 200 ans à accorder le droit de vote aux femmes, réprime les manifestations sous une pluie de LBD et expulse des migrants par centaines sous couvert de lois toujours plus répressives. Mais, bien sûr, c’est l’Algérie qui est sous surveillance.
Comme le disait si bien George Orwell : «L’hypocrisie est la vaseline de la politique.» Et, en ce moment, Paris en use et en abuse.
Finalement, tout cela ressemble à une pièce de théâtre jouée en boucle, où les rôles sont distribués d’avance. L’Algérie dans le box des accusés, la France dans celui du procureur moralisateur et les médias en guise de jury complaisant.
Et après tant d’indignation simulée, que restera-t-il ? Une tempête dans un verre d’eau, quelques déclarations solennelles vite oubliées et l’éternel cycle des tensions diplomatiques qui reprendra de plus belle au prochain prétexte. Pendant ce temps, l’Algérie continue son chemin, indifférente aux leçons de morale parisiennes et la France, elle, persiste à confondre influence et ingérence. Rideau, mais pas fin de l’histoire.
A. B.
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