Tichy (Béjaïa): Embouteillages à l’infini, la perle balnéaire sous tension
Tichy, longtemps considérée comme l’un des joyaux balnéaires de la côte Est de Béjaïa, voit aujourd’hui son charme estival étouffé sous un flot incessant de klaxons, de gaz d’échappement et de files de voitures à n’en plus finir. Jadis paisible, bordée de palmiers et caressée par les vagues de la Méditerranée, la ville se retrouve […]

Tichy, longtemps considérée comme l’un des joyaux balnéaires de la côte Est de Béjaïa, voit aujourd’hui son charme estival étouffé sous un flot incessant de klaxons, de gaz d’échappement et de files de voitures à n’en plus finir. Jadis paisible, bordée de palmiers et caressée par les vagues de la Méditerranée, la ville se retrouve chaque été littéralement asphyxiée par une circulation devenue ingérable.
Il suffit d’une visite en plein mois de juillet pour constater l’ampleur du phénomène. Sur le tronçon de la RN9 traversant le centre-ville, c’est la paralysie : voitures à l’arrêt, pare-chocs collés les uns aux autres, moteurs qui ronronnent dans l’attente, conducteurs épuisés, piétons désorientés. Un véritable labyrinthe routier dans ce qui devrait être un lieu de détente et de villégiature. Sortir de Tichy en voiture relève parfois de l’épreuve, tant les bouchons peuvent durer… des heures.
Mais les automobilistes ne sont pas les seuls à souffrir. Les piétons, eux aussi, doivent jongler entre les véhicules, tenter de traverser une chaussée encombrée, et faire preuve d’une vigilance de tous les instants. À chaque passage piéton, c’est presque une question de calcul mental et de chance. La moindre inattention peut virer au drame.
Ce désordre chronique, aux allures de chaos, met en lumière une absence flagrante d’adaptation aux réalités contemporaines. La route principale de Tichy, héritée de l’époque coloniale, n’a jamais connu de réaménagement sérieux. Pas de voies de contournement, pas de signalisation moderne, aucune politique de stationnement réfléchie, et un service d’ordre routier souvent débordé. La ville semble figée dans une infrastructure du siècle passé, alors que la fréquentation touristique ne cesse d’augmenter. «Ce tronçon est resté tel quel depuis la colonisation. Rien n’a été revu, rien n’a été anticipé», déplore un habitant excédé. Et d’ajouter : «La question que je me pose est simple : que se passera-t-il dans dix ans si on continue à fermer les
yeux ?» Un constat partagé par de nombreux visiteurs, venus de toutes les régions du pays, et qui, malgré leur amour pour la plage de Tichy, en repartent souvent frustrés par cette désorganisation. Le paradoxe est cruel : plus Tichy attire, plus elle s’étouffe. Plus elle séduit, plus elle s’embourbe dans des bouchons. Le charme est toujours là – la mer, le sable fin, les couchers de soleil dorés – mais l’accès à ce rêve devient de plus en plus difficile. Faut-il s’y résoudre ? Certainement pas. Car l’urbanisme est une affaire de volonté, d’écoute et de prévoyance. À condition de penser la ville non pas seulement comme un lieu de passage estival, mais comme un espace vivant, respirant, évolutif. Tichy mérite mieux que des klaxons et des nerfs à vif. Elle mérite des solutions concrètes, au service de ses habitants comme de ses visiteurs.
Sans cela, la perle bleue risque un jour de perdre l’éclat qui la rendait si précieuse.
Hafit Zaouche