Réaction

Emmanuel Macron n’avait pas exagéré en affirmant qu’en cas de censure du gouvernement de François Bayrou, le 8 septembre, et de la subséquente démission de ce dernier, le lendemain il désignerait un nouveau Chef du gouvernement aussi rapidement que possible. Dès la fin de la même journée, Sébastien Lecornu était ainsi nommé à Matignon. Un […]

Sep 12, 2025 - 20:42
 0
Réaction

Emmanuel Macron n’avait pas exagéré en affirmant qu’en cas de censure du gouvernement de François Bayrou, le 8 septembre, et de la subséquente démission de ce dernier, le lendemain il désignerait un nouveau Chef du gouvernement aussi rapidement que possible. Dès la fin de la même journée, Sébastien Lecornu était ainsi nommé à Matignon. Un choix qui était envisagé par de nombreux observateurs politiques ayant supposé que le président français placerait à la tête de son gouvernement un proche de longue date. Celui qui initialement était un proche de Bruno Le Maire, ministre de l’Économie de Macron durant sept années consécutives, s’est depuis constitué une place dans l’entourage le plus serré du président centriste. C’est d’ailleurs avec lui qu’il avait entrepris le tour de France des Mairies en 2019 pour se rapprocher des Français au moment de la crise des «gilets jaunes». Sa nomination, si elle ne surprend ainsi pas grand monde, suscite néanmoins une pléthore de réactions, allant de la colère à l’incompréhension, en passant par le mépris. C’est avec un mélange de ces trois sentiments que s’est exprimé sur les ondes d’une radio du service public, l’ancien Premier ministre de Jacques Chirac. Invité de France Info jeudi matin, Dominique de Villepin s’en est violemment pris à Sébastien Lecornu. «On ne va pas jouer éternellement les petits garçons qui amusent le président, un verre de whisky à la main, en racontant des histoires, ou en moquant tel ou tel personnage politique», a-t-il éructé, considérant que «c’est à cela qu’ils se sont adonnés, et l’un et l’autre, au fil des années». «Il ne doit pas être le gentil toutou de Monsieur le président», a-t-il cru bon d’ajouter, en des termes toujours aussi peu amènes. Récemment revenu sur le devant de la scène médiatique après une très longue traversée du désert politique, le septuagénaire s’est lancé dans une vraie-fausse campagne présidentielle qui ne dit pas encore son nom. Désormais à la tête de son mouvement «La France Humaniste», il a choisi de réserver ses flèches les plus acerbes contre son ancienne famille politique. Très populaire au sein de l’électorat de gauche, y compris la frange mélenchoniste, l’ex-Chef du gouvernement voit d’un mauvais œil la nomination de son lointain successeur. Convaincu que le président de la République aurait dû privilégier une personnalité issue du Nouveau Front populaire, Dominique de Villepin s’applique depuis le début de la semaine à vilipender le choix d’une figure de la droite et du centre, et feint de donner des conseils pour mieux dissimuler ses critiques. «Quand on est nommé Premier ministre, on peut estimer, quand on fait de la politique politicienne, qu’on a des devoirs vis-à-vis du président de la République… Mais il a d’abord un devoir vis-à-vis des Français ! Et là, il est temps de s’émanciper», lâche-t-il. Quelle que soit la réaction vis-à-vis de la désignation de Lecornu, il n’en demeure pas moins que ce dernier est le cinquième Chef du gouvernement du second mandat d’Emmanuel Macron. Un triste record qui témoigne de la farce qu’est aujourd’hui l’exécutif français et qui découle de la décision du chef de l’État de dissoudre, sans consultations approfondies, l’Assemblée Nationale en juin 2024, ouvrant la voie au chaos politique. À l’époque déjà, nombreux furent les membres de son propre camp à fustiger sa décision et à prédire que rien de positif ne ressortirait d’un chamboulement institutionnel. Reste à voir désormais si Lecornu, comme ces deux derniers prédécesseurs, sera censuré par des parlementaires qui ne craignent plus de recourir à la défiance vis-à-vis de leurs gouvernants, et qui sont de plus en plus nombreux à appeler de leurs vœux une démission d’Emmanuel Macron et à des élections présidentielles anticipées. Des doléances auxquelles le président refuse d’accéder, mais qui pourraient s’imposer à lui si Lecornu était lui aussi censuré, mettant en évidence qu’il ne peut plus gouverner le pays.