13ᵉ Festival international du Malouf : le patrimoine musical en dialogue avec le monde

Sous les voûtes du Théâtre régional Mohamed Tahar Fergani, les voix et les instruments du Malouf ont fait vibrer, dimanche soir, une salle archicomble, tissant un lien subtil entre passé et présent, tradition et modernité. À travers émotions profondes, hommages et envolées musicales, artistes algériens et internationaux ont offert une célébration éclatante du patrimoine, où […] The post 13ᵉ Festival international du Malouf : le patrimoine musical en dialogue avec le monde appeared first on Le Jeune Indépendant.

Sep 22, 2025 - 12:53
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13ᵉ Festival international du Malouf : le patrimoine musical en dialogue avec le monde

Sous les voûtes du Théâtre régional Mohamed Tahar Fergani, les voix et les instruments du Malouf ont fait vibrer, dimanche soir, une salle archicomble, tissant un lien subtil entre passé et présent, tradition et modernité. À travers émotions profondes, hommages et envolées musicales, artistes algériens et internationaux ont offert une célébration éclatante du patrimoine, où chaque note transcendait les frontières et touchait l’âme des spectateurs, lors de la deuxième soirée du 13ᵉ Festival international du Malouf.
La soirée a débuté avec Beihdja Rahal, musicienne interprète et figure emblématique de l’école algéroise du Malouf. Vêtue d’une gandoura constantinoise, hommage élégant à la ville et à ses traditions, elle a ouvert son récital avec des extraits de la Nuba de Sika, dont « Ya Layl Allah Ya Layl » et « Wa Kayfa Yanam Al-‘Achiq ». Sa voix claire et modulée, parfaitement maîtrisée dans les maqāmāt, naviguait avec fluidité entre les passages délicats et les crescendos puissants, révélant la richesse expressive et la complexité de la tradition algéroise.
Accompagnée du oud, de la kamanja et de percussions légères, Rahal a alterné entre nuances subtiles et envolées passionnées. Les lumières dorées, projetées de manière circulaire sur la scène, créaient un halo intimiste, donnant l’impression que chaque spectateur partageait un secret musical. Les applaudissements nourris et spontanés ponctuaient chaque mouvement de la voix, traduisant l’admiration et la complicité du public.
La scène a ensuite été investie par Abderrachid Segni, grand maître du Malouf et disciple du légendaire Mohamed Tahar Fergani. Avec une prestance calme et majestueuse, il a choisi d’interpréter « Salah Bey », également connu sous le titre « Galou laarab galou ». Ce poème élégiaque retrace les événements tragiques de la fin du XVIIIᵉ siècle à Constantine et rend hommage à Salah Bey, figure historique marquante dont le destin tragique a profondément marqué la mémoire collective.
Segni a plongé la salle dans une atmosphère de recueillement où chaque ornement vocal, chaque glissando de kamanja ou oud semblait raconter l’histoire de la ville. Les spectateurs accompagnaient le rythme des mains et des zghareds, créant un dialogue vivant entre la scène et la salle. Il a également interprété « Mrouhoune Bil Salama » et « Ya Mohamed Ya Sari’ Al-‘Orouba », chaque pièce enveloppée d’un éclairage chaud et tamisé, donnant l’impression d’être transporté dans une Constantine d’autrefois, entre palais ottomans et ruelles pavées.

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Fusion andalouse et accents nordiques

L’ouverture sur l’international a été signée par Hind Zouari, musicienne tunisienne qui a transformé la scène en un voyage musical sans frontières. Serrant son qanûn, entourée de la violoniste autrichienne Irène, de la violoncelliste suédoise Mimi, et de la percussionniste tunisienne Amina à la darbouka, elle a proposé un Malouf teinté de modernité et de spiritualité, accompagné par l’orchestre de Constantine dirigé par Youcef Bounas.
Zouari a débuté avec « Sawt Al-Mouhajer » (La Voix du Migrant), composition personnelle dédiée aux artistes exilés, avant de revisiter « Al-Bint Al-Shalabiya », un classique arabe remis au goût du jour avec des arrangements subtils où le qanûn, la kamanja et les percussions créaient des atmosphères tantôt éthérées, tantôt rythmées.
Dans un moment spirituel intense, elle a interprété « Talama Achkou Gharami », fusionnant les modes andalous avec des accents nordiques aériens, prouvant que le Malouf peut dialoguer avec les traditions musicales les plus lointaines. Elle a ensuite transporté le public vers les oasis du Sud tunisien avec « Dhawq al-Nakhil », avant de conclure son récital en apothéose avec « Toucha Al-Zidan », le mouachah « Ya Madh-hala ar-Râh » et la populaire « Sidi Mansour », reprise en chœur par une salle conquise et debout. La lumière oscillait entre violet et or, enveloppant les spectateurs dans une bulle sonore et émotionnelle unique.
Le point culminant de la soirée a été marqué par Abdelaziz Benzina, surnommé « le rossignol du Malouf ». L’artiste a interprété des pièces emblématiques du Malouf constantinois : « And Al-Bey Mansour », « Qoudam Darak », « Ydoum Hnakoum », « Billahi ya hamami », « Ya Chadli Belhassen » et « A’chik Memhoun ».
Descendant parmi le public, Benzina a créé une interaction directe et chaleureuse avec les spectateurs. Sa voix, tantôt caressante, tantôt puissante, accompagnée par le oud, la kamanja et la flûte, faisait vibrer chaque âme présente. Les applaudissements, chants et battements de mains ont transformé le théâtre en un espace de communion totale, où la musique et l’émotion devenaient un langage universel.
Un hommage émouvant a été rendu à Amar Touhami, figure importante du Malouf constantinois récemment disparue. Cette cérémonie a été suivie de la remise d’un trophée symbolique et d’un certificat d’honneur à sa famille, témoignant de la profonde reconnaissance et de l’attachement de la ville à cet artiste passionné. Les applaudissements nourris et les larmes des spectateurs ont confirmé l’impact et la portée de son œuvre, dont l’empreinte restera à jamais gravée dans le patrimoine musical de Constantine.

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