L’Algérien en France ? Trop Français pour l’expulser, pas assez pour l’accepter ?
Une contribution du Dr A. Boumezrag – L’Algérien né en France bénéficie officiellement des droits de citoyen. Mais dès qu’il... L’article L’Algérien en France ? Trop Français pour l’expulser, pas assez pour l’accepter ? est apparu en premier sur Algérie Patriotique.

Une contribution du Dr A. Boumezrag – L’Algérien né en France bénéficie officiellement des droits de citoyen. Mais dès qu’il sort de l’ombre, il se heurte aux réalités : discrimination à l’embauche (rapport récent du Défenseur des droits montre que les candidats au patronyme maghrébin sont 2,5 fois moins appelés en entretien), contrôles au faciès toujours massifs (un rapport d’avril 2025 révèle que les jeunes hommes perçus comme «arabes» sont contrôlés 15 fois plus que les autres) et une représentation médiatique stéréotypée.
L’injonction à «s’intégrer» revient comme un refrain, alors que le gouvernement multiplie les lois sur l’immigration et la laïcité qui ciblent de fait une large part de la population d’origine algérienne. En mars 2025, le Conseil d’Etat valide partiellement une loi controversée restreignant le regroupement familial, principalement impactant les familles algériennes.
Pendant ce temps, dans les quartiers populaires, les investissements annoncés pour la rénovation urbaine (comme le programme lancé à Seine-Saint-Denis en avril 2025) peinent à changer les conditions de vie : chômage élevé, accès limité aux services publics et stigmatisation persistante.
1830 marque le début de la colonisation. En 2025, le refus d’enseigner pleinement cette histoire se poursuit. La dernière polémique autour de l’intégration des crimes coloniaux dans les manuels scolaires illustre ce déni persistant : plusieurs députés ont bloqué le texte au printemps 2025, préférant «préserver la cohésion nationale».
Parallèlement, des scandales récents, comme la découverte en février 2025 d’archives classifiées montrant les violences policières sur des manifestants algériens dans les années 1960, font ressurgir la mémoire enfouie. Pourtant, peu d’efforts sont faits pour intégrer cette histoire dans le récit national. Le paradoxe demeure : l’Algérien est célébré comme un héros du passé – tirailleur, travailleur – mais souvent condamné comme un bouc émissaire du présent. Les débats publics récents sur la «double allégeance» ou les «signes religieux» ciblent disproportionnellement la communauté algérienne, reflétant plus un refus de la diversité qu’une réelle volonté d’intégration.
L’intégration est avant tout une question politique et sociale. Tant que la France maintiendra cette posture ambiguë – vouloir un Algérien assimilé mais pas reconnu, discret mais pas absent –, la fracture restera profonde.
Les politiques urbaines censées «intégrer» les populations d’origine algérienne aboutissent souvent à créer ou renforcer ce que certains appellent pudiquement «les quartiers prioritaires». Mais derrière ce terme technocratique se cache une réalité : des zones de relégation sociale où chômage, pauvreté, échec scolaire et sentiment d’abandon institutionnel cohabitent.
A Marseille, Lyon ou Paris, la situation ne s’améliore guère malgré les promesses. En avril 2025, un rapport parlementaire dénonce même une augmentation des violences policières dans ces quartiers, perpétuant un cercle vicieux d’exclusion.
Les Algériens de France sont souvent ramenés à des clichés dans les médias. Quand ils s’expriment, c’est pour être instrumentalisés : leurs revendications sont caricaturées en «communautarisme» ou «séparatisme», termes devenus les nouveaux tabous.
En mars 2025, une association algérienne a vu son financement public coupé après avoir organisé une marche pour la reconnaissance des victimes de la guerre d’Algérie, jugée «trop politique». Une autre forme d’exclusion par la censure.
L’accès à la justice est un autre champ où se manifeste cette intégration à l’exclusion. Les études récentes montrent que les plaignants d’origine maghrébine, notamment algérienne, obtiennent moins souvent gain de cause face aux institutions.
Par ailleurs, en mai 2025, un scandale éclate : des centaines de dossiers de demandeurs d’asile algériens sont instruits en accéléré, avec des risques accrus de renvoi. Pourtant, la France reste liée par un passé commun, qu’elle refuse souvent de reconnaître dans ses obligations diplomatiques.
Alors que la France célèbre régulièrement des commémorations, celles-ci oublient trop souvent les blessures coloniales. Le 19 mars, date officielle de la fin de la Guerre d’Algérie, est contestée depuis des années par les associations de victimes.
En 2025, la question de la reconnaissance des crimes coloniaux reste un sujet explosif : aucune loi contraignante n’a été adoptée malgré les mobilisations citoyennes. Pendant ce temps, le silence officiel nourrit la douleur et l’injustice ressenties par les descendants.
Enfin, la question de la «double appartenance» fait toujours débat. Pour beaucoup d’Algériens de France, leur identité est multiple et complexe : française par la naissance, algérienne par l’histoire, par la culture, par la famille. Mais la République exige souvent un choix binaire, sans nuances. Etre Français, c’est renier ses origines. Etre fier de ses racines, c’est devenir suspect.
L’intégration de l’Algérien, en 2025, reste une entreprise en décalage avec la réalité. C’est un discours officiel qui parle d’égalité, tandis que, sur le terrain, l’exclusion perdure. C’est une reconnaissance symbolique, mais une négation pratique.
En France, on intègre l’Algérien à condition… qu’il accepte d’être l’exemple vivant de l’exclusion républicaine. Trop Français pour être ignoré, pas assez pour être pleinement accueilli, il est le miroir d’une nation qui refuse de grandir.
A. B.
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