Trump et l’Algérie

Par Anouar Macta – Derrière les «formules de bon aloi» se dissimule l’ombre d’un réalignement stratégique américain dans la région. Car si Washington flatte Alger, ce n’est pas sans arrière-pensées. L’article Trump et l’Algérie est apparu en premier sur Algérie Patriotique.

Juil 10, 2025 - 09:41
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Trump et l’Algérie

Par Anouar Macta – Il est de ces courtoisies diplomatiques qui, sous des dehors anodins, trahissent des intentions plus profondes. Le message de Donald Trump adressé au président Abdelmadjid Tebboune, à l’occasion du 63e anniversaire de l’indépendance algérienne, relève à première vue de la rhétorique polie et convenue entre Etats. Mais à l’épreuve du contexte géopolitique, chaque mot mérite d’être pesé.

Derrière les «formules de bon aloi» –partenariat pérenne, avenir plus sûr et plus prospère, échanges culturels – se dissimule l’ombre d’un réalignement stratégique américain dans la région. Car si Washington flatte Alger, ce n’est pas sans arrière-pensées.

Trump – qu’on sait peu versé dans l’éloge gratuit – évoque un partenariat enraciné dans «la lutte contre le terrorisme» et «la sécurisation des frontières». Autrement dit, l’Algérie est perçue comme un verrou de stabilité dans un Sahel en flammes. Il est loin le temps où l’Algérie irritait les chancelleries occidentales par son non-alignement : aujourd’hui, elle devient un acteur sécuritaire incontournable, certes discret, mais terriblement efficace. Les Américains, toujours soucieux d’équilibre, le savent et s’adaptent.

En évoquant la coïncidence des dates d’indépendance – le 4 juillet pour les Etats-Unis, le 5 juillet pour l’Algérie –, Trump opère une symétrie symbolique. Mais celle-ci est fallacieuse : l’Amérique s’est affranchie d’une monarchie lointaine ; l’Algérie, elle, a arraché sa liberté des mains d’un colonialisme féroce qui a laissé un million de morts. La comparaison sert ici à atténuer l’histoire radicale de l’Algérie pour mieux l’absorber dans une narration occidentale de la liberté.

Mais ce qui transparaît surtout, c’est l’envie américaine d’arrimer durablement l’Algérie à son orbite, face à un Maghreb fragmenté, un Sahel devenu théâtre d’influence russe et un continent africain où la Chine avance sans complexe. En cela, le message de Trump n’est pas un simple télégramme d’amitié : c’est un signal stratégique, une «tentative d’enrôlement doux».

Enfin, la mention des «échanges culturels» n’est pas anodine. Elle révèle l’autre versant de la diplomatie américaine, «l’influence par la culture, les valeurs, les récits». L’Algérie, encore méfiante vis-à-vis du soft power occidental, devra mesurer avec rigueur les conditions d’un tel rapprochement.

Car si l’Amérique offre ses félicitations, elle attend aussi des contreparties : des alignements, des partenariats, des concessions. Or l’Algérie, forte de son passé anticolonial et de sa doctrine de non-ingérence, saura-t-elle préserver son autonomie stratégique sans tomber dans l’illusion du partenariat égalitaire avec l’Empire ?

A. M.

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