Mouton local: Plus cher que jamais !
À deux semaines de l’Aïd El-Adha, les marchés à bestiaux de la capitale, comme ceux de l’intérieur du pays, sont en effervescence. Entre les cris des vendeurs, les bêlements des moutons et les incessantes allées et venues des familles venues chercher une bête à sacrifier, les souks débordent de vie, mais aussi de frustration. Car […] The post Mouton local: Plus cher que jamais ! appeared first on Le Jeune Indépendant.

À deux semaines de l’Aïd El-Adha, les marchés à bestiaux de la capitale, comme ceux de l’intérieur du pays, sont en effervescence. Entre les cris des vendeurs, les bêlements des moutons et les incessantes allées et venues des familles venues chercher une bête à sacrifier, les souks débordent de vie, mais aussi de frustration. Car malgré l’importation par l’Etat d’un million de moutons, les prix n’ont pas fléchi. Bien au contraire, ils battent des records.
Lors du déplacement du Jeune Indépendant dans plusieurs points de vente situés dans la capitale et dans d’autres wilayas, une lourde ambiance de mécontentement a été constatée. Les acheteurs sur place ne cachaient pas leur contrariété face aux vendeurs locaux. « On ne comprend pas. Bien que l’Etat ait importé des moutons en cédant le coût de la tête à 40 000 DA, chez nous on continue d’augmenter les prix », dénonce Hamid, père de trois petits garçons âgés entre onze et quatre ans. Ces derniers, les yeux brillants devant les enclos, tiraient leur papa par le pull pour l’inciter à acheter un mouton.
Au souk de Sidi Naâmane, dans la wilaya de Médéa, les allées poussiéreuses sont pleines à craquer. Les bêtes se bousculent dans leurs enclos métalliques, surveillées de près par des vendeurs déjà bien rodés à la négociation musclée. Des pères de famille observent attentivement, comparent, soupèsent, négocient, et souvent repartent sans avoir rien acheté. « Celui-ci ? 145 000 DA. Celui-là ? 160 000 DA, pas moins ! », lance un vendeur en caressant distraitement le dos d’un mouton nerveux.
Sur place, Ryad, jeune père de famille et salarié dans le secteur privé, confie ses inquiétudes. « Cette année, je ne sais pas si je vais pouvoir acheter un mouton », souffle-t-il visiblement préoccupé. Son revenu mensuel, qui n’atteint pas les 35 000 DA, ne lui laisse que peu de marge pour faire face à la flambée des prix. « J’ai été naïf en pensant que suite à cette abondante importation de moutons de l’étranger, les nôtres seraient moins chers que l’année dernière », s’exclame-t-il. « Les moutons dont le coût ne dépassait pas les 70 000 DA l’année dernière sont cédés sur ce marché à 100 000 DA cette année. Ce n’est pas possible pour moi d’acheter à ce prix ».
Ryad admet regretter de ne pas avoir choisi un mouton importé malgré les tarifs subventionnés. « Les prix actuels sur le marché m’ont contraint à me tourner vers l’achat d’un mouton de l’Etat. Malheureusement, n’étant pas inscrit sur la liste de l’entreprise, clôturée depuis quelques jours, je ne peux bénéficier de cette aubaine », dit-il avec amertume.
Choisir, mais à quel prix ?
Le mouton local, pourtant prisé pour sa robustesse, son goût et sa conformité au rite religieux, est de plus en plus délaissé par les consommateurs. D’abord à cause des prix, mais aussi en raison du manque de régulation. A El-Harrach, des familles se plaignent des marges pratiquées par les revendeurs.
Pour sa part, Kader, venu avec ses petits-fils, souhaite transmettre les techniques essentielles pour choisir le bon animal. Djounabe, un septuagénaire, explique : « Enseigner aux garçons comment choisir l’animal de l’Aïd est important : son âge, s’assurer qu’il soit jeune, détecter certains signes de qualité… Ces gestes, hérités de l’expérience, sont indispensables pour faire un bon achat ». Il ajoute, déçu : « Mais cette année, ça ne sera pas possible. Le moins cher est proposé à 100 000 DA, et je l’estime trop petit et maigre », s’indigne-t-il.
Face à la concurrence des moutons espagnols et roumains, certains éleveurs locaux redoublent d’efforts pour écouler leur cheptel. Parfois, cela se traduit par une hausse encore plus marquée des prix, dans l’espoir de maximiser les bénéfices. « On a investi toute l’année. Les aliments sont chers, le transport aussi. On ne peut pas vendre à perte », justifie un vendeur rencontré à Bou Saâda.
Le Conseil des ministres, sur proposition du ministre de l’Agriculture, du Développement rural et de la Pêche, Youcef Cherfa, avait validé l’instauration d’un prix national unifié pour lutter contre la spéculation. Cependant, dans les souks, cette mesure semble ignorée, voire contournée. Les citoyens réclament des contrôles plus rigoureux et une distribution mieux encadrée.
« L’intention est bonne, mais elle n’est pas suivie d’effet », résume Rédha. Il dénonce une situation où les revendeurs restent les principaux bénéficiaires : « Il est clair que ceux qui profitent de cette situation sont les revendeurs. Ils achètent les ovins dans les régions de l’intérieur pour les revendre plus cher dans les grandes villes », déplore-t-il.
Face à cette situation jugée aberrante par certains, d’autres appellent à la raison, rappelant que l’Aïd El-Adha ne doit pas se réduire à une démonstration de richesse ou à la course au plus gros mouton. « Ce n’est pas la corpulence du mouton qui importe, mais le fait d’accomplir ce rite avec sincérité, dans l’esprit de notre religion, et de se rapprocher d’Allah », souligne un fidèle.
Dans ce sens, un imam d’une mosquée à Alger a exhorté les fidèles à se recentrer sur l’intention, la sincérité du geste et l’esprit de partage qui doivent accompagner le sacrifice. « Dieu n’impose pas à l’homme ce qu’il ne peut supporter », a-t-il rappelé lors de son prêche, invitant les ménages à ne pas se laisser entraîner par la pression sociale ou les apparences.
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