Aïn Fouara fois profanée de nouveau : Sétif en deuil de son symbole…
Sétif s’est réveillée hier, mercredi 30 juillet, dans la consternation. La statue emblématique d’Aïn Fouara a une nouvelle fois été la cible d’un acte de vandalisme, perpétré la veille aux environs de 23h30. Selon des témoignages concordants, un individu animé d’intentions encore floues s’en est violemment pris à la figure de la statue, avant d’être […] The post Aïn Fouara fois profanée de nouveau : Sétif en deuil de son symbole… first appeared on L'Est Républicain.

Sétif s’est réveillée hier, mercredi 30 juillet, dans la consternation. La statue emblématique d’Aïn Fouara a une nouvelle fois été la cible d’un acte de vandalisme, perpétré la veille aux environs de 23h30. Selon des témoignages concordants, un individu animé d’intentions encore floues s’en est violemment pris à la figure de la statue, avant d’être rapidement maîtrisé par des éléments de la police. Œuvre du sculpteur français Francis de Saint-Vidal et installée au cœur de la ville depuis la fin de l’année 1898, cette figure féminine taillée dans la pierre dépasse largement sa fonction de fontaine. Elle incarne l’âme de Sétif, un symbole culturel puissant, un repère urbain chargé de mémoire, témoin silencieux de plus d’un siècle d’histoire locale. Hélas, Aïn Fouara est aussi une cible récurrente des attaques d’obscurantistes ou d’individus en perte de repères, mus parfois par la haine, parfois par la simple bêtise. L’acte de mardi soir s’inscrit dans une série noire dont les précédents ont laissé des traces encore visibles. Le 22 avril 1997, une tentative de destruction à l’explosif avait profondément marqué les esprits. Le 31 mars 2006, un jeune marginal, armé de pierres, avait violemment frappé la statue dans une scène rappelant étrangement celle d’avant-hier. En décembre 2017, un homme armé d’un marteau avait saccagé le visage et la poitrine de la statue, provoquant une onde de choc à travers tout le pays. La dernière agression en date remontait au 2 décembre 2022. Ces attaques répétées soulèvent des interrogations légitimes : comment expliquer qu’un monument aussi symbolique, connu bien au-delà des frontières de la wilaya, ne bénéficie toujours pas d’un dispositif de surveillance efficace ? Faudra-t-il attendre une destruction irréversible pour réagir ? Aïn Fouara n’est pas qu’un ornement de pierre. Elle est un véritable totem pour les Sétifiens. La tradition veut que tout visiteur de la ville boive de son eau pour être béni. Chaque coin de la place lui est associé, chaque génération l’a photographiée, contée, rêvée. Elle est la confidente muette des habitants et le témoin d’un pan entier de leur mémoire collective. L’indignation a été immédiate. Sur les réseaux sociaux, des centaines de citoyens de Sétif mais aussi d’autres régions du pays ont exprimé leur colère et leur tristesse. « On touche à notre identité, à notre patrimoine, à un témoin d’un grand pan de l’histoire de la cité. Aïn Fouara est l’autre visage de Sétif. C’est lâche. On ne s’attaque pas à une femme seule et sans défense », dénonce un groupe de jeunes. Une vieille dame, les larmes aux yeux, ajoute : « Qu’on soit pour ou contre sa présence, on ne détruit pas un monument qui fait partie de notre histoire. Cette statue restera là, n’en déplaise aux haineux et ennemis de l’art et de la beauté ». « Intervenant pendant une soirée estivale paisible et calme, cette énième agression est celle de trop. Qu’il soit lucide ou non, l’auteur de cet acte ignoble n’a pas seulement vandalisé une œuvre d’art, il a aussi tenté de réveiller les démons d’un obscurantisme que l’on croyait révolu. Nous condamnons avec fermeté cet acte ignoble. Cet autre détraqué doit répondre de ses actes. Nous demandons des réparations. La société civile devrait prendre position et fustiger les forfaits de ces moyenâgeux », s’insurgent d’autres citoyens. « Il est temps de sanctionner sévèrement de tels actes, car ils portent atteinte à l’image, à la dignité, à la culture et à l’histoire de toute une nation ». Au-delà des réparations matérielles, les Sétifiens attendent aujourd’hui une réparation morale. Ils réclament des mesures fortes pour que cessent ces agressions répétées contre un pan vivant de leur histoire. Car Aïn Fouara est bien plus qu’un monument : elle est le cœur battant d’une ville, un lieu de rassemblement, de passage, de mémoire. Une fois encore, une œuvre d’art paie le prix de l’intolérance. Une fois encore, Sétif pleure son symbole blessé.
Kamel Beniaiche
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