Anniversaire
Les talibans ont lutté durant vingt ans pour chasser les contingents armés et administratifs américains d’Afghanistan, jusqu’au départ en catastrophe en août 2021, durant le mandat de Joe Biden à la Maison-Blanche, des derniers représentants officiels des États-Unis du pays. Un départ durant lequel des milliers d’Afghans ont tenté désespérément de s’accrocher aux avions pressentant […]

Les talibans ont lutté durant vingt ans pour chasser les contingents armés et administratifs américains d’Afghanistan, jusqu’au départ en catastrophe en août 2021, durant le mandat de Joe Biden à la Maison-Blanche, des derniers représentants officiels des États-Unis du pays. Un départ durant lequel des milliers d’Afghans ont tenté désespérément de s’accrocher aux avions pressentant le règne de terreur et de misère que les talibans, désormais seuls maîtres du territoire, allaient leur faire vivre. Quatre ans plus tard, les fondamentalistes islamistes à la tête de la nation célèbrent un nouvel anniversaire de leur retour au pouvoir en Afghanistan, forts de la reconnaissance de leur gouvernement par la Russie et espérant voir d’autres pays suivre. Et alors que les Afghans vivent dans un dénuement extrême, les talibans ont décidé de fêter leur prise de pouvoir avec des parades dans plusieurs villes comme dans le centre de Kaboul, où des hélicoptères ont lâché des fleurs et où les drapeaux blanc et noir de l’«Émirat islamique d’Afghanistan» ont fleuri pour le «jour de la Victoire», qui marque la reprise de la capitale, le 15 août 2021. Dès jeudi soir, des talibans se sont rassemblés à un carrefour menant à l’ambassade américaine, tirant des feux d’artifice et brandissant de grands drapeaux. Mais le défilé militaire qui s’est tenu en fanfare les années précédentes sur la base de Bagram, ancien centre névralgique des opérations occidentales contre l’insurrection talibane pendant la guerre (2001-2021), n’a pas eu lieu hier. Les célébrations ont été annulées, a affirmé sous le couvert de l’anonymat un responsable taliban, sans donner les raisons d’un tel changement. Le gouvernement taliban est encore largement exclu de la communauté internationale qui lui reproche ses mesures liberticides, prises au nom d’une interprétation ultra-rigoriste de la loi islamique et visant particulièrement les femmes. La Cour pénale internationale (CPI) a émis début juillet des mandats d’arrêt à l’encontre de deux dirigeants talibans pour persécution des Afghanes, qui sont bannies des universités, des salles de sport, des instituts de beauté, des parcs et de nombreux emplois. Mais le gouvernement taliban, qui a fait de son acceptation par la communauté internationale son cheval de bataille, venait tout juste de remporter une victoire avec la reconnaissance russe. Kaboul entretient en outre des relations étroites, même sans reconnaissance officielle, avec les États d’Asie centrale, la Chine et les Émirats arabes unis, entre autres. Côté occidental, le gouvernement taliban a rapporté des entretiens à Kaboul avec des responsables norvégiens, britanniques et américains notamment. Les rapporteurs spéciaux des Nations unies ont appelé jeudi la communauté internationale à ne pas normaliser les relations avec les talibans et à rejeter leur «régime violent et autoritaire». Ces experts indépendants mandatés par le Conseil des droits de l’Homme ont estimé que les talibans exerçaient leur pouvoir «sans légitimité» et affichaient «un mépris flagrant pour les droits humains, l’égalité et la non-discrimination». Mais comme durant leur premier règne sur le pays qui a duré cinq ans (1996-2001), les talibans sont incapables de mettre en place un régime crédible utile pour leurs citoyens, mais se complaisent à tuer une à une leur moindre liberté, d’abord celles des femmes, puis celles de l’ensemble de la population. Reste à voir, toutefois, combien de temps le peuple supportera cette situation, alors que les talibans eux-mêmes vivent une vie des plus confortables grâce à l’argent du trafic d’opium, de l’exploitation de minerais et des donations des pays du Golfe, le tout permettant de générer un revenu tournant autour de cinq milliards de dollars annuellement.