Le Maroc, unique pays à maintenir une discrimination sur la liberté de résidence des femmes
Le Maroc demeure aujourd’hui l’unique pays de la région MENA à refuser aux femmes les mêmes droits que les hommes pour choisir librement leur résidence et leur domicile. Cette discrimination se matérialise par une réserve du Royaume à l’article 15.4 de la Convention de 1979 des Nations unies sur l’élimination de toutes les formes de […]

Le Maroc demeure aujourd’hui l’unique pays de la région MENA à refuser aux femmes les mêmes droits que les hommes pour choisir librement leur résidence et leur domicile.
Cette discrimination se matérialise par une réserve du Royaume à l’article 15.4 de la Convention de 1979 des Nations unies sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDAW).
Cet article garantit aux femmes les mêmes droits que les hommes pour « choisir leur résidence et leur domicile ».
Dans le droit marocain, cette restriction reste bien codifiée. La Moudawana (Code de la famille), dans ses dispositions relatives au mariage, continue de prévoir que l’épouse doit résider au domicile conjugal choisi par l’époux, sauf convention contraire ou décision judiciaire.
En pratique, cela limite la liberté de mouvement des femmes mariées, ce qui justifie le maintien par le Maroc de sa réserve à l’article 15.4.
Cette discrimination contraste avec la communication officielle du Royaume et les louanges qu’il reçoit de ses alliés occidentaux.
Ainsi, à titre d’exemple, en juin 2025, la ministre française de l’Égalité entre les femmes et les hommes, Aurore Bergé, en visite au Maroc, a salué «la dynamique marocaine pour l’égalité des genres, consolidée par un arsenal juridique et des actes concrets. Au regard des pays en recul sur la question des droits des femmes et d’égalité, il est extrêmement important de saluer la dynamique qui est celle du Royaume du Maroc, sous l’impulsion de Sa Majesté le Roi Mohammed VI.»
Un discours qui illustre le décalage entre l’image de modernité projetée par Rabat et la persistance de dispositions juridiques discriminatoires.
À l’inverse, l’Algérie a levé le 4 août 2025 sa propre réserve à l’article 15.4, par décret présidentiel, sous l’impulsion du ministre des Affaires étrangères qui, 29 ans plus tôt, avait présenté l’adhésion initiale du pays avec réserves.
Une levée largement symbolique, puisque la législation algérienne avait déjà été mise en conformité depuis la réforme du Code de la famille en 2005, renforcée par les ajustements de 2019.
Pour rappel, dans la région MENA, plusieurs pays ont levé leurs réserves au fil des années :
Tunisie : levée en 2014, après une réserve initiale en 1985.
Égypte : levée progressive, confirmée en 2008.
Jordanie : levée en 2009.
Liban : levée en 1997.
Mauritanie : levée de sa réserve générale en 2014, tout en maintenant des réserves ciblées sur d’autres articles.
Pays du Golfe : Arabie saoudite, Émirats arabes unis, Qatar, Bahreïn, Koweït et Oman ne maintiennent aucune réserve spécifique à l’article 15.4.
Libye : malgré ses réserves sur l’article 2 et 16, elle n’a jamais maintenu de réserve spécifique à l’article 15.4.
En maintenant seule une telle restriction, le Maroc demeure isolé dans toute la région MENA, y compris face à ses voisins immédiats et aux monarchies du Golfe, pourtant souvent critiquées pour leurs conservatismes juridiques.
Par Larbi Ghazala