Luthier: Chabane Dahdah, pionnier régional de la fabrication d’instruments de musique

On a souvent consacré des articles aux chanteurs de la région d’Aokas, mais il faut le rappeler : la musique n’existe pas sans instruments. Derrière chaque mélodie, il y a des mains patientes qui façonnent, polissent et donnent vie au bois. Dans cet artcile, il est question de Chabane Dahdah, pionnier et passionné, qui a […]

Août 24, 2025 - 00:43
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Luthier: Chabane Dahdah, pionnier régional de la fabrication d’instruments de musique

On a souvent consacré des articles aux chanteurs de la région d’Aokas, mais il faut le rappeler : la musique n’existe pas sans instruments. Derrière chaque mélodie, il y a des mains patientes qui façonnent, polissent et donnent vie au bois. Dans cet artcile, il est question de Chabane Dahdah, pionnier et passionné, qui a introduit la fabrication artisanale d’instruments de musique dans toute la région.

Par Hafit Zaouche

Les spécialistes que nous avons rencontrés ailleurs en Algérie soulignent tous la même chose : fabriquer un instrument exige bien plus que de la passion. Il faut un apprentissage rigoureux, une technique héritée, souvent transmise de père en fils, pour garantir la continuité de ce patrimoine fragile. La fabrication artisanale d’instruments, inscrite dans le domaine de l’artisanat traditionnel, traverse aujourd’hui une période de déclin, faute d’écoles spécialisées ou de structures de formation. «Mis à part quelques ateliers qui se battent pour transmettre ce savoir-faire, le risque est grand de voir disparaître un pan entier de notre héritage musical», nous confiait un musicologue.
À Aokas, Chabane Dahdah incarne cet espoir de sauvegarde. Originaire de Tifernine, dans la commune de Tizi N Berber, il s’est installé il y a plus de quinze ans au village Aguemoune, commune d’Aokas. C’est là, dans son atelier de menuiserie, qu’il s’est mis à transformer le bois en mandolines, guitares, banjos ou violons. Une première dans la région.
Son histoire avec les instruments de musique commence bien avant. «J’ai commencé à jouer de la mandoline en 1996», raconte-t-il. Puis, en 2001, alors qu’il travaillait dans un atelier de menuiserie à Tala Khaled, il tente de fabriquer son premier instrument. Mais des contraintes extérieures l’obligent à abandonner le projet. Ce n’est qu’en 2008, encouragé par un jeune de Iouricine, village de Tizi N Berber, qu’il reprend son rêve et se lance définitivement dans cette aventure. Derrière sa maîtrise, il y a aussi une transmission. Chabane ne manque pas de rendre hommage à celui qui lui a ouvert les secrets du métier : «Le mérite revient beaucoup à Yahia Challali, de Michelet, dans la wilaya de Tizi Ouzou. Il m’a appris presque tout et je lui suis très reconnaissant».
Grand amateur de chanson algerienne, il cite parmi ses références Amar Ezzahi, Matoub Lounès, Kheloui Lounès et Aït Menguellet. Aujourd’hui, il nourrit l’ambition de donner une nouvelle dimension à son atelier. «J’espère pouvoir disposer un jour d’un local au chef-lieu de la daïra d’Aokas pour être plus visible. Aokas respire la culture, et une véritable industrie artisanale de fabrication d’instruments donnerait encore plus de vitalité à cette ville», dit-il avec espoir.
Chabane Dahdah n’est pas seulement un artisan, il est aussi le gardien d’une mémoire sonore, un bâtisseur discret de la scène musicale locale. Là où d’autres voient du bois, lui voit déjà un son, une vibration, une mélodie. Son travail est une passerelle entre les chanteurs d’Aokas et leur public. Bon vent Chabane !
H. Z.