Randonnée: «Afghane», la perle des monts du Hodna

 Des géants immobiles, témoins silencieux du temps, qui semblent protéger la montagne comme on protège un héritage sacré. Mais cette forêt, aussi belle que fragile, vit sous la menace permanente de la hache, du bétail et d’une exploitation humaine incessante. Ses limites reculent, sa végétation régresse… Par Hafit Zaouche Il y a des randonnées qui […]

Oct 4, 2025 - 21:46
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Randonnée: «Afghane», la perle des monts du Hodna

 Des géants immobiles, témoins silencieux du temps, qui semblent protéger la montagne comme on protège un héritage sacré. Mais cette forêt, aussi belle que fragile, vit sous la menace permanente de la hache, du bétail et d’une exploitation humaine incessante. Ses limites reculent, sa végétation régresse…

Par Hafit Zaouche

Il y a des randonnées qui marquent à jamais la mémoire collective, des marches où l’effort se mêle à la découverte et où chaque pas devient une ode à la nature. Celle que nous avons vécue au cœur de la chaîne montagneuse du Hodna, en direction du mont Afghane, en fait partie.
À l’invitation de nos amis de la commune de Boutaleb, dans la wilaya de Sétif, et sous l’impulsion du chaleureux Nabil, nous avons pris le chemin du plus haut sommet du massif : le mont Afghane, perché à 1 886 mètres d’altitude. Là-haut, le monde s’ouvre dans toute sa grandeur. Depuis ce pic, le regard embrasse une vue imprenable sur les wilayas de Sétif, Batna et M’sila. Le sentiment d’être au-dessus de tout, suspendu entre ciel et terre, nous saisit avec une intensité rare.
La marche fut un enchantement. Nous avons traversé la splendide forêt de Boutaleb, royaume des cèdres centenaires. Des géants immobiles, témoins silencieux du temps, qui semblent protéger la montagne comme on protège un héritage sacré. Mais cette forêt, aussi belle que fragile, vit sous la menace permanente de la hache, du bétail et d’une exploitation humaine incessante. Ses limites reculent, sa végétation régresse. Et pourtant, elle mérite tant d’être préservée.
C’est pour cela que des militants écologiques de la région, avec Nabil en tête, plaident depuis des années pour que la forêt de Boutaleb devienne une réserve naturelle nationale. Leur combat est aussi le nôtre. Nous joignons nos voix à celles des amoureux de la nature pour que ce trésor, menacé par les pratiques humaines, soit protégé. Car perdre Boutaleb, ce serait perdre bien plus qu’une forêt : ce serait perdre une part de notre âme.
Après l’effort, un autre plaisir nous attendait. Impossible de passer par Ain Oulmane sans s’arrêter pour savourer son légendaire «choua», ces brochettes d’agneau réputées dans tout l’Est algérien. Ici, le rituel est unique : nul besoin de commander, les serveurs déposent dans l’assiette grappes après grappes de brochettes fumantes jusqu’à ce que le client, rassasié, dise enfin «pouce». Le goût de cette viande, nourrie aux pâturages parfumés d’armoise blanche, est inoubliable. Et le charme du lieu réside aussi dans cette confiance rare : au moment de payer, c’est le client lui-même qui compte ses brochettes. Un geste simple qui en dit long sur l’authenticité de cette tradition.
Puis vint le retour. Et comme toujours, l’ambiance dans le bus transforma la fatigue en fête. Musique, blagues, éclats de rire… L’euphorie de l’escapade se prolongeait, preuve que la randonnée n’est pas qu’une rencontre avec la nature, mais aussi une communion humaine.
Le Hodna, qui doit son nom à l’arabe signifiant «sérénité, paix», porte en lui une vérité profonde. Ses sommets, ses forêts et ses plaines steppiques ne sont pas seulement des paysages à contempler, mais des chemins pour retrouver l’essentiel. Ici, marcher, c’est se reconnecter à la simplicité, c’est se découvrir soi-même, c’est goûter à la plénitude.
Au sommet du mont Afghane, sur les terres du Hodna, nous avons compris que la véritable richesse ne se mesure pas en mètres ni en kilomètres, mais en émotions gravées dans le cœur.
Une randonnée inoubliable, un paradis à préserver, une invitation à revenir.

H. Z.