Une chose est de prendre le pouvoir, une autre de le garder
Avec leur passé de jihadistes passés à la fois par al-Qaïda et par Daech, les nouveaux dirigeants de Syrie ont du mal à se faire accepter par le reste du monde, si dans leur environnement immédiat néanmoins ils donnent le sentiment de commencer déjà à se fondre dans le décor. Les monarchies du Golfe ayant […]
Avec leur passé de jihadistes passés à la fois par al-Qaïda et par Daech, les nouveaux dirigeants de Syrie ont du mal à se faire accepter par le reste du monde, si dans leur environnement immédiat néanmoins ils donnent le sentiment de commencer déjà à se fondre dans le décor. Les monarchies du Golfe ayant été des ennemis déclarés de l’ancien régime syrien, coupable à leurs yeux du crime impardonnable de s’être allié à l’Iran, on comprend qu’elles leur apportent tout le soutien moral et politique dont elles sont capables. Le problème, c’est que dans le court terme, ce n’est pas de cela que Ahmed al-Sharaa et ses amis ont le plus besoin. Ce qu’ils recherchent par-dessus tout, c’est la levée des sanctions économiques américaines et occidentales prises à l’encontre de l’ancien régime, celui de Bachar al-Assad, qui a cessé d’exister. Tant que ces mesures draconiennes sont en place, les pays amis du Golfe ne peuvent pas grand-chose pour eux, aussi désireux qu’ils puissent être de leur venir en aide. En cela, les maîtres tout-puissants sont les Etats-Unis, qui viennent de dépêcher une deuxième mission à Damas, toutefois non pas pour discuter de la question des sanctions, mais de la sécurité des Américains présents en Syrie, et du primat de la poursuite de la lutte contre Daech.
Maintenant, s’il y a une solution au problème des sanctions, elle ne peut pas provenir de l’administration sortante mais de celle qui s’apprête à la remplacer. D’ici donc à l’investiture de Donald Trump, nulle levée des sanctions n’est possible. Or, si l’on a une idée de la politique du nouveau président américain en bien des sujets, on ne sait rien de ce qu’il compte faire à cet égard précis. Supprimera-t-il les sanctions dès sa prise de fonction, ou les maintiendra-t-il, et dans ce cas, pour combien de temps encore, sachant que tant que cela n’est pas fait, l’avenir du nouveau régime est compromis ? Haïat Tahrir Acham, d’où sont issus les nouveaux dirigeants syriens est toujours portée sur la liste américaine des organisations terroristes, et de celles de beaucoup d’autres pays et d’organismes, dont le Conseil de sécurité. La levée des sanctions est conditionnée par l’effacement de son nom de ces listes. On le voit, le plus difficile pour les nouveaux maîtres de Damas n’est pas de prendre le pouvoir mais de le garder. A supposer d’ailleurs qu’ils puissent le garder, rien ne dit encore qu’il s’étende sur tout le pays. Bien des Etats, amis ou non d’ailleurs, se montrent plus intéressés par l’intégralité territoriale de la Syrie que par ce qu’il pourra advenir d’eux. Pour eux, l’impératif catégorique réside dans l’unité de la Syrie, par rapport à quoi tout est secondaire. Ensuite vient leur vœu unanime d’une transition pacifique. Pourvu que la Syrie reste entière et qu’elle change pacifiquement de régime, ses amis dans la région et dans le monde seront contents. Peu importe à leurs yeux par qui elle sera commandée, par d’anciens jihadistes ou par d’authentiques démocrates, encore que pour l’heure on n’en voie pas un seul spécimen. Le nouveau régime verra ses chances de survie augmenter grandement si la nouvelle administration accepte de lever les sanctions sans plus attendre, ou baisser fortement si elle choisit d’attendre pour mieux connaître sa nature et ses véritables intentions.
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