Hommage: Faudel Slim, l’écrivain du silence s’éteint dans la discrétion
Un silence lourd a suivi l’annonce ce 17 septembre 2025 à 13h52. Un silence presque irréel, à l’image de la discrétion de l’écrivain Faudel Slim, qui vient de nous quitter à Béjaïa, enterré dans son village natal de Boudjellil, dans la vallée de la Soummam. Par Hafit Zaouche Pourtant, la nouvelle de sa disparition est […]

Un silence lourd a suivi l’annonce ce 17 septembre 2025 à 13h52. Un silence presque irréel, à l’image de la discrétion de l’écrivain Faudel Slim, qui vient de nous quitter à Béjaïa, enterré dans son village natal de Boudjellil, dans la vallée de la Soummam.
Par Hafit Zaouche
Pourtant, la nouvelle de sa disparition est passée presque inaperçue, comme si la famille culturelle en Algérie avait manqué à son devoir de mémoire. De quoi susciter le doute, tant il est difficile d’imaginer qu’un écrivain de sa trempe puisse s’éteindre dans un tel blackout. Mais Faudel Slim est bien parti, dans le silence qu’il avait choisi comme style de vie.
Né dans un village de Boudjellil, dans la wilaya de Béjaia, à l’indépendance de l’Algérie, Faudel Slim a grandi dans un pays qui se reconstruisait. Élève brillant, il poursuivit ses études dans un lycée de la Mitidja, décrochant un baccalauréat en mathématiques élémentaires, avant d’intégrer l’université des sciences et de la technologie d’Alger. Ingénieur en génie civil diplômé de l’École nationale polytechnique, il mena d’abord une carrière dans les bureaux d’études et les chantiers. Puis, c’est dans l’éducation nationale qu’il marqua de jeunes générations, en tant que professeur des filières techniques et mathématiques.
Mais derrière les chiffres et les structures, une autre passion grandissait : celle de l’écriture. Dès sa retraite, il s’y consacra pleinement, faisant émerger une œuvre aussi sobre que profonde. Littéraire du silence, Faudel Slim a su transformer ses contemplations en livres. Poésie, roman, autobiographie : son œuvre est plurielle.
-Les Vers fanés – un recueil de poèmes simples, chantants, empreints de musicalité.
-Errances – une plongée dans l’univers marin et les divagations intimes d’un poète fasciné par l’infini.
-Le Serment par le sang – un roman où se mêlent amour, fidélité et destin, entre Alger, In Amenas, Paris et le Sacré-Cœur.
-Fragments épars – un recueil autobiographique où l’auteur partage ses souvenirs, anecdotes et réflexions de vie.
-Parfum d’aurore – son dernier roman, publié sur Amazon en janvier 2024, où il osa se glisser dans la peau d’un Français proche de l’extrême droite, exercice audacieux pour un écrivain algérien.
Ses textes, parfois intimes, parfois universels, dessinent une quête de sens et de vérité. Toujours avec pudeur, toujours avec cette modestie qui lui ressemblait.
«La poésie est un moyen d’expression artistique, plus libre, plus proche de l’âme», disait-il. Dans ses vers, il cherchait moins à convaincre qu’à toucher. Dans ses récits, il ne se posait pas en maître, mais en passeur d’émotions. Et c’est peut-être là sa grandeur : Faudel Slim n’a jamais fait de bruit. Ni dans sa vie, ni dans sa mort. Comme si sa plume lui suffisait, comme si ses mots devaient survivre sans que lui-même ne réclame une place dans la lumière.
Pourquoi tant de silence autour de sa disparition ? Pourquoi si peu d’échos dans la presse culturelle ? Peut-être parce que Faudel Slim n’a jamais cherché les projecteurs. Peut-être aussi parce qu’il nous met au défi : celui de reconnaître et de préserver la mémoire de nos écrivains avant qu’il ne soit trop tard.
Son départ est une perte immense, mais aussi un rappel : les voix discrètes sont souvent les plus profondes.
Aujourd’hui, nous saluons l’homme, l’ingénieur, le professeur, le poète, le romancier. Nous saluons surtout l’être humain humble qui, par amour du verbe, a laissé derrière lui une œuvre qui mérite d’être lue et transmise. Qu’il repose en paix, au cœur de sa Soummam natale, dans ce silence qui fut toujours le sien.
H. Z.