Le déclenchement de la guerre américaine en Ukraine a sabordé les pays européens

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Fév 27, 2025 - 07:30
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Le déclenchement de la guerre américaine en Ukraine a sabordé les pays européens

Une contribution de Khider Mesloub – Dans une contribution rédigée dès le déclenchement de la guerre entre la Russie et l’Ukraine, en février 2022, j’écrivais les lignes suivantes. «Contrairement aux affirmations soutenues par ces observateurs aveuglés par leurs conceptions idéologiques tiers-mondistes, selon lesquelles il n’existerait qu’un seul impérialisme : occidental, ce n’est pas la Russie qui mène le jeu, encore moins remporte quelque victoire sur l’échiquier international, mais les Etats-Unis.

Actuellement, les Etats-Unis engrangent des succès sur le plan impérialiste sans mobilisation d’aucun soldat, ni dépense financière excessive. En effet, le poids du financement de l’Ukraine est supporté majoritairement par les pays européens, notamment par le secours «humanitaire» apporté à près de 8 millions de réfugiés et déportés ukrainiens – dès le début de l’opération militaire russe en Ukraine, 17 milliards avaient été débloqués par l’Union européenne pour subvenir aux besoins des réfugiés. Depuis, les fonds débloqués ont considérablement augmenté – et par l’aide militaire octroyée au président Zelensky.

De surcroît, son bras armé, l’OTAN, n’a jamais été autant auréolé de prestige, autant pleinement opérationnel, élargissant sa sphère d’influence et de contrôle sur les quatre continents grâce à ses 800 bases militaires déployées dans 177 pays. Mieux : à la faveur de la guerre en Ukraine, l’OTAN, autrement dit les Etats-Unis, renforce prodigieusement son leadership, matérialisé par l’adhésion de nouveaux pays, l’accroissement substantiel de son financement, l’augmentation faramineuse des commandes d’armements auprès du complexe militaro-industriel américain, la dépendance économique et militaire de l’Europe vis-à-vis de Washington. […]

Outre la Russie, les seconds perdants de cette guerre suscitée et attisée par les Etats-Unis, ce sont les pays européens, de nouveau, comme au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, diplomatiquement en perte d’influence, acculés par ailleurs de passer sous les fourches caudines de l’Oncle Sam, et son bras armé : l’OTAN. Déjà, plusieurs Etats ont décidé d’augmenter substantiellement leur budget en matière d’armements, notamment l’Allemagne qui a annoncé le doublement de son budget militaire, matérialisé, au grand bénéfice des Etats-Unis, par l’achat de 35 avions de combat F-35 américains.

En outre, par la création du chaos en Ukraine, et l’extension de ce chaos à l’ensemble des pays européens impactés par le déferlement de millions de réfugiés et le renchérissement des prix des matières énergétiques occasionnées par les sanctions économiques décrétées par l’Occident, les Etats-Unis entendent entraver l’avancement de la Chine vers l’Europe, compromettant la réalisation des «Routes de la soie» censées transiter également par les pays de l’Europe de l’Est.

Ainsi, dans le cadre de leur stratégie agressive d’endiguement de la Chine (cet ennemi à combattre et abattre), après avoir créé l’alliance AUKUS en 2021 pour torpiller les voies maritimes de la Chine dans la région de l’Indopacifique, les Etats-Unis ouvrent un second front de déstabilisation économique par l’obstruction des voies terrestres européennes destinées à l’acheminement des marchandises en provenance de Chine. Somme toute, les Etats-Unis auront déstabilisé la Russie, l’Europe et la Chine en même temps.

In fine, la stratégie des Etats-Unis, par la fomentation de la politique de la terre brûlée imposée à la Russie, engagée désormais dans une guerre interminable et épuisante, vise à affaiblir sa puissance militaire et son potentiel économique, réduit à la portion autarcique congrue. Mais également par la pérennisation de la guerre en Ukraine, à réaligner l’Europe derrière l’OTAN, dans la perspective de l’ultime conflit militaire contre la Chine. C’est à dessein que l’ancienne cheffe de la diplomatie américaine, Hillary Clinton, pour souligner la perniciosité de la Chine, et surtout pour mettre en garde l’Occident contre les velléités expansionnistes chinoises, a déclaré récemment : «La Russie est une menace à court terme et la Chine à long terme».

De toute évidence, le déclenchement de cette guerre «américaine» aura permis de saborder les velléités des pays européens, notamment de la France et l’Allemagne, de s’émanciper des Etats-Unis par le développement d’une coopération plus intensive avec la Russie.

Avec la «fabrication» de cette guerre en Ukraine, les Etats-Unis auront réalisé victorieusement tous leurs agendas, à la fois sur les plans économique, impérialiste, politique, idéologique, etc. Au plan impérialiste, ils auront réussi à (re)vendre à prix d’or l’OTAN à l’ensemble des pays européens, y compris à des pays longtemps réputés pour leur légendaire neutralité (la Suède, la Finlande et la Suisse). Au plan économique, par l’assujettissement de l’Europe désormais affaiblie et, surtout, entièrement dépendante des Etats-Unis pour l’approvisionnement de ses matières énergétiques et alimentaires achetées par ailleurs à des prix exorbitants. Au plan militaire, l’Europe de la défense est également enterrée, avec comme conséquences bénéfiques pour les Etats-Unis, la réorientation des budgets militaires européens vers l’acquisition d’armements américains sous couvert de l’OTAN. Au plan politique, dans le cadre de la nouvelle polarisation impérialiste mondiale et dans la perspective des préparatifs de guerre contre la Chine, la réactivation des thématiques propagandistes «démocratiques», ces armes occidentales idéologiques de guerre, symbolisées par la classique éculée antienne atlantiste : «défense du monde libre contre les régimes autocratiques.»

Sans conteste, l’Europe, comme le reste du monde, va subir une nouvelle accélération de la crise économique sous l’impact de la guerre et du chaos provoqués par les Etats-Unis.

Ainsi, la principale puissance impérialiste mondiale, pour conserver son hégémonie, a décidé de provoquer le chaos à l’échelle internationale. Et cette stratégie criminelle a été suscitée par Joe Biden, le président démocrate. Le piège du chaos, tendu par les Etats-Unis, s’est refermé sur la Russie, désormais engagée dans une guerre éperdue, l’enlisement d’un conflit meurtrier, dans une fuite en avant aveugle.

Assurément, la guerre en Ukraine ouvre une nouvelle ère de chaos, de déstabilisation et de destruction à l’échelle internationale, excepté, comme à l’accoutumée, aux Etats-Unis, géographiquement excentrés du théâtre du conflit, économiquement et énergétiquement autosuffisants. Cette guerre compromet la reprise économique. La flambée des cours du gaz, du pétrole et d’autres matières premières (en particulier le blé) pénalise essentiellement les populations laborieuses, les classes sociales pauvres de l’ensemble des pays. […]

L’ironie de l’histoire, c’est que non seulement l’Ukraine est sur le point de perdre la guerre militaire, mais l’Union européenne est en train de perdre la «guerre économique» qu’elle entendait livrer à la Russie par les sanctions.

On se souvient que Bruno Le Maire, le ministre de l’Economie (de guerre ?), avait martelé que la France allait livrer à la Russie une «guerre économique totale». Pour assurer la victoire de l’Ukraine, donc du camp occidental, «nous allons livrer une guerre économique et financière totale à la Russie», martelait le ministre de l’Economie, promettant que les puissances occidentales allaient «provoquer l’effondrement de l’économie russe», avait-il proclamé sentencieusement.

Or, non seulement l’Ukraine est en train de perdre la guerre militaire – dans des conditions dramatiques pour les milliers de recrues inexpérimentées qui sont envoyées au front. Mais l’Occident, et la France en particulier, est en train de perdre la «guerre économique» qu’il entendait livrer à la Russie sous couvert de la guerre en Ukraine. […]

Dans cette guerre russo-ukrainienne, les principales victimes de la guerre sont les populations ukrainiennes. Doublement victimes. Victimes des destructions et des massacres. Mais également victimes de l’hystérie patriotique injectée par les pays atlantistes. Car leur combat pour la patrie est vain. En effet, au terme de leur guerre (victorieuse ou perdue) menée pour vivre sous un Etat intégré à l’OTAN et à l’Union européenne, les Ukrainiens hériteront d’un pays ruiné, dévasté, appauvri, dépeuplé, probablement démembré. Et ce ne sont sûrement pas les nations occidentales, certes actuellement très prodigues en matière d’aide en armements coûteux, qui financeront la reconstruction de leur pays, l’Ukraine.

De même, une fois les canons tus et la paix signée entre les dirigeants russes et ukrainiens réconciliés, assurément les populations ukrainiennes sombreront dans l’indigence et la détresse sociale, livrées à elles-mêmes, abandonnées et ignorées des Américains. En revanche, le président Zelensky, comme ses acolytes oligarques, sera toujours opulent, millionnaire.»

Ce 24 février 2025, trois ans après le déclenchement de la guerre en Ukraine, l’administration américaine, faute d’être parvenue à prendre le contrôle du pouvoir russe à la suite d’une défaite militaire envisagée comme certaine, aux fins de neutraliser, autrement dit de mettre hors d’état de nuire le principal allié (militaire) de la Chine ; faute de s’être emparée des précieuses richesses naturelles de la Russie, à la fois en vue de les exploiter pour ses besoins économiques, mais également de les soustraire au régime chinois, le privant ainsi de ces matières énergétiques indispensables à son industrie, et dans le dessein d’arrêter cette interminable guerre coûteuse et infructueuse, donc l’administration américaine, crise économique oblige, a décidé de changer de stratégie.

Au lieu de s’emparer de la Russie par la force, ou plus exactement par une guerre par procuration, pour encercler et isoler la Chine, sa principale cible militaire dans le conflit militaire en préparation, Washington emprunte dorénavant la voie pacifique de la concorde diplomatique, c’est-à-dire du partenariat. Un partenariat américano-russe bâti sur le dos des pays de l’Union européenne, considérés comme quantité négligeable par la Maison-Blanche, en particulier depuis leur effondrement économique et leur naufrage gouvernemental, aggravés par la «guerre américaine» déclenchée en Ukraine.

Trump, par la diplomatie, semble réussir son entreprise de détachement de la Russie de la Chine.  Une entreprise que Biden, par la guerre, a été incapable de concrétiser.

In fine, les principaux perdants de cette guerre de proxy en Ukraine, suscitée et attisée par les Etats-Unis, sont les pays européens. En tout cas, tel était l’objectif visé par Washington : la création du chaos dans tous les pays européens pour neutraliser leur concurrence, détruire leurs économies.

Le piège du chaos tendu par les Etats-Unis se referme définitivement sur les pays européens, désormais mis hors-jeu économique et diplomatique.

Ainsi, une nouvelle idylle se noue entre Washington et Moscou, un amour naissant scellé entre Trump et Poutine.

Il s’agit d’une alliance d’opportunité établie entre deux chefs d’Etat qui président aux destinées de pays respectifs capitalistes en proie à une crise économique systémique, engagés par ailleurs dans une économie de guerre et la militarisation (fascisation) de leur société. Ne pas perdre de vue que le Kremlin est épuisé par l’effort de guerre et les sanctions économiques. De même, les Etats-Unis sont au bord de la faillite. Depuis le début du siècle, en l’espace de 25 ans, la dette américaine est passée de moins de 700 milliards de dollars en 2000 à plus de 35 000 milliards de dollars aujourd’hui. Et les intérêts de la dette américaine se montent à 1 140 milliards en 2024, soit 76% de l’ensemble des impôts sur le revenu perçus.

D’autre part, la réélection de l’imprudent et impudent Donald Trump aura permis de dévoiler que les mobiles de la guerre d’Ukraine n’étaient pas la sauvegarde de la démocratie, mais la mainmise sur les richesses naturelles ukrainiennes, notamment les minerais et les terres rares (1). Ce que la clique mafieuse de Biden n’a pu extorquer par la guerre, la bande de brigands de Trump compte se l’octroyer «pacifiquement» par les intimidations. «L’Etat américain attend de Kiev l’accès à 50% des minerais stratégiques ukrainiens, en compensation de l’aide militaire et économique américaine», a ordonné Trump au piètre comédien Zelensky, ce «dictateur sans élection».

Conséquence de ce retournement d’alliance surprise : avec cette liaison dangereuse nouée entre Washington et Moscou, la fraternité du «Sud Global» vient de prendre du plomb dans l’aile.

Pour conclure, il est de la plus haute importance de rappeler cette vérité historique. Sous le capital impérialiste, dans l’arène mondiale tous les Etats sont à la fois en collaboration (commerce-échange) et en concurrence commerciales et rivalités géopolitiques. Les alliés capitalistes mondialisés sont à la fois associés cordiaux et concurrents coriaces. Ils sont tous inscrits dans des enjeux géopolitiques impérialistes marqués par des rivalités commerciales mondiales, jeux diplomatiques opportunistes et retournements d’alliance surprise, comme viennent de l’illustrer les deux puissances étasuniennes et russes.

K. M.

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