Musique: Salim Bellouze, la voix populaire d’Aokas

Auteur de cinq albums, chanteur prolifique et fin observateur de la société Algerienne, Salim Bellouze est aujourd’hui une figure incontournable de la scène musicale locale. Enfant du village Aliouene, dans la commune d’Aokas, ce passionné de chanson rythmée s’impose depuis deux décennies comme le porte-voix d’une jeunesse en quête d’espoir, d’amour et de reconnaissance. Par […]

Août 7, 2025 - 01:22
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Musique: Salim Bellouze, la voix populaire d’Aokas

Auteur de cinq albums, chanteur prolifique et fin observateur de la société Algerienne, Salim Bellouze est aujourd’hui une figure incontournable de la scène musicale locale. Enfant du village Aliouene, dans la commune d’Aokas, ce passionné de chanson rythmée s’impose depuis deux décennies comme le porte-voix d’une jeunesse en quête d’espoir, d’amour et de reconnaissance.

Par Hafit Zaouche

Salim Bellouze n’a rien perdu de sa verve ni de sa sincérité. Son cinquième album, «Atyawi Wadu» («Le vent l’emportera»), est venu enrichir un parcours déjà solide. Un album composé de huit titres, véritable hymne à l’amour et à la paix, selon son auteur. «C’est un album que j’ai porté avec le cœur, comme tous les autres», confie-t-il. Mais plus encore que ses mélodies festives et ses rythmes entraînants, c’est le contenu des textes de Salim qui interpelle. «Je parle d’amour, de nostalgie, des pressions sociales, de la misère parfois. Je veux toucher les jeunes, leur dire qu’on n’est pas seuls, qu’on peut avancer». Et c’est peut-être là que réside sa force : l’authenticité.
Son premier album, L’histoire de mon pays, paraît en 2003. Il sera suivi de Segasse Mitzerigh (2008), Mmis N’tmurt (2009), Tsalu (2012) et enfin Atyawi Wadu en 2016. Un rythme certes espacé, mais qui traduit aussi le soin apporté à chaque œuvre. «J’ai mis cinq ans entre mon premier et deuxième album. Ce sont mes fans qui m’ont motivé à revenir. Sans eux, je n’aurais peut-être pas persisté», avoue-t-il humblement. Car oui, Salim est aussi cela : un artiste à l’écoute de son public, convaincu que la scène appartient à ceux qui savent toucher les cœurs. Spécialiste du genre rythmique et du «spécial-fêtes», Salim défend avec énergie un style souvent critiqué par certains puristes. Mais il assume, et contre-attaque : «Ceux qui critiquent ce genre oublient qu’il est écouté et adopté par des milliers de jeunes. Le public est le seul juge». Pour lui, la chanson kabyle doit vivre, évoluer, s’ouvrir aux sonorités nouvelles sans pour autant renier ses racines. Et justement, Salim veille à cet équilibre : «Je reste fidèle à ma kabylité. Même si j’utilise de nouveaux instruments ou rythmes, je ne veux pas dénaturer l’âme de notre chanson». Une position claire, nuancée, à l’image de l’artiste.
À chaque apparition publique, Salim Bellouze ne manque jamais de rendre hommage à Azzedine Berkouk, le premier chanteur d’Aokas à avoir mis un album sur le marché, à la fin des années 1980. «Il a brisé un tabou, il a ouvert la voie. À travers mon album ‘’Mmis N’tmurt’’, je lui rends hommage. Il a chanté l’amour, la douleur, la société. Il a fait pleurer des hommes et des femmes avec ses textes si justes». Cet attachement profond à son aîné est révélateur : Salim est un artiste de transmission, qui sait d’où il vient et n’oublie jamais ceux qui l’ont inspiré.
Dans ses chansons, Salim puise dans sa propre expérience mais aussi dans celle de toute une génération. L’amour, la solitude, les désillusions sociales, l’exil, l’amitié perdue ou retrouvé : tout ce qui touche à la vie quotidienne des jeunes Algériens devient matière à chanson. «Je m’inspire de mon vécu et de celui des autres. Mon but est d’éveiller, de faire réfléchir, tout en faisant plaisir».
En écoutant Salim Bellouze, on comprend vite que ses rythmes festifs ne sont qu’un écrin à des messages profonds. Il est de ces artistes qui, sans faire de bruit, changent les mentalités, soulèvent les consciences, et mettent le doigt sur les plaies d’une société qui se cherche encore. Avec son timbre unique et ses mots justes, Salim Bellouze trace un sillon discret mais solide dans l’histoire de la chanson kabyle moderne. Un messager modeste, mais incontournable, qui continue de chanter l’amour, la vérité, et la dignité… au rythme de son peuple. H. Z.