Les footballeuses d’Aokas: Mémoire d’un combat, appel à une renaissance

C’est dans les locaux modestes de la Maison de jeunes d’Aokas, en 2009, qu’a été lancée la première section de football féminin. Une initiative audacieuse dans un contexte social où la simple idée d’une fille en crampons sur un terrain suffisait à provoquer des remous. Par Hafit Zaouche On dit souvent que certaines pages de […]

Juil 15, 2025 - 23:08
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Les footballeuses d’Aokas: Mémoire d’un combat,  appel à une renaissance

C’est dans les locaux modestes de la Maison de jeunes d’Aokas, en 2009, qu’a été lancée la première section de football féminin. Une initiative audacieuse dans un contexte social où la simple idée d’une fille en crampons sur un terrain suffisait à provoquer des remous.

Par Hafit Zaouche
On dit souvent que certaines pages de l’histoire sont brèves, mais marquent à jamais. Celle du football féminin à Aokas en est l’exemple parfait. Entre courage individuel et résistance collective, cette aventure sportive, amorcée en 2009, mérite d’être racontée, célébrée et surtout… poursuivie.
C’est dans les locaux modestes de la Maison de jeunes d’Aokas, en 2009, qu’a été lancée la première section de football féminin. Une initiative audacieuse dans un contexte social où la simple idée d’une fille en crampons sur un terrain suffisait à provoquer des remous. Pourtant, cette expérience fut un souffle nouveau dans la région. Le FCAokas (Féminin Club Aokas) est ainsi né, porté par des encadrants passionnés et des jeunes joueuses déterminées. Mais ce rêve collectif fut de courte durée. En dépit du talent, de l’énergie et de la ferveur, le club s’éteint après quelques années d’existence, victime du manque de moyens, de soutien institutionnel et surtout d’un regard social encore pesant.

Les pionnières : Célia, Dounia et les autres
Si le FCAokas n’est plus, ses anciennes joueuses, elles, continuent de porter haut les couleurs d’Aokas. Célia Chabane, originaire du village de Tazrourt, est devenue la première joueuse de la daïra d’Aokas à intégrer une sélection nationale, en rejoignant l’équipe nationale U20. Formée à l’école Sonatrach d’Aokas, elle a ensuite intégré le prestigieux FC Béjaïa (FCB), club phare du football féminin algérien. Dotée d’une rage de vaincre remarquable, elle a ouvert la voie à d’autres filles de la région. Autre figure emblématique : Dounia Zizi, native du quartier d’Ansa, qui a, elle aussi, porté les couleurs de l’équipe nationale, en catégorie U15. Aujourd’hui, elle poursuit ses études en sciences du sport, spécialité football, à l’université de Béjaïa, tout en se formant comme future entraîneuse. Dounia est en passe de devenir la première technicienne de football issue d’Aokas, un symbole fort pour toute une génération. À leurs côtés, d’autres Aokassiennes ont brillé dans les championnats nationaux : Sara Saïdoune, Celia Chabane et Dounia Zizi ont évolué au FCB (feminin club de Bejaia), preuve que la flamme allumée par le FCAokas ne s’est jamais vraiment éteinte.

L’arbitrage, une autre forme de résistance
Le football féminin à Aokas ne se limite pas aux joueuses. Il compte aussi des arbitres pionnières, qui ont su, elles aussi, briser les carcans. Thiziri Ferhoun, première arbitre centrale de la région, fait figure de pionnière dans un univers encore largement dominé par les hommes. À ses côtés, Guemouni Macelia, également formée à Aokas, officie dans les compétitions officielles de la ligue de Béjaïa. Deux trajectoires exemplaires, qui montrent que le combat pour la reconnaissance passe aussi par le sifflet.

Ne laissons pas l’histoire s’interrompre
L’histoire du football féminin à Aokas est celle d’une rupture courageuse avec les normes sociales, d’une affirmation lente mais puissante du droit des femmes à exister dans l’espace public, à se battre pour leurs rêves, à courir, tomber, se relever et gagner. Le FCAokas a disparu, mais ses héritières sont là, sur les terrains, dans les écoles, à l’université, dans les formations d’arbitrage. Il est temps que les autorités locales, les associations sportives, les parents et les acteurs culturels de la région unissent leurs efforts pour redonner vie à un club qui a semé l’espoir. Ce n’est pas seulement une question de sport, c’est une question de justice, d’équité et de modernité. Aokas, ville de culture, de savoir, de courage, ne peut pas rester à l’écart de cette dynamique nationale et mondiale qui fait du sport féminin un levier d’émancipation.

Redonnons aux footballeuses d’Aokas leur terrain Et offrons à toutes les Tina, Célia, Dounia et Thiziri de demain… un vrai stade où rêver en grand.

H. Z.