Ségolène Royal dénonce un climat de stigmatisation injustifiée : « Il faut changer de posture vis-à-vis de l’Algérie »
Dans une intervention hier soir sur BFMTV, Ségolène Royal a exprimé de vives critiques envers la position actuelle de la France vis-à-vis de l’Algérie, et plus particulièrement à l’égard de l’« acharnement médiatique » dont ce pays fait l’objet en France.L’ancienne ministre, qui a également été candidate à la présidentielle, a souligné la nécessité d’une […]
Dans une intervention hier soir sur BFMTV, Ségolène Royal a exprimé de vives critiques envers la position actuelle de la France vis-à-vis de l’Algérie, et plus particulièrement à l’égard de l’« acharnement médiatique » dont ce pays fait l’objet en France.
L’ancienne ministre, qui a également été candidate à la présidentielle, a souligné la nécessité d’une refonte de la relation entre les deux nations, en dénonçant un climat de méfiance et de stigmatisation injustifiée. Royal a réagi aux propos de Patrick Stephanini, représentant spécial du ministre de l’Intérieur, qui avait abordé les relations diplomatiques entre la France et l’Algérie à travers la question de la « rente mémorielle ». Ce terme, qu’elle juge « abominable », fait référence à l’idée selon laquelle l’Algérie exploiterait son passé colonial pour obtenir des avantages diplomatiques et économiques. Pour Royal, cette vision ne fait qu’entretenir une relation conflictuelle et ne permet pas d’enclencher un véritable processus de réconciliation. L’ex-ministre n’a pas manqué de rappeler les dérapages historiques, notamment ceux d’individus politiques et médiatiques qui ont osé qualifier l’histoire coloniale d’Algérie de « bienfait », un point qui a choqué l’opinion publique. Selon l’ancienne candidate à l’élection présidentielle battue par Sarkozy en 2007, « la colonisation est un ensauvagement ». Elle dénonce ainsi une posture qui minimise l’ampleur des souffrances endurées par les Algériens durant la colonisation et la guerre d’Algérie. « Nous avons été des barbares, comme le disait Aimé Césaire », a-t-elle rappelé, insistant sur l’importance de reconnaître ce passif historique au lieu de tenter de tourner la page trop rapidement. « On n’est pas obligé d’oublier et d’insulter les algériens en leur disant que vous exploitez la rente mémorielle », explique-t-elle sur le plateau de la chaîne d’information. « Ils ont quand même beaucoup donné, beaucoup payé », s’émeut Ségolène Royal. L’acharnement médiatique contre l’Algérie, selon Royal, se traduit notamment par une focalisation excessive sur des faits isolés, comme les expulsions de ressortissants algériens en situation irrégulière, sans jamais mettre en lumière les contributions positives de la communauté algérienne en France. « Jamais un mot positif sur les Algériens qui travaillent en France. Pourquoi n’entend-on jamais parler des Algériens qui travaillent dans nos hôpitaux, nos usines, ou qui participent activement à l’économie du pays? », a-t-elle interrogé, faisant référence à la manière dont les médias français alimentent un climat de défiance et de stéréotypes négatifs sur les Algériens. La question de la « délinquance » algérienne, trop souvent évoquée dans les médias, n’échappe pas à la critique de Royal. « Vous ne tournez pas la page quand vous voulez croire que tous les Algériens sont des délinquants, quand l’histoire est frelatée », a-t-elle dit. Elle souligne que les politiques publiques, notamment celles mises en œuvre par le ministère de l’Intérieur, ne sont pas toujours respectueuses des principes d’équité et de dignité humaine. Selon elle, la manière dont certaines expulsions sont orchestrées ressemble davantage à une opération de communication qu’à une véritable application de la loi. Ségolène Royal conclut son intervention par un appel fort à la responsabilité des politiques et des médias. « Il faut changer de posture. Nous ne pouvons pas continuer à insulter la mémoire des Algériens et leur héritage historique, ni à les présenter sous un jour systématiquement négatif », insiste-t-elle. Elle appelle à une refondation des relations franco-algériennes, basées sur le respect, la vérité historique et la reconnaissance des contributions mutuelles. L’ancienne ministre met en lumière le fait que l’image de la France, notamment à travers son traitement des gilets jaunes et des manifestants écologiques, a été ternie sur la scène internationale. « La France ne donne plus l’exemple des droits de l’homme quand elle réprime ses propres citoyens », a-t-elle dénoncé, soulignant les violences policières qui ont frappé les manifestants en 2018 et 2019. « Vous croyez que la France a donné l’exemple ?», demande-t-elle. « Je ne crois pas que la France ait donné un bon exemple en mutilant des manifestants lors des Gilets jaunes », a-t-elle affirmé. Dans ce contexte, Ségolène Royal milite pour un changement de ton et un réajustement des relations diplomatiques entre la France et l’Algérie, appelant à une reconnaissance plus juste de l’histoire et de la réalité sociale des deux pays.
Meriem B.