Un carrefour artistique ouvert à tous les talents : L’IFA d’Annaba élargit ses horizons pour 2025

L’Institut Français d’Algérie (IFA) à Annaba propose une programmation culturelle riche et diversifiée, visant à dynamiser la scène artistique locale et à offrir un espace de rencontre pour les créateurs de tous horizons. En plus des cours de français, accessibles à l’espace Langue et Savoirs et l’antenne Jeunesse (située à l’Avant-Port), qui proposent des activités éducatives et ludiques aux jeunes apprenants et un programme de formation continue pour les enseignants avec une approche moderne et des méthodes d’enseignement en constante amélioration, une panoplie d’activités est également organisée, s’adressant à un public aussi large que varié.

Dans le cadre de son programme de résidences artistiques, l’IFA a récemment accueilli l’artiste et productrice franco-tunisienne Nawel Ben Kraim, qui prépare, avec son groupe, son nouvel album pour 2025. Une nouvelle année qui s’annonce riche en partages, en échanges de savoir-faire et en coopération entre les artistes d’Algérie et de France. Ce programme ouvrira de nouveaux horizons aux artistes locaux et étrangers, favorisant des projets de création à travers lesquels les cultures des deux rives de la Méditerranée donneront naissance à des œuvres originales. Nous en avons eu un aperçu, bref mais impressionnant, avec l’exposition « Wasla, Marseille-Alger-Ghardaïa », présentée par le collectif « Suspended Spaces », fruit d’une série de résidences menées entre 2021 et 2024 avec le précieux concours de pas moins de 22 artistes, dont Mounir Gouri, diplômé de l’École régionale des beaux-arts d’Annaba et qui a fait carrière en France. Sans oublier la tournée nationale du groupe « Les Turquerie » et de la talentueuse chanteuse algérienne Neila Benloucif.

« Les résidences, pépinières vitales pour la culture »

Philippe Laleu, porteur de ce programme et directeur de l’IFA d’Annaba, explique : « Les résidences sont un programme qui me tient à cœur. C’est un projet que j’ai mis en place dans tous les IFA où j’ai été en poste. Ces résidences sont des carrefours, un moyen pour les artistes locaux de rencontrer des artistes d’autres pays, mais aussi d’autres artistes locaux. Comme je le conçois, les résidences sont des pépinières vitales pour la culture. Celle de l’IFA d’Annaba est la quatrième que je lance sur un poste. Elle est faite pour accueillir des artistes de toutes les disciplines dans un cadre convivial. Elle offre un hébergement complet avec un atelier et un lieu commun où les artistes peuvent échanger et donner libre cours à leur esprit créatif. Nous en sommes à la troisième résidence avec Mme Nawel Ben Kraiem. Cette année, nous avons pour la première fois le LAB DZ à Annaba, avec trois réalisateurs et leurs équipes de tournage. Ce fut une agréable expérience, notamment de par le travail effectué autour de l’histoire et du patrimoine de la ville d’Annaba. C’est la première fois que le LAB DZ travaille sur ces sujets ». Dans une autre déclinaison de la notion de « patrimoine », la chanteuse bônoise Neila Benloucif et le groupe « Les Turquerie » ont ajouté leur pierre à l’édifice. Neila possède un don rare, similaire à celui de feu Rachid Taha : celui de transformer le répertoire classique en une version contemporaine, accessible à un plus large public. Avant de rejoindre l’aventure des Turquerie, elle s’était déjà distinguée sur la scène d’Annaba en reprenant des chansons des répertoires Maâlouf et Chaâbi à la manière de Marty McFly, en ajoutant une touche Pop et Rock. La rencontre entre Neila et Les Turquerie a donné naissance à une fusion entre l’Europe baroque et le grand Maghreb arabo-andalou-amazigh, dans un spectacle d’anthologie. Cette résidence a permis au groupe d’enregistrer plusieurs titres dans le studio d’enregistrement de l’IFA d’Annaba.

Un studio d’enregistrement pour soutenir les artistes

Un studio équipé selon les normes internationales est mis à la disposition des artistes d’Annaba. En effet, l’IFA a lancé des inscriptions pour une « Jam Session » jusqu’au 15 janvier 2025. Cette initiative offre aux musiciens et chanteurs un accompagnement professionnel dans l’enregistrement de leurs œuvres, avec la possibilité de partager leurs morceaux sur les réseaux sociaux des IFA d’Algérie. « Les Jam Sessions nous permettront de découvrir de jeunes groupes qui vont se produire ici, pour lesquels nous pourrons enregistrer quelques titres, à titre gracieux, afin de les soutenir, de les aider à se développer et leur permettre de diffuser leur travail. Nous sommes à la fois un outil de relais et de soutien à la création », nous explique M. Laleu.

Théâtre, poésie, danse et talents prometteurs

L’IFA propose également une série d’ateliers artistiques, à commencer par l’atelier « Théatron », qui en est à sa 15ème édition. Cet atelier offre des formations d’initiation aux arts de la scène depuis 2018, et organise des spectacles où les participants peuvent mettre en pratique leur apprentissage et vivre l’expérience de la scène à travers des adaptations. Ce fut le cas avec « Le Tartuffe » en 2019, « Le Marchand de Néo-Venise De Wish », « Larmes de cendres » et « SIN, Perdue dans ses sangs » en 2024. Des spectacles qui ont mis en lumière d’impressionnants talents d’acteurs, à l’image de Nadine Naceri, Lina Nourhane Benmaïche, Nassim Djebaili et Sami Rachid Ghit. En effet, plusieurs animateurs des ateliers de la médiathèque ont fait leurs classes dans l’atelier « Théatron ». Mais cet atelier est loin d’être le seul proposé par l’IFA : il existe également un atelier d’écriture poétique, animé par Nassim Djebaili, qui explore des thèmes issus de toutes les cultures du monde et donne naissance à des restitutions aussi riches qu’originales, au même titre que les participants qui se distinguent à chaque session. Entre 2023 et 2024, l’IFA a créé trois nouveaux ateliers : photographie, danse contemporaine et danse de salon, avec des listes d’attente pour les inscriptions. C’est dire l’engouement des jeunes d’Annaba pour l’apprentissage de nouvelles formes d’art.

Une Galerie d’art qui donne sur le monde

Les artistes plasticiens occupent une place particulière dans le programme culturel, grâce notamment à la Galerie d’art de l’IFA, située à l’Avant-Port. Avant même son inauguration en juin 2023, cette galerie était déjà le rendez-vous des artistes plasticiens d’Annaba, notamment les étudiants de l’école des beaux-arts, qui y ont exposé leurs œuvres et bénéficié de plusieurs stages. Sans oublier les vernissages, qui ont donné lieu à des rencontres entre artistes des deux rives de la Méditerranée. Le meilleur exemple est sans doute « La Grande Exposition d’Annaba », qui s’est tenu en mai 2024, dans le cadre de la deuxième édition de la Biennale de Design Algéro-Française « DZIGN », sous la supervision de l’architecte d’intérieur et designer global algérienne, Feriel Gasmi Issiakhem. Sous le thème « Pour un monde réel », cette exposition de design social a regroupé la restitution du projet « Les nouveaux stades » de Xavier Boissarie et Paul Emilieu, des photographies d’archives du patrimoine bâti de la ville d’Annaba par l’association Madina, des prototypes d’aires de stationnement pour vélos par l’association Annaba Bike City, des prototypes de l’association Dzayer Bénévole (réfrigérateurs du désert et structures gonflables pour personnes handicapées moteurs, entre autres) ainsi que le projet dirigé par l’enseignant et artiste Bouzid Temtem. Cet événement a permis aux artistes bônois de contribuer et de découvrir de nouvelles formes d’art qui entrent en symbiose avec l’environnement dans une dimension écologique. De nouvelles perspectives qu’ils pourront explorer en janvier 2025 à travers l’exposition « Chouf l’Art », comme nous l’explique M. Laleu : « ‘‘Chouf l’Art’’ est notre prochaine exposition, la troisième édition pour être précis. Nous avons invité les étudiants et les diplômés de l’école des beaux-arts à exposer leurs œuvres dans notre galerie. C’est à travers de tels événements que nous avons découvert beaucoup de talents, avec lesquels nous travaillons. La particularité de l’édition 2025 est que l’appel à projets est aussi accessible aux jeunes étudiants des beaux-arts en France. L’idée est de faire rencontrer les jeunes créateurs des deux rives de la Méditerranée. C’est notre modeste contribution auprès de ces artistes, d’où qu’ils viennent, pour qu’ils puissent s’épanouir et partager leurs talents avec leurs homologues d’Algérie et de France ».

Le Manga, une passion sans frontière

Si la France est le premier consommateur de mangas en Occident, l’Algérie est le premier dans le monde arabe. C’est grâce au Club Dorothée que Dragon Ball Z a fait son entrée en Algérie dans les années 90, sans oublier Nicky Larson. Suivis de près par Dragon Quest, Détective Conan, et Nadia, le secret de l’eau bleue, ces séries, doublées en arabe classique sur les chaînes câblées algériennes et tunisiennes, sont devenues des incontournables de la nouvelle pop culture des deux rives de la Méditerranée. L’Algérie en est à la 16e édition du Festival international de la bande dessinée d’Alger. Et depuis l’ouverture de la Galerie d’art de l’IFA, les otakus (fans de manga) peuvent exprimer leur passion pour ces romans graphiques japonais à travers des ateliers et des concours de dessin manga, mais pas seulement. En septembre dernier, l’IFA a organisé une édition spéciale des Journées Manga, avec la participation du champion national de cosplay, Jimy Props. Ce dernier, qui s’est présenté dans un cosplay d’Iron Man parfaitement fidèle à l’adaptation cinématographique du personnage, a également animé un atelier de cosplay pour le plus grand plaisir des otakus et des fans de Marvel.

Soufiane Sadouki

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