Un final explosif pour Alge’Rire 2025: L’humour algérien a de l’audace

Clap de fin en apothéose pour Alge’Rire 2025 au Théâtre national algérien Mahieddine-Bachtarzi (TNA). La scène a vibré le samedi 19 juillet, sous les éclats de rire d’un public conquis par une programmation savoureuse mêlant satire sociale, humour du quotidien et engagement. Bien entendu, ce Gala de clôture a indubitablement confirmé une chose : la […] The post Un final explosif pour Alge’Rire 2025: L’humour algérien a de l’audace appeared first on Le Jeune Indépendant.

Juil 20, 2025 - 22:03
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Un final explosif pour Alge’Rire 2025: L’humour algérien a de l’audace

Clap de fin en apothéose pour Alge’Rire 2025 au Théâtre national algérien Mahieddine-Bachtarzi (TNA). La scène a vibré le samedi 19 juillet, sous les éclats de rire d’un public conquis par une programmation savoureuse mêlant satire sociale, humour du quotidien et engagement. Bien entendu, ce Gala de clôture a indubitablement confirmé une chose : la scène comique algérienne bouillonne de talents et d’audace.
Premier à entrer en scène, Adem kassouri a donné le ton, celui de l’autodérision lucide, de l’ironie conjugale made in Oran. Pour lui, « on ne se marie pas par amour », une déclaration à double tranchant qu’il développe avec finesse. Marié à une femme qui l’aime sincèrement, il joue sur le contraste émotionnel dans leur couple, enchaînant avec les éternels conflits entre belle-fille et belle-mère. Il évoque avec humour les coutumes oranaises autour du mariage, leurs rituels absurdes, les hammams stressants, le voyage de noces raté, tout y passe, pour le plus grand plaisir d’un public hilare.
Avec une énergie brute, Samy Gougam livre la chronique vive et sans fard d’un quartier populaire à Hussein-Dey, plus précisément des veillées qui l’animent. Il transforme cet espace urbain en véritable scène de théâtre social, où la débrouille tient lieu de loi et où l’humour naît du chaos quotidien. « Celui qui veut faire un film sur la piraterie, qu’il vienne à mon quartier », lâche-t-il, provocateur. Dans cette chronique urbaine, il jongle entre portraits hauts en couleur, références aux « barbus », à la petite mafia locale, et à une jeunesse souvent stigmatisée. Il joue habilement avec les stéréotypes liés à la délinquance pour mieux les détourner, dans un style critique mais ironique, évitant le moralisme pour privilégier le clin d’œil complice.
La chronique devient alors politique, lorsqu’il évoque la banalisation de la drogue, ou encore la frustration face au programme AADL, et ses absurdités géographiques. Il n’épargne le « enseignants d’arabe « traumatisants » comparés à leurs collègues de français, plus cools. Du rire, mais jamais sans fond. Au-delà de la satire, Sami signe une chronique d’espoir, en valorisant la créativité et l’ingéniosité des jeunes de son quartier. Grâce à un humour interactif et spontané, il transforme la scène en agora populaire, donnant voix à ceux qu’on entend trop peu.
Connu pour ses rôles de « méchant » dans les feuilletons ramadanesques « El khawa » et « Liyam », Khaled Benaïssa s’amuse de cette image de « salopard » qui lui colle à la peau. Il lève le voile sur les coulisses du tournage, les tensions, les ratés, les quiproquos avec les fans qui confondent souvent l’acteur et le personnage. Entre confidences et humour noir, il déconstruit avec brio les mécaniques du star-system local.

Le rire comme scalpel social
Slimane Dris, lui, propose un humour tout en finesse, inspiré par sa propre histoire. Né dans un foyer multilingue (kabyle, arabophone et francophone), il grandit entre les langues, les malentendus et les fous rires. Son passage à l’ISMAS devient une galerie de situations burlesques et symphonique, tout comme les anecdotes sur sa tante, stratège familiale hors pair. La bureaucratie, quant à elle, devient entre ses mains un théâtre de l’absurde.
L’humoriste au scalpel, Farés Barket revisite la virilité à l’algérienne, cette posture froide, autoritaire, en option « nhabkom » (je vous aime) qui reste un luxe rare, presque tabou. Farès démonte ce stéréotype avec une autodérision salvatrice, se moquant de cette façade que beaucoup d’hommes ont dû apprendre à porter comme une armure, souvent au prix de leur propre sensibilité, histoire de ne pas paraître « efféminé » aux yeux d’une société « sclérosée ».
Pour sa part, Hichem est sans tabou. Humoriste non-voyant, il dynamite les clichés liés au handicap. Avec un humour tranchant, il parodie sa propre situation, évoque l’amour « perçu » par les non-voyants. Avec lui, rien n’est intouchable, tout est matière à rire et à réfléchir.
Son style afro, il l’assume avec panache. Mouaadh Bennacer en fait un ressort comique, au même titre que sa relation compliquée avec son père chaoui. L’un et l’autre deviennent des symboles d’une jeunesse en quête d’affirmation. Il n’hésite pas aussi à cultiver une forme d’auto-parodie fine, touchante et pour ainsi dire désarment notamment autour de sa vie amoureuse, ou plutôt de ses déboires sentimentaux.
Comme convenu, Juste Inès a fait vibrer de rire le gala avec un regard acéré sur le célibat féminin, mêlant finesse d’observation et sens aigu de la répartie. Dans un style à la fois ironique et subtilement provocateur, elle questionne les injonctions sociales pesant sur les femmes non mariées, ces remarques familiales à peine voilées, ou encore ces attentes culturelles qui peinent à évoluer. Avec une grande maîtrise du second degré, elle dédramatise le célibat, le détourne des discours habituels de compassion ou de moquerie, pour en faire un sujet d’humour intelligent et libérateur. Elle joue sur les paradoxes, la pression de « trouver quelqu’un », les conseils absurdes des tantes, les rendez-vous foireux, tout y passe, mais avec une élégance piquante qui évite la plainte ou le règlement de comptes.
Enfin, Khalifa BMK fait mouche en abordant les travers de notre époque connectée avec une précision redoutable… et une bienveillance désarmante. Entre deux punchlines savoureuses, il dresse le portrait d’une société accro aux écrans, raillant avec justesse les selfies absurdes avec mamie, l’obsession des likes ou encore la quête effrénée de validation numérique. Mais BMK ne s’épargne pas lui-même, il interroge aussi son propre rapport au public, dans un jeu de miroir où chacun se reconnaît.

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