Exil
Alors que depuis quelques mois les rumeurs sur un traité de paix entre Ankara et les dissidents Kurdes grossissent, la situation entre les deux partis semble buter sur un point de contention qui risque de faire échouer cet accord tant attendu. En effet le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) a réclamé à la Turquie […]

Alors que depuis quelques mois les rumeurs sur un traité de paix entre Ankara et les dissidents Kurdes grossissent, la situation entre les deux partis semble buter sur un point de contention qui risque de faire échouer cet accord tant attendu. En effet le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) a réclamé à la Turquie un allègement de « l’isolement » carcéral d’Abdullah Öcalan, présentant son fondateur comme le « négociateur en chef » du groupe en cas de pourparlers de paix, après quatre décennies d’une guérilla sanglante. Dans un entretien exclusif à l’AFP lundi soir, le mouvement a fustigé le manque à ce jour de « garanties » apportées par la Turquie pour lancer ce processus. Le groupe, classé organisation « terroriste » par Ankara et ses alliés occidentaux, a dit refuser tout exil de ses membres. Dans une annonce historique le 12 mai, le PKK a proclamé sa dissolution et la fin de quatre décennies d’une guérilla ayant fait plus de 40.000 morts. L’organisation répondait à un appel lancé fin février par son chef historique, Abdullah Öcalan, emprisonné depuis 1999. Si le président turc Recep Tayyip Erdogan a salué la dissolution, son ministère de la Défense a averti que les opérations contre le PKK se poursuivraient jusqu’à ce que son aire de déploiement soit « nettoyée ». Avec la dissolution et la fin de la « lutte armée », « nous donnons une réelle chance à la paix », a estimé Zagros Hiwa, porte-parole de la branche politique du PKK, dans des réponses écrites envoyées à l’AFP. « Nous attendons de l’État turc des amendements des conditions d’isolement sur l’île-prison d’Imrali, et qu’il fournisse au leader (Öcalan) des conditions de travail libres et sûres afin qu’il puisse conduire le processus », a-t-il ajouté, en référence à des pourparlers de paix. « Le dirigeant est notre négociateur en chef », a-t-il précisé. « Jusqu’à présent, l’État turc n’a apporté aucune garantie ni aucune mesure pour faciliter le processus » a déploré Zagros Hiwa, porte-parole de l’Union des communautés du Kurdistan (KCK), qui chapeaute le PKK. Dans le nord de l’Irak « à ce jour des bombardements et tirs d’artillerie continuent de viser nos positions », a-t-il dit. La Turquie a indiqué qu’elle surveillerait attentivement le processus de désarmement du PKK, replié sur ses bases arrières dans les régions montagneuses du nord de l’Irak, dans la région autonome du Kurdistan irakien. Si l’incertitude règne sur le sort réservé aux combattants du mouvement qui espèrent une amnistie, des médias turcs ont récemment indiqué que des cadres pourraient être contraints à l’exil dans des pays tiers, citant la Norvège ou l’Afrique du Sud tandis que d’autres devraient rester dans le nord de l’Irak. « Si l’État turc veut sincèrement et sérieusement faire la paix, il devrait procéder aux amendements législatifs nécessaires pour que les membres du PKK soient intégrés à une société démocratique », a plaidé Zagros Hiwa. « Une vraie paix nécessite l’intégration, non l’exil ». Le problème avec ce processus de paix, comme avec celui de la Russie avec l’Ukraine, est que les parties impliquées ne sont pas prêtes à faire les concessions nécessaires pour arriver à mettre au point un accord solide et viables qui durera dans le temps. Toutefois, le PKK a déjà fait le plus difficile en proclamant sa dissolution sans qu’Ankara de son côté ait fait le moindre, officiellement en tout cas, effort pour proposer des conditions à même de satisfaire les travaillistes kurdes, au contraire. Reste à voir si les autorités turques tenteront de se montrer plus conciliants ou si ces efforts de paix tourneront au fiasco, comme l’anticipent déjà certains.