La 13 édition du Festival international de danse contemporaine a ouvert le bal, jeudi soir, au Théâtre national Mahieddine-Bachtarzi. Placée sous le slogan « Hymne à la paix » et ayant pour invitée d’honneur la Palestine, la soirée inaugurale a, pour le coup, livré un signal fort de fraternité et d’engagement, où mémoire, résistance et espérance se sont exprimées à l’unisson, en soutien à la cause palestinienne.
Devant un parterre d’invités prestigieux – délégation du ministère de la Culture et des Arts, ambassadeurs, artistes, journalistes et public passionné – la scène du TNA s’est muée en un pont de communion et de solidarité. Au cœur des hommages, un nom résonnait, avec force, comme prévu : Gaza, et à travers elle, toute la Palestine.
Dans une allocution poignante, la commissaire du festival et présidente de cette édition, Fatima Zohra Namous-Senouci, a, d’emblée, donné le ton : « Je tiens à rappeler que la Palestine est l’invitée d’honneur. De ce fait, j’exprime tout mon amour aux peuples palestinien et algérien, unis comme des frères. Et je remercie chaleureusement tous les participants à ce festival. À cette occasion, nous avons la joie d’accueillir des talents venus de plusieurs wilayas du pays, mais aussi de différentes régions du monde. Vive la Palestine, vive l’Algérie, vive la Danse, vive la Culture ! » Ses mots, empreints de profondeur, ont, immédiatement, transporté le public dans l’esprit de ce rendez-vous, celui de faire de l’art un hymne à la paix pour la Palestine injustement occupée et une passerelle entre les peuples.
Pour cette édition, un hommage appuyé a été rendu à Sahra Khmida (1953-2009), née à Béjaïa et figure emblématique de la première génération du Ballet national algérien. Danseuse et chorégraphe d’exception, membre de la troupe des arts populaires de l’ONCI, elle était également fille de chahid et de moudjahida.
Lauréate de prestigieuses distinctions internationales – au Liban (2001), en Espagne (2006) et en Turquie (2006) –, elle a marqué son époque par la richesse de son parcours artistique et l’éclat de son talent. Sa mémoire, honorée par ses pairs, rappelle combien la danse en Algérie est un art profondément enraciné dans le patrimoine culturel algérien, porté par des femmes et des hommes qui ont consacré leur vie à sa transmission et à sa préservation.
Le spectacle s’est ouvert sur la prestation magistrale du chorégraphe palestinien Mohamed Ali Dib, qui a mêlé plusieurs styles dans une démarche à portée universelle. Interrogé par Le Jeune Indépendant à l’issue du spectacle, l’artiste, visiblement ému, a confié : « Pour cette prestation, je voulais créer quelque chose qui plaise à un public universel. Grâce à la danse contemporaine, j’ai mêlé différents styles – pop, classique, afro, etc. – afin que chacun puisse y retrouver une touche artistique qui le représente. Techniquement parlant, le résultat est impressionnant ! ». Dans la même veine, il a également salué le talent et l’énergie des jeunes artistes algériens, qu’il dit considérer comme « porteurs d’un avenir prometteur pour la scène chorégraphique ».
« Ah ya Ghaza » : une création pro-palestinienne bouleversante
Le moment fort de la soirée fut sans conteste la présentation de « Ah ya Ghaza » (Ô Ghaza). Cette création inédite s’appuie sur le texte poétique et envoûtant de Nadjat Taybouni, porté par un arrangement musical inspiré de l’œuvre de Mohamed Abdel Wahab, Asbaha Aidi el Ana Boundoukia ( J’ai maintenant un fusil), jadis immortalisée par la voix d’Oum Kalthoum. Mise en scène et chorégraphiée par Fatima Zohra Namous-Senouci, la pièce a plongé le public dans une expérience à la fois sensorielle et émotionnelle d’une grande intensité. Sur scène, les jeunes danseurs et danseuses venus des quatre coins de l’Algérie ont donné corps et souffle à la douleur, à la résistance et à l’espérance du peuple palestinien.
Pour terminer, les tableaux chorégraphiques, intégrant des gestuelles contemporaines, ont également incarné la mémoire, la souffrance et la dignité de ce peuple longtemps opprimé. La compagnie de dance et Théâtre syrienne « Ougarit » a, en ce sens, donné un vibrant hommage artistique à la Palestine, avant qu’un tableau collectif réunissant l’ensemble des artistes de la soirée ne vienne clore ce moment d’intense émotion, renforçant toute la portée de ce festival.
Tout au long de la soirée, les mots comme les gestes ont convergé, avec intensité, vers une seule et même cause. À l’issue de la cérémonie, Fatima Zohra Namous-Senouci a affirmé : « Nous sommes corps et âme solidaires avec le peuple palestinien. » Interrogée par Le Jeune Indépendant sur son ressenti personnel, elle a confié : « À titre personnel, je suis parvenue à transmettre ce que je souhaitais, et cela m’épanouit ! Je suis satisfaite de la prestation des artistes et enchantée par l’enthousiasme du public », soulignant, par la même occasion, que le niveau professionnel des masterclass a constitué l’un des temps forts de cette 13ᵉ édition.
Pour sa part, Kaddour Nourdine, qui a aussi accompagné la formation des jeunes danseurs, n’a pas caché sa fierté : « Au bout de cinq jours de travail acharné, ces jeunes – qui ne sont pas encore reconnus comme des professionnels – ont brillé sur scène. Par le truchement des formations dépensées, ces danseurs et danseuses ont contribué à la réussite du spectacle, dédié à Ghaza et à la Palestine. »
Un festival comme espace de dialogue
Au-delà du spectacle de la soirée inaugurale, le festival, qui s’étendra jusqu’au 22 septembre, propose une programmation riche, rassemblant huit pays participants, à savoir l’Algérie, la Palestine, la Chine, la Syrie, le Sénégal, la Russie, l’Espagne, l’Italie et la Tchéquie. Pour Mme Namous-Senouci, cet événement se veut « une invitation à prendre le temps. Le temps d’observer, d’écouter et de comprendre. Le temps de rencontrer l’autre dans sa singularité et son universalité. Le temps de reconnaître que l’art peut être un acte de maturité collective ». Et d’ajouter : « cette édition se déroule dans un contexte mondial turbulent, marqué par de nombreuses tensions, mais il est aussi porteur de sens, d’écoute et d’intelligence partagée. Nous avons donc choisi de poursuivre ce festival dans un cadre clair, fondé sur la nécessité impérieuse de faire de la culture un langage commun, un langage qui relie sans estomper, un langage élégant – un langage qui est l’hymne à la paix ».
Au terme de la soirée, les applaudissements nourris du public ont témoigné de l’impact puissant de cette cérémonie d’ouverture. Entre solidarité et ferveur, entre hommage et créativité, la soirée inaugurale du festival a tenu sa promesse, celle de transformer la danse contemporaine en un espace d’expression, de lucidité et de soutien indéfectible à la cause palestinienne.
« ils n’ont pu te mettre à genoux. Ils ont brisé tes murs, mais tes fondations sont restées intactes […] Le Chahid renaît de ses cendres », a écrit Nadjat Taybouni dans son texte « Ah, ya Ghaza ». Leur écho demeure vivant dans les cœurs ! À Alger, le temps d’une soirée, la danse a porté haut les voix de la cause palestinienne, de la dignité et de la paix.
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