Tribunal
Loin de l’attitude conciliatrice que la Maison-Blanche lui demande d’adopter, dans l’espoir de parvenir à un accord de paix durable et solide avec Moscou, le président Ukrainien veut avant tout faire payer Vladimir Poutine, et semble incapable d’envisager les tristes réalités de la diplomatie internationale. Volodymyr Zelensky a ainsi signé mercredi un accord avec le […]

Loin de l’attitude conciliatrice que la Maison-Blanche lui demande d’adopter, dans l’espoir de parvenir à un accord de paix durable et solide avec Moscou, le président Ukrainien veut avant tout faire payer Vladimir Poutine, et semble incapable d’envisager les tristes réalités de la diplomatie internationale. Volodymyr Zelensky a ainsi signé mercredi un accord avec le Conseil de l’Europe pour instituer un tribunal spécial afin de poursuivre et juger les responsables du «crime d’agression contre l’Ukraine», qu’il espère voir un jour juger Vladimir Poutine. «Il va falloir du courage politique et judiciaire, pour s’assurer que tous les criminels de guerre russes soient jugés, y compris Poutine, le président russe», a déclaré l’ex-comique devenu président. C’est la première fois qu’un tribunal spécial est créé sous l’égide du Conseil de l’Europe, vigie des droits de l’homme sur le continent qui compte 46 membres, dont l’Ukraine. La Russie en a été exclue peu après avoir lancé, en février 2022, une guerre à grande échelle contre l’Ukraine, toujours en cours. Un tribunal spécial vise à juger les responsables de graves violations des droits de l’homme dans le cadre d’un conflit spécifique, comme il en a existé pour les crimes dans les ex-Républiques yougoslaves ou pour le génocide des Tutsis au Rwanda. Sa création, annoncée le 9 mai à Lviv par l’Ukraine et ses alliés européens, permet de contourner l’impossibilité de juger le «crime d’agression» à la Cour pénale internationale (CPI), non reconnue par Moscou. «L’accord d’aujourd’hui et ce tribunal nous donnent une vraie chance d’obtenir justice pour le crime d’agression», a encore déclaré Volodymyr Zelensky, arrivé à Strasbourg vers 21h00 après avoir passé la journée à La Haye pour le sommet de l’Otan, où il a notamment rencontré Donald Trump. «L’agresseur doit perdre la guerre», a-t-il ajouté. Le tribunal spécial ne pourrait toutefois pas poursuivre le président russe Vladimir Poutine, ni son Premier ministre, Mikhaïl Michoustine et son ministre des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, tant qu’ils sont en fonction. «Nous nous rencontrons à un moment critique dans notre soutien collectif à l’Ukraine, à la justice, au combat contre l’impunité, afin que l’ordre et l’État de droit s’imposent», a de son côté déclaré le secrétaire général du Conseil de l’Europe, le Suisse Alain Berset. Outre le projet de tribunal spécial, le Conseil de l’Europe est à l’initiative d’un registre des dommages causés par la guerre en Ukraine. Ce registre a reçu «plus de 34 000 demandes d’indemnisation à ce jour», selon Berset. Quelques heures après avoir rencontré Donald Trump à La Haye, Zelensky a appelé les Européens à conserver «un lien fort» avec le président américain. «Nous avons besoin d’unité entre l’Europe et les États-Unis, et nous vaincrons», a-t-il insisté. Depuis son retour à la présidence, Donald Trump a souvent affiché son mépris pour l’Europe et l’Ukraine, et ménagé au contraire Vladimir Poutine, comme en a témoigné sa spectaculaire altercation verbale avec Volodymyr Zelensky dans le Bureau ovale en février. Depuis, les liens recrées avec Poutine se sont distendus et le président américain aurait même à de nombreuses reprises critiqué vertement le maître du Kremlin, dont l’attitude non pas moins rigide que celle de Zelensky frustrerait grandement le patron de la Maison-Blanche, qui s’était vanté durant sa campagne présidentielle de résoudre rapidement, après sa prise de fonctions, le conflit entre les deux pays d’Europe de l’Est. Reste à voir quel résultat la posture jusqu’au-boutiste de Kiev et de Moscou aura sur le long terme. Surtout du côté des Ukrainiens, qui dépendent entièrement du bon vouloir des pays occidentaux pour financer leur effort de guerre, alors que les contribuables européens et américains sont de plus en plus nombreux à refuser cette contribution qui accroît leurs difficultés financières.
F. M.