Hacène Menouar, président de l’association El Aman : «Les boissons énergisantes, un danger sous-estimé»
Le président de l’association El Aman pour la protection des consommateurs, Hacène Menouar, alerte sur la consommation croissante des boissons énergisantes en Algérie, particulièrement chez les jeunes. Il souligne, dans un entretien accordé au Jeune Indépendant, les risques sanitaires associés à ces produits et appelle à une réglementation plus stricte, ainsi qu’à une prise de […] The post Hacène Menouar, président de l’association El Aman : «Les boissons énergisantes, un danger sous-estimé» appeared first on Le Jeune Indépendant.
Le président de l’association El Aman pour la protection des consommateurs, Hacène Menouar, alerte sur la consommation croissante des boissons énergisantes en Algérie, particulièrement chez les jeunes. Il souligne, dans un entretien accordé au Jeune Indépendant, les risques sanitaires associés à ces produits et appelle à une réglementation plus stricte, ainsi qu’à une prise de conscience collective, tant au niveau des parents que des autorités publiques.
Le Jeune Indépendant : Quelle est l’ampleur de la consommation de boissons énergisantes en Algérie, en particulier chez les jeunes ?
Hacène Menouar : Bien que nous ne disposions pas de chiffres précis, les observations sur le terrain, tant au niveau du marché que des consommateurs, montrent une consommation en forte augmentation. Autrefois, une seule marque importée était disponible. Aujourd’hui, huit marques sont commercialisées, dont sept produites localement.
Cette tendance est préoccupante, car ces boissons sont désormais vendues partout : supermarchés, supérettes, épiceries et, plus inquiétant encore, dans les salles de sport. Selon des sondages réalisés auprès des parents, la majorité d’entre eux affirment que leurs enfants consomment ces boissons dites énergisantes. Dans de nombreux cas, ce sont les jeunes eux-mêmes qui les achètent.
Il est évident que ce phénomène prend de l’ampleur : la demande augmente, la production suit, et les rayons dédiés à ces produits dans les magasins s’élargissent constamment, ce qui amplifie d’autant plus les risques liés à leur consommation.
Que peuvent faire les parents pour adopter une approche plus responsable ?
Les parents doivent faire preuve de davantage de responsabilité et de discernement en lisant attentivement les ingrédients des produits avant de les acheter. Ils devraient porter une plus grande attention à ce que leurs enfants consomment, se renseigner sur les composants de ces produits et être conscients des risques qu’ils représentent pour la santé. Il est impératif que les parents prennent conscience de ce problème.
Il est crucial de sensibiliser les parents et de leur fournir les outils nécessaires pour éduquer leurs enfants. Il ne suffit pas de les inscrire dans les meilleures écoles, il faut aussi leur offrir une alimentation de qualité, qui ne correspond pas nécessairement à leurs envies. Une discipline alimentaire stricte doit être instaurée, et les parents doivent s’imposer lors des repas. Enfin, il est essentiel de surveiller ce que les enfants achètent à l’extérieur. Certains opérateurs économiques profitent du manque de culture de consommation chez les jeunes pour maximiser leurs profits, sans se soucier des conséquences sur leur santé.
Quelles catégories de consommateurs sont les plus concernées par ces produits ?
Les adolescents sont les principaux consommateurs, qu’ils soient collégiens, lycéens ou étudiants universitaires. Plus inquiétant encore, ces boissons sont aussi très prisées par les jeunes sportifs. Toutefois, la consommation ne se limite pas à cette tranche d’âge. Les chauffeurs routiers, les enseignants et les médecins de garde comptent aussi parmi les consommateurs réguliers, pensant que ces boissons leur procurent un regain d’énergie et les aident à lutter contre la fatigue. Le prix abordable et le goût attractif de ces boissons favorisent leur consommation, qui peut rapidement devenir une habitude difficile à rompre.
Pouvez-vous nous expliquer pourquoi votre association s’intéresse aux boissons énergisantes ?
En tant qu’association de protection des consommateurs, nous avons fait de la santé et du droit à la vie notre priorité. Etant donné que les boissons énergisantes sont de plus en plus consommées en Algérie et qu’elles représentent un véritable problème de santé publique, nous avons décidé d’agir en menant des actions concrètes à ce sujet.
Cela ne signifie pas pour autant que nous ignorons d’autres produits nocifs, tels que le tabac, les stupéfiants, la drogue ou encore la consommation excessive de sucre. Cependant, nous accordons une attention particulière aux boissons énergisantes en raison de leur consommation croissante et des risques préoccupants qu’elles engendrent.
La réglementation en Algérie est-elle suffisante pour encadrer la vente et la publicité de ces boissons ? Y a-t-il des restrictions d’âge ?
En Algérie, la réglementation stipule que les boissons énergisantes ne doivent pas être consommées par les moins de 16 ans, les femmes enceintes ou allaitantes, ainsi que par les personnes souffrant de problèmes cardiovasculaires, les diabétiques et les sportifs pratiquant une activité intense.
Cependant, ces textes présentent de nombreuses insuffisances : ils manquent de clarté et ne sont pas suffisamment visibles pour les consommateurs. Par ailleurs, la réglementation exige que ces boissons soient vendues séparément des autres produits, ce qui est rarement appliqué.
Nous appelons à un renforcement du cadre réglementaire, en proposant notamment d’interdire ces boissons aux moins de 18 ans et d’instaurer des taxes supplémentaires, notamment sur les produits importés, afin de limiter leur accessibilité.
Quelles actions l’association mène-t-elle pour sensibiliser les consommateurs sur les dangers des boissons énergisantes ?
Nous avons lancé notre campagne de sensibilisation dès que nous avons pris connaissance de cette problématique. Nous mobilisons actuellement tous les moyens nécessaires pour atteindre nos objectifs. Nous avons sollicité les médias, notamment la radio, la télévision et la presse écrite. Par ailleurs, nous prévoyons d’exploiter d’autres canaux, tels que les mosquées et le secteur de l’éducation, en organisant des interventions dans les établissements scolaires.
En parallèle, nous envisageons également une sensibilisation via les réseaux sociaux. Pour cela, nous comptons collaborer avec des influenceurs bénéficiant d’une large audience, afin de renforcer l’impact de notre message et sensibiliser efficacement les Algériens aux dangers liés à la consommation de ces boissons.
Quelles mesures préconisez-vous pour lutter contre ce problème à l’échelle nationale ?
Il est impératif que les pouvoirs publics s’y intéressent de près. Ils doivent considérer cette problématique comme une menace à la sécurité nationale. Pourquoi aller aussi loin ? Parce que si la santé publique est gravement affectée, en particulier chez les jeunes, cela entraînera une augmentation des maladies, une diminution du nombre de citoyens actifs et, à terme, cela pourrait même compromettre la souveraineté économique du pays.
Les pouvoirs publics doivent réagir rapidement à notre demande en révisant le cadre réglementaire et en instaurant des contrôles stricts, notamment sur le terrain et dans les usines. Ils devraient également soutenir les associations dans leurs efforts de sensibilisation en leur offrant davantage d’accès aux médias, aux écoles, aux collèges, aux cités universitaires, et même aux mosquées, où les imams pourraient jouer un rôle important en sensibilisant les consommateurs aux dangers.
Par ailleurs, pourquoi ne pas profiter de cet élan, que nous espérons créer, pour aborder d’autres problématiques liées à la santé publique ? Par exemple, l’impact du sucre, du sel, des matières grasses, et de nombreux autres produits qui nuisent gravement à la santé des Algériens.
L’APAB s’est associée à vos efforts pour lutter contre la consommation abusive des boissons énergisantes et a récemment publié un communiqué sur le sujet. Quelle est votre analyse de cette démarche et quels impacts espérez-vous en tirer ?
Les représentants de l’APAB (Association des producteurs algériens de boissons) ont participé activement aux ateliers, notamment pour défendre les intérêts des opérateurs qu’ils représentent, ce qui est compréhensible. Cependant, l’APAB doit assumer pleinement son rôle d’association d’opérateurs économiques engagés, faisant preuve de conscience professionnelle et d’un esprit de citoyenneté.
Les membres de l’association affirment respecter les réglementations en vigueur, notamment en matière d’étiquetage et de composition chimique de ces produits. Ils s’engagent également à suivre et appliquer toutes les nouvelles réglementations.
Cependant, les opérateurs économiques soulignent que le véritable problème réside dans la manière dont ces boissons sont commercialisées et dans la culture de consommation des Algériens qui, souvent, ne vérifient pas suffisamment la qualité ou la conformité des produits qu’ils achètent.
Cependant, plusieurs ministères sont concernés par cette problématique. Le ministère de l’Education doit alerter les directeurs d’établissements scolaires sur ce phénomène, quant au ministère du Commerce, il doit renforcer les contrôles sur la distribution de ces boissons.
Le ministère de l’Industrie doit travailler à l’amélioration du cadre juridique et celui de la Santé doit tirer la sonnette d’alarme en mettant en évidence les dangers liés à la consommation excessive de ces produits. Une action concertée entre ces différents acteurs est essentielle pour faire face à ce véritable problème de santé publique et de régulation du marché.
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